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06/11/2006 | FRANCE | N°266429

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 06 novembre 2006, 266429


Vu les requêtes sommaires, enregistrées au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 9 avril 2004, et les mémoires complémentaires, enregistrés le 2 septembre 2004, présentés pour le GROUPEMENT D'INTERET ECONOMIQUE (G.I.E.) GOOD YEAR MIREVAL, dont le siège est Centre d'essais B.P. 153, Mireval, à Frontignan Cedex (34114) ; le G.I.E. GOOD YEAR MIREVAL demande au Conseil d'Etat :

1°), sous le n° 266429, d'annuler l'arrêt du 5 février 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 17 juin 199

9 et l'a rétabli aux rôles de la taxe foncière sur les propriétés bâ...

Vu les requêtes sommaires, enregistrées au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 9 avril 2004, et les mémoires complémentaires, enregistrés le 2 septembre 2004, présentés pour le GROUPEMENT D'INTERET ECONOMIQUE (G.I.E.) GOOD YEAR MIREVAL, dont le siège est Centre d'essais B.P. 153, Mireval, à Frontignan Cedex (34114) ; le G.I.E. GOOD YEAR MIREVAL demande au Conseil d'Etat :

1°), sous le n° 266429, d'annuler l'arrêt du 5 février 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 17 juin 1999 et l'a rétabli aux rôles de la taxe foncière sur les propriétés bâties de la commune de Mireval (Hérault) à raison de l'intégralité des droits auxquels il avait été assujetti supplémentairement au titre des années 1994 et 1995 et primitivement au titre des années 1996, 1997 et 1998, ainsi que de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°), sous le n° 266430, d'annuler l'arrêt du 5 février 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 17 juin 1999 et l'a rétabli aux rôles de la taxe professionnelle de la commune de Mireval (Hérault) à raison de l'intégralité des cotisations supplémentaires auxquelles il avait été assujetti au titre des années 1994 et 1995, ainsi que de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Emmanuelle Cortot, Auditeur,

- les observations de la SCP Defrenois, Levis, avocat du G.I.E. GOOD YEAR MIREVAL,

- les conclusions de M. Laurent Vallée, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées du G.I.E. GOOD YEAR MIREVAL, respectivement dirigées contre les arrêts du 5 février 2004 par lesquels la cour administrative d'appel de Marseille l'a rétabli, d'une part, aux rôles de la taxe foncière sur les propriétés bâties de chacune des années 1994 à 1998, d'autre part, aux rôles de la taxe professionnelle des années 1994 et 1995 de la commune de Mireval (Hérault), à raison de l'intégralité des droits auxquels il était resté assujetti par voie de cotisations supplémentaires ou primitives et dont il avait été déchargé par le tribunal administratif de Montpellier, présentent à juger la même question ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;

Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers soumis à la cour administrative d'appel que les cotisations supplémentaires ou fractions d'impositions primitives litigieuses de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxe professionnelle procèdent de ce qu'à l'issue d'un contrôle effectué en 1995, l'administration a rehaussé la valeur locative de l'ensemble immobilier dont le G.I.E. GOOD YEAR MIREVAL est propriétaire à Mireval et qu'il utilise pour l'exploitation d'un centre d'essais de pneumatiques, en substituant à la valeur jusqu'alors déterminée par voie de comparaison avec un local-type de ladite commune qui lui est apparu dépourvu de toute analogie avec cet ensemble immobilier une valeur arrêtée par voie d'appréciation directe ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1498 du code général des impôts, auquel renvoie, notamment, l'article 1469 dudit code relatif aux bases de la taxe professionnelle : La valeur locative de tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire..., la valeur locative est déterminée par comparaison. Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, d'une part, la valeur locative d'un immeuble qui, comme en l'espèce, est utilisé par son propriétaire ne peut légalement être déterminée par voie d'appréciation directe que s'il est impossible de la fixer par voie de comparaison, et que, d'autre part, peuvent, notamment, être retenus comme termes de comparaison des immeubles situés hors de la commune et qui ont, eux-mêmes, fait l'objet d'une évaluation par voie de comparaison avec des immeubles similaires, loués à des conditions de prix normales à la date de la révision, quelle que soit leur commune d'implantation, pourvu que, du point de vue économique, toutes les localités en cause présentent une analogie suffisante ; que la cour administrative a, par suite, comme le soutient le G.I.E. GOOD YEAR MIREVAL, entaché les arrêts attaqués d'une erreur de droit en se fondant, pour juger, notamment, insusceptibles d'être utilisés comme termes de comparaison en vue de déterminer la valeur locative de l'ensemble immobilier dont ce groupement dispose quatre centres d'essais ou de recherche situés en France et dont celui-ci faisait état, sur ce que les dispositions précitées de l'article 1498 du code général des impôts faisaient obstacle à ce que soit retenu comme terme de comparaison un immeuble dont la valeur locative a, elle-même, été fixée par voie de comparaison, ainsi qu'en l'occurrence, l'avait été celle de chacun des quatre ensembles immobiliers désignés ; que le G.I.E. GOOD YEAR MIREVAL est, dès lors, fondé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de ses pourvois, à demander que les deux arrêts attaqués soient annulés ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler les affaires au fond ;

Considérant que, pour accorder au G.I.E. GOOD YEAR MIREVAL, par les deux jugements du 17 juin 1999 dont le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie fait appel, la décharge ou la réduction des impositions litigieuses, le tribunal administratif de Montpellier s'est fondé sur ce que l'administration avait à tort utilisé, pour déterminer la valeur locative de l'ensemble immobilier dont le groupement dispose à Mireval, la méthode de l'appréciation directe, dès lors qu'il résultait de l'instruction qu'existaient, dans d'autres communes en France dont il n'était pas établi que la situation économique ne fût pas analogue à celle de Mireval, des ensembles immobiliers susceptibles d'être retenus comme termes de comparaison ; que le ministre, au soutien de ses recours, conteste que l'un quelconque des dix ensembles immobiliers désignés par le G.I.E. GOOD YEAR MIREVAL et auxquels se sont implicitement référés les premiers juges satisfasse aux conditions qui permettraient de l'utiliser aux fins d'une comparaison conforme aux prescriptions du 2° de l'article 1498 du code général des impôts ;

Considérant, en premier lieu, que, s'il invoque les spécificités respectives des diverses régions dans lesquelles sont implantés les centres d'essais ou de recherche dont il s'agit, le ministre n'établit pas l'existence, entre les localités de situation de ces centres et celle où le centre GOOG YEAR MIREVAL est situé, de disparités économiques telles, qu'elles feraient obstacle à ce que soit opérée toute comparaison de valeurs locatives de l'une à l'autre ;

Considérant, en second lieu, que, s'il fait à bon droit valoir que six des ensembles immobiliers dont il s'agit ne sauraient être retenus comme termes de comparaison, pour avoir fait l'objet d'une évaluation par voie d'appréciation directe ou suivant les règles prévues par l'article 1499 du code général des impôts pour les établissements industriels, et que, parmi les quatre autres, évalués par voie de comparaison, deux ont improprement été comparés à des immeubles ne présentant pas avec eux la similitude exigée par le b. du 2° de l'article 1498, le ministre, en revanche, n'établit pas que les centres d'essais BMW France et Kleber, respectivement situés à Istres et à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), et dont il indique seulement qu'ils ont tous deux été évalués par comparaison avec le même local-type, soient inappropriés à servir de termes de comparaison en vue de l'évaluation de l'ensemble immobilier du centre GOOD YEAR MIREVAL ;

Considérant qu'il suit de là, sans qu'il soit besoin de rechercher si, parmi les autres centres d'essais ou circuits automobiles dont le G.I.E. GOOD YEAR MIREVAL fait mention dans le dernier état de sa défense aux recours du ministre, certains peuvent également constituer des termes de comparaison utiles, que lesdits recours, en tout état de cause infondés, doivent être rejetés ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat, en remboursement des frais exposés par le G.I.E. GOOD YEAR MIREVAL tant devant la cour administrative d'appel de Marseille que devant le Conseil d'Etat et non compris dans les dépens, la somme de 4 000 euros ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les deux arrêts attaqués de la cour administrative d'appel de Marseille du 5 février 2004 sont annulés.

Article 2 : Les recours présentés devant la cour administrative d'appel de Marseille par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sont rejetés.

Article 3 : L'Etat versera au G.I.E. GOOD YEAR MIREVAL la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au G.I.E. GOOD YEAR MIREVAL et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 266429
Date de la décision : 06/11/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES. QUESTIONS COMMUNES. VALEUR LOCATIVE DES BIENS. - IMMEUBLE UTILISÉ PAR SON PROPRIÉTAIRE - DÉTERMINATION DE LA VALEUR LOCATIVE PAR VOIE D'APPRÉCIATION DIRECTE POSSIBLE SEULEMENT EN L'ABSENCE DE TERMES DE COMPARAISON SITUÉS Y COMPRIS HORS DE LA COMMUNE ET QUAND BIEN MÊME LEUR VALEUR LOCATIVE A ELLE-MÊME ÉTÉ APPRÉCIÉE PAR VOIE DE COMPARAISON POURVU QUE LES COMMUNES D'IMPLANTATION SOIENT DANS UNE SITUATION ÉCONOMIQUE ANALOGUE [RJ1] - CONSÉQUENCE - DÉCHARGE DES IMPOSITIONS LITIGIEUSES ÉTABLIES SUR LA BASE D'UNE VALEUR LOCATIVE ARRÊTÉE PAR VOIE D'APPRÉCIATION DIRECTE DÈS LORS QUE L'ADMINISTRATION FISCALE N'ÉTABLIT PAS QUE DEUX DES TERMES DE COMPARAISON PROPOSÉS PAR LE CONTRIBUABLE SERAIENT INAPPROPRIÉS.

19-03-01-02 Il résulte des dispositions de l'article 1498 du code général des impôts que, d'une part, la valeur locative d'un immeuble qui, comme en l'espèce, est utilisé par son propriétaire ne peut légalement être déterminée par voie d'appréciation directe que s'il est impossible de la fixer par voie de comparaison, et que, d'autre part, peuvent, notamment, être retenus comme termes de comparaison des immeubles situés hors de la commune et qui ont, eux-mêmes, fait l'objet d'une évaluation par voie de comparaison avec des immeubles similaires, loués à des conditions de prix normales à la date de la révision, quelle que soit leur commune d'implantation, pourvu que, du point de vue économique, toutes les localités en cause présentent une analogie suffisante. Décharge des impositions litigieuses dès lors que l'administration fiscale avait cru pouvoir évaluer la valeur locative de l'ensemble immobilier utilisé par le contribuable par voie d'appréciation directe alors que le ministre n'établit pas que deux ensembles immobiliers proposés par le contribuable seraient inappropriés pour servir de termes de comparaison.


Références :

[RJ1]

Cf. 3 novembre 2003, Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie c/ SA Automar, T. p. 746.


Publications
Proposition de citation : CE, 06 nov. 2006, n° 266429
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: Mlle Emmanuelle Cortot
Rapporteur public ?: M. Vallée
Avocat(s) : SCP DEFRENOIS, LEVIS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:266429.20061106
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