Vu 1°), sous le n° 263678, la requête, enregistrée le 19 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 novembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 2 septembre 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Arnold Y... et lui a enjoint de délivrer à M. Y... un titre de séjour vie privée et familiale ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu 2°), sous le n° 263679, la requête, enregistrée le 19 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :
1) d'annuler le jugement du 14 novembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 2 septembre 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Nancy Y... et lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un titre de séjour vie privée et familiale ;
2) de rejeter la demande présentée par Mme Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Anne-Marie Leroy, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Anne-Françoise Roul, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les deux requêtes du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE posent des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
En ce qui concerne la situation de Mme Y... :
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance de 1945 : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit... 3°) à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans, si au cours de cette période il a séjourné en qualité d'étudiant ;
Considérant que Mme Y... soutient être entrée en France en 1992 et y avoir depuis cette date résidé habituellement soit depuis plus de dix ans ; que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ne conteste réellement la présence en France de Mme Y... que pour les années 1992 à 1994 ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier, d'une part, que pendant ces années Mme Y... a reçu, en provenance des Philippines, plusieurs correspondances adressées à la même adresse à Paris et comportant des tampons postaux faisant foi et, d'autre part, que plusieurs documents, attestations, certificats médicaux et justificatifs certifient la présence et la résidence habituelle de Mme Y... en France depuis 1992 ; qu'il en résulte que l'intéressée justifiait le 2 septembre 2003, date de l'arrêté du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ordonnant sa reconduite à la frontière, d'une résidence habituelle en France depuis plus de dix ans et que c'est dès lors à bon droit que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a, en application des dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, annulé l'arrêté ordonnant la reconduite prononcée à l'encontre de Mme Y... ;
En ce qui concerne la situation de M. Y... :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y... s'est marié en France avec Mme X... Y le 10 avril 2000 et que les époux sont parents d'un enfant né le 9 juin 2001 ; que, dans ces conditions, eu égard à ce qui est dit ci-dessus concernant la situation de Mme Y..., la reconduite à la frontière de M. Y... porterait une atteinte disproportionnée à son droit à une vie familiale normale ; que c'est dès lors à bon droit que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté de reconduite à la frontière du 2 septembre 2003 concernant M. Y... ;
Sur les conclusions à fins d'injonction :
Considérant qu'à la suite de l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions du III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour, mais aussi, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée, au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ces réexamens ;
Considérant que, par les deux jugements attaqués, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris ne s'est pas limité à enjoindre au préfet de réexaminer la situation de M. et Mme Y..., mais lui a enjoint de leur délivrer un titre de séjour vie privée et familiale normale ; qu'il convient dans ces conditions de prononcer l'annulation de l'article 2 de ces deux jugements ;
Considérant toutefois que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a délivré en exécution des jugements attaqués à M. et Mme Y... deux titres de séjour valables du 9 mars 2004 au 8 mars 2005 ; que, par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fins d'injonction de M. et Mme Y... ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les articles 2 des deux jugements attaqués du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris du 14 novembre 2003 sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est rejeté.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fins d'injonction présentées par M. et Mme Y....
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE, à M. et Mme Y... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.