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02/11/2005 | FRANCE | N°272819

France | France, Conseil d'État, 10ème / 9ème ssr, 02 novembre 2005, 272819


Vu le recours, enregistré le 1er octobre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat d'annuler les articles 1, 2 et 3 du jugement du 25 mars 2004 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, annulé, à la demande de la commune de Montpellier, la décision implicite du directeur des services fiscaux de l'Hérault en tant qu'elle refuse la communication des rôles supplé

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Vu le recours, enregistré le 1er octobre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat d'annuler les articles 1, 2 et 3 du jugement du 25 mars 2004 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, annulé, à la demande de la commune de Montpellier, la décision implicite du directeur des services fiscaux de l'Hérault en tant qu'elle refuse la communication des rôles supplémentaires par taxes et par année de 1987 à 2000 et enjoint d'autre part audit directeur des services fiscaux de communiquer ces rôles à la commune de Montpellier dans le délai d'un mois à compter de la notification dudit jugement sous astreinte de 50 euros par jour de retard et mis à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le livre des procédures fiscales, notamment son article L. 135 B ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Henri Savoie, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la commune de Montpellier,

- les conclusions de Mme Marie-Hélène Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE se pourvoit en cassation contre le jugement du 25 mars 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé, à la demande de la commune de Montpellier, la décision implicite par laquelle le directeur des services fiscaux de l'Hérault a refusé de communiquer à cette dernière les rôles supplémentaires de taxe professionnelle la concernant au titre des années 1987 à 2000, a enjoint à ce directeur de procéder à la communication desdits rôles et a condamné l'Etat à verser à la commune de Montpellier une somme de 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant que l'article L. 103 du livre des procédures fiscales dispose que "L'obligation du secret professionnel, telle qu'elle est définie aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal, s'applique à toutes les personnes appelées à l'occasion de leurs fonctions... à intervenir dans l'assiette, le contrôle, le recouvrement ou le contentieux des impôts, droits, taxes et redevances prévus au code général des impôts. / Le secret s'étend à toutes les informations recueillies à l'occasion de ces opérations." ; qu'en vertu de l'article L. 113 du même livre : "Des dérogations à la règle du secret professionnel sont établies au profit d'administrations et autorités administratives, collectivités, services, organismes publics et autres personnes dans les cas prévus à la présente section. / Ceux qui bénéficient de ces dérogations sont eux-mêmes soumis au secret professionnel dans les termes des articles 226-13 et 226-14 du code pénal." ; qu'aux termes des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 135 B du livre des procédures fiscales : "... L'administration fiscale est tenue de transmettre, chaque année, aux collectivités locales et à leurs groupements dotés d'une fiscalité propre les rôles généraux des impôts directs locaux comportant des impositions émises à leur profit. / Les communes et l'administration peuvent se communiquer mutuellement les informations nécessaires au recensement des bases des impositions directes locales. / Les informations transmises aux collectivités locales ou à leurs groupements dotés d'une fiscalité propre sont couvertes par le secret professionnel et soumises aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. Leur utilisation respecte les obligations de discrétion et de sécurité selon des modalités définies par un décret en Conseil d'Etat." ;

Considérant qu'il résulte des termes du troisième alinéa de l'article L. 135 B du livre des procédures fiscales, sans qu'il soit besoin de les interpréter à la lumière des travaux préparatoires de la loi de finances rectificative pour 1992 dont ils sont issus, que l'obligation de transmission des rôles des impôts directs locaux que ce texte impose à l'administration fiscale, par dérogation à l'obligation de secret professionnel prévue par l'article L. 103 du livre des procédures fiscales, porte sur les seuls rôles généraux, c'est-à-dire ceux qui concernent la généralité des contribuables ; que tel n'est pas le cas des rôles supplémentaires, lesquels sont notamment relatifs aux contribuables ayant fait l'objet d'un redressement ; que, par suite, en annulant comme contraire aux dispositions du troisième alinéa de l'article L. 135 B du livre des procédures fiscales le refus opposé par le directeur des services fiscaux de l'Hérault à la demande de la commune de Montpellier de lui transmettre les rôles supplémentaires de la taxe professionnelle émis à son profit pour les années 1987 à 2000 et en enjoignant à l'administration de procéder à la communication demandée, le tribunal administratif de Montpellier a commis une erreur de droit ; que le ministre est par suite fondé à demander, dans cette mesure, l'annulation du jugement attaqué du 25 mars 2004 ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus le directeur des services fiscaux de l'Hérault a pu légalement se fonder sur les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 135 B du livre des procédures fiscales pour refuser de communiquer à la commune de Montpellier les rôles supplémentaires de la taxe professionnelle qu'elle sollicitait ; que si les dispositions du quatrième alinéa du même article permettent aux communes et à l'administration fiscale de "se communiquer mutuellement les information nécessaires au recensement des bases des impositions directes locales", cette faculté ne s'applique qu'aux informations nécessaires au recensement des bases et ne concerne pas, en tout état de cause, la communication des rôles supplémentaires de ces impositions ;

