Vu la requête, enregistrée le 17 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme A, demeurant ... ; Mme A demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 9 décembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 août 2003 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. X... Donnