Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 février et 8 juin 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION SYNDICALE DU CANAL D'ARROSAGE DE PALAU DEL VIDRE, dont le siège est à l'hôtel de ville à Palau-del-Vidre (66690) ; l'ASSOCIATION SYNDICALE DU CANAL D'ARROSAGE DE PALAU DEL VIDRE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 15 décembre 2005 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a déchargé la SCI Tanyari de l'obligation de payer les sommes de 129,94 euros, 123,33 euros, 123,49 euros et 42,23 euros mises à sa charge par l'ASSOCIATION SYNDICALE DU CANAL D'ARROSAGE DE PALAU DEL VIDRE au titre de taxes d'arrosage et de curage pour les années 2001, 2002, 2003 et 2004 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions de la SCI Tanyari ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 21 juin 1865 relative aux associations syndicales ;
Vu le décret du 18 décembre 1927 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Claire Legras, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Ricard, avocat de l'ASSOCIATION SYNDICALE DU CANAL D'ARROSAGE DE PALAU DEL VIDRE et de Me Haas, avocat de la SCI Tanyari,
- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un jugement du 15 décembre 2005, le tribunal administratif de Montpellier a déchargé la SCI Tanyari des sommes mises à sa charge au titre des taxes d'arrosage et de curage dues pour ses deux parcelles comprises dans le périmètre de l'ASSOCIATION SYNDICALE DU CANAL D'ARROSAGE DE PALAU DEL VIDRE qui lui avaient été assignées pour les années 2001, 2002, 2003 et 2004 ; que l'ASSOCIATION SYNDICALE DU CANAL D'ARROSAGE DE PALAU DEL VIDRE se pourvoit en cassation contre ce jugement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'ASSOCIATION SYNDICALE DU CANAL D'ARROSAGE DE PALAU DEL VIDRE a été constituée par un arrêté préfectoral du 31 mars 1853 formant règlement d'administration publique pour l'usage des eaux du canal Pagès, ancienne dénomination du canal de Palau del Vidre, qui n'a été ni abrogé ni modifié ; qu'il résulte des dispositions de la loi du 21 juin 1865 sur les associations syndicales, notamment de son article 26, que cette loi n'a pas eu pour effet de supprimer les associations syndicales instituées antérieurement ; qu'il suit de là que le fonctionnement et l'organisation de l'association requérante demeurent régis par l'arrêté de 1853 ;
Considérant que les articles 27 et 28 de l'arrêté du 31 mars 1853 prévoient que l'inscription au tableau d'arrosage de l'association requérante s'effectue à la demande du propriétaire concerné et que les révisions de ce tableau peuvent être demandées chaque année et interviennent au moins tous les quatre ans ; que, conformément à l'article 26 de cet arrêté, ce tableau a uniquement pour fonction d'indiquer l'ordre d'arrosage des parcelles et le temps d'arrosage imparti à chacune d'elles ; que le tribunal a déduit des dispositions de ces articles que seuls les propriétaires qui ont sollicité leur inscription au tableau d'arrosage sont redevables de la taxe syndicale et a estimé que dès lors qu'il n'était pas contesté que tel n'était pas le cas de la SCI Tanyari, celle-ci ne pouvait être regardée comme redevable des taxes syndicales mises à sa charge par l'association requérante ;
Considérant, toutefois, qu'il ressort de l'ensemble des dispositions de l'arrêté du 31 mars 1853 que cette association est chargée, d'une part, de l'entretien et du curage du canal de Palau del Vidre et, d'autre part, de l'alimentation des oeils d'arrosage des propriétaires qui ont installé et qui entretiennent à leurs frais les voies d'eau secondaires nécessaires ; que les taxes syndicales prélevées par cette association ont ainsi pour objet d'assurer la répartition entre les propriétaires qui en sont membres des dépenses liées aux frais d'entretien, de curage et de réalisation de travaux qu'elle assume conformément à ses statuts, en fonction de la surface susceptible d'être arrosée ; que, par suite, en jugeant que la seule circonstance qu'un propriétaire membre de l'association n'aurait pas confirmé l'inscription de ses parcelles au tableau d'arrosage tenu par celle-ci devait entraîner la décharge des taxes syndicales qui lui ont été assignées, sans que soit établi un défaut d'exécution par l'association des tâches qui lui incombaient, le tribunal administratif de Montpellier a commis une erreur de droit ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler le jugement attaqué et de régler l'affaire au fond sur le fondement de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant que les requêtes n°s 0105083, 0300775, 0303950 et 0407016 présentées par la SCI Tanyari devant le tribunal administratif présentent à juger la même question ; que, par suite, il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non ;recevoir opposées par l'ASSOCIATION SYNDICALE DU CANAL D'ARROSAGE DE PALAU DEL VIDRE aux conclusions de la requête de première instance de la SCI Tanyari ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, la SCI Tanyari n'est pas fondée à soutenir que les taxes dont elle demande la décharge lui ont été assignées illégalement au seul motif qu'elle n'utilise pas l'arrosage mis à la disposition de ses membres par l'ASSOCIATION SYNDICALE DU CANAL D'ARROSAGE DE PALAU DEL VIDRE et qu'elle n'a pas confirmé l'inscription de ses parcelles au tableau d'arrosage tenu par cette association ;
Considérant qu'il résulte ce qui précède que la SCI Tanyari n'est pas fondée à demander la décharge des taxes syndicales mises à sa charge au titre des années 2001 à 2004 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'ASSOCIATION SYNDICALE DU CANAL D'ARROSAGE DE PALAU DEL VIDRE, qui n'est pas, dans la présente affaire, la partie perdante, la somme que demande la SCI Tanyari au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la SCI Tanyari les sommes demandées au même titre par l'ASSOCIATION SYNDICALE DU CANAL D'ARROSAGE DE PALAU DEL VIDRE devant le tribunal administratif et devant le Conseil d'Etat ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 15 décembre 2005 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la SCI Tanyari devant le tribunal administratif de Montpellier est rejetée.
Article 3 : Les taxes syndicales dont la décharge a été prononcée par le tribunal administratif de Montpellier sont remises à la charge de la SCI Tanyari.
Article 4 : Les conclusions de la SCI Tanyari et de l'ASSOCIATION SYNDICALE DU CANAL D'ARROSAGE DE PALAU DEL VIDRE tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION SYNDICALE DU CANAL D'ARROSAGE DE PALAU DEL VIDRE et à la SCI Tanyari.