Vu la requête, enregistrée le 25 octobre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Kossi A, demeurant ... ; M. A demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat:
1°) d'annuler le jugement du 23 septembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 août 2004 par lequel la préfète d'Ille-et-Vilaine a décidé sa reconduite et fixé le Congo comme pays de destination ;
2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 950 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n°52-893 du 25 juillet 1952 modifiée relative au droit d'asile ;
Vu l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants (...) : 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un mois à compter de la notification du refus ou du retrait ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité congolaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 18 juin 2004, de la décision de la préfète d'Ille-et-Vilaine du 8 avril 2004 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas mentionné au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier que si M. A s'est vu refuser le bénéfice du statut de réfugié par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 21 octobre 2002, confirmée par la décision du 8 janvier 2004 de la commission de recours des réfugiés et devenue définitive, il a par ailleurs déposé, le 23 septembre 2003, une demande d'asile territorial auprès de la préfecture de l'Ille-et-Vilaine, demande sur laquelle il n'avait pas été statué à la date de l'arrêté attaqué ; que, dans ces circonstances, la préfète d'Ille-et-Vilaine ne pouvait légalement prendre à l'encontre de M. A une mesure d'éloignement avant que le ministre de l'intérieur ait statué sur sa demande d'asile territorial ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 août 2004 décidant sa reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 950 euros que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 23 septembre 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes et l'arrêté du 10 août 2004 de la préfète d'Ille-et-Vilaine ordonnant la reconduite à la frontière de M. A sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à M. A la somme de 950 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Kossi A, à la préfète d'Ille-et-Vilaine et au ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.