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15/02/2006 | FRANCE | N°265389

France | France, Conseil d'État, 3eme sous-section jugeant seule, 15 février 2006, 265389


Vu, la requête enregistrée le 10 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande au Conseil d' Etat :

1°) d'annuler le jugement du 12 février 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 2 février 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Baman X et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant l

e tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Vu les autres pièces du dossier ;

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Vu, la requête enregistrée le 10 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande au Conseil d' Etat :

1°) d'annuler le jugement du 12 février 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 2 février 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Baman X et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Cabrera, Auditeur,

- les observations de la SCP Coutard, Mayer, avocat de M. X,

- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée en vigueur à la date de l'arrêté contesté : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. Baman X, de nationalité malienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 1er décembre 2003, de la décision du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS du 27 novembre 2003 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 26 de la même ordonnance : I. - Sauf en cas de comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à raison de l'origine ou de la religion des personnes, ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion, y compris dans les hypothèses mentionnées au dernier alinéa de l'article 25 : (…) 5° L'étranger qui réside habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (…) ;

Considérant que M. X soutient qu'il est atteint d'une infection urinaire, circonstance dont il ne s'est prévalu ni dans sa demande de titre de séjour, ni avant l'arrêté litigieux, et produit des certificats médicaux faisant état d'un suivi médical régulier dans un service d'urologie pour une durée d'un an ; que cependant, il ne ressort pas des pièces du dossier, en l'absence d'indications plus précises sur la gravité de son état de santé et sur la nature des soins qui lui étaient nécessaires, que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS aurait, en prenant le 2 février 2004 son arrêté de reconduite à la frontière, méconnu les dispositions précitées du 5° du I de l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, par suite, c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur ce moyen pour en prononcer l'annulation ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et devant le Conseil d'Etat ;

Considérant que les conclusions de M. X à fin d'annulation de la décision de refus de titre de séjour ne sont pas recevables devant le juge de la reconduite à la frontière ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'il vit avec sa femme, qui est elle-même en situation irrégulière, et ses deux enfants sur le territoire national où ces derniers sont nés, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, de ce que l'intéressé n'est pas dépourvu de tout lien familial avec son pays d'origine où vivent ses parents et ses sept frères et soeurs, en l'absence de toutes circonstances mettant les époux dans l'impossibilité de poursuivre leur vie familiale dans leur pays d'origine et d'emmener leurs enfants avec eux et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué ne porte pas au droit au respect de la vie familiale de M. X une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à demander l'annulation du jugement du 12 février 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 2 février 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. X ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SCP Coutard-Mayer, avocat de M. X, demande au titre des frais exposés par ce dernier et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du 12 février 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise par M. X et ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, à M. Baman X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 3eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 265389
Date de la décision : 15/02/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 fév. 2006, n° 265389
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin Laprade
Rapporteur public ?: M. Glaser
Avocat(s) : SCP COUTARD, MAYER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:265389.20060215
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