Vu la requête, enregistrée le 5 mai 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Hugues X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le blâme du ministre qui lui a été infligé le 18 mars 2003 par le directeur général de la gendarmerie nationale ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 modifiée ;
Vu le décret n° 75-675 du 28 juillet 1975 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alain Christnacht, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Denis Piveteau, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'aux termes de l'article 33 du décret du 28 juillet 1975 portant règlement de discipline générale dans les armées : (...) En matière de punitions disciplinaires, les garanties sont les suivantes : 1. Le droit de s'expliquer : avant que la punition ne soit infligée, le militaire a le droit de s'expliquer sur les faits qui lui sont reprochés, oralement devant l'autorité militaire de premier niveau dont il relève, par écrit lorsque la punition est infligée par une autorité militaire supérieure. Au préalable, un délai de réflexion est laissé à l'intéressé pour organiser sa défense. Ce délai ne peut être inférieur à 24 heures. L'explication écrite de l'intéressé ou la renonciation écrite à l'exercice du droit de s'expliquer est jointe au dossier transmis à l'autorité militaire supérieure. (...) ;
Considérant que M. X, officier, a été puni d'un blâme du ministre par une décision du ministre de la défense en date du 18 mars 2003 ; que, s'il ressort des pièces du dossier que l'autorité militaire de premier niveau l'a avisé, le 26 février 2003, de son droit de présenter une explication écrite dans le cadre de la procédure disciplinaire engagée contre lui, il n'est pas contesté qu'aucune explication écrite de M. X, non plus qu'aucune renonciation écrite de celui-ci à l'exercice du droit de s'expliquer, n'a été jointe au dossier transmis à l'autorité militaire supérieure ; que le ministre de la défense n'allègue pas que le requérant aurait été mis en demeure d'adresser l'une ou l'autre avant la transmission du dossier par l'autorité de premier niveau ; que les observations écrites sur les faits susceptibles de lui être reprochés que M. X a adressées, de sa propre initiative et avant l'engagement de la procédure disciplinaire, au directeur des écoles de la gendarmerie ne peuvent être regardées comme l'explication écrite dont le droit est garanti par les dispositions de l'article 33 du décret du 28 juillet 1975 précité ; que, par suite, la décision par laquelle le ministre de la défense a infligé à M. X un blâme du ministre a été prise en méconnaissance de ces dispositions ; que, dès lors, M. X est fondé à soutenir que cette punition, infligée au terme d'une procédure irrégulière et de surcroît illégale à raison de la mention dans le bulletin de punition d'une précédente sanction pour des faits amnistiés, est entachée d'illégalité et doit être annulée ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 150 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La décision du ministre de la défense du 18 mars 2003 infligeant un blâme du ministre à M. X est annulée.
Article 2 : L'Etat versera à M. X une somme de 150 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Hugues X et au ministre de la défense.