Considérant qu'il suit de là que la commune de Montpellier n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision implicite de refus opposée à sa demande ; que ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au directeur des services fiscaux de l'Hérault de procéder à la communication sollicitée doivent être, par voie de conséquence, rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à la commune de Montpellier la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les articles 1, 2 et 3 du jugement du 25 mars 2004 du tribunal administratif de Montpellier sont annulés.

Article 2 : La demande de la commune de Montpellier devant le tribunal administratif de Montpellier est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Montpellier tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à la commune de Montpellier.

Copie en sera adressée pour information au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 10ème / 9ème ssr
Numéro d'arrêt : 272819
Date de la décision : 02/11/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

COLLECTIVITÉS TERRITORIALES - DISPOSITIONS GÉNÉRALES - DISPOSITIONS FINANCIÈRES - PRINCIPES GÉNÉRAUX - OBLIGATION DE TRANSMISSION PAR L'ADMINISTRATION FISCALE DES RÔLES DES IMPÔTS DIRECTS LOCAUX (ART - L - 135 B DU LIVRE DES PROCÉDURES FISCALES) - PORTÉE - RÔLES GÉNÉRAUX - À L'EXCLUSION DES RÔLES SUPPLÉMENTAIRES.

135-01-07-01 Il résulte des termes du troisième alinéa de l'article L. 135 B du livre des procédures fiscales, sans qu'il soit besoin de les interpréter à la lumière des travaux préparatoires de la loi de finances rectificative pour 1992 dont ils sont issus, que l'obligation de transmission aux collectivités territoriales et à leurs groupements des rôles des impôts directs locaux que ce texte impose à l'administration fiscale, par dérogation à l'obligation de secret professionnel prévue par l'article L. 103 du livre des procédures fiscales, porte sur les seuls rôles généraux, c'est-à-dire ceux qui concernent la généralité des contribuables. Tel n'est pas le cas des rôles supplémentaires, lesquels sont notamment relatifs aux contribuables ayant fait l'objet d'un redressement.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES - QUESTIONS COMMUNES - OBLIGATION DE TRANSMISSION AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DES RÔLES DES IMPÔTS DIRECTS LOCAUX PAR L'ADMINISTRATION FISCALE (ART - L - 135 B DU LIVRE DES PROCÉDURES FISCALES) - PORTÉE - RÔLES GÉNÉRAUX - À L'EXCLUSION DES RÔLES SUPPLÉMENTAIRES.

19-03-01 Il résulte des termes du troisième alinéa de l'article L. 135 B du livre des procédures fiscales, sans qu'il soit besoin de les interpréter à la lumière des travaux préparatoires de la loi de finances rectificative pour 1992 dont ils sont issus, que l'obligation de transmission aux collectivités territoriales et à leurs groupements des rôles des impôts directs locaux que ce texte impose à l'administration fiscale, par dérogation à l'obligation de secret professionnel prévue par l'article L. 103 du livre des procédures fiscales, porte sur les seuls rôles généraux, c'est-à-dire ceux qui concernent la généralité des contribuables. Tel n'est pas le cas des rôles supplémentaires, lesquels sont notamment relatifs aux contribuables ayant fait l'objet d'un redressement.


Publications
Proposition de citation : CE, 02 nov. 2005, n° 272819
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Henri Savoie
Rapporteur public ?: Mme Mitjavile
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:272819.20051102
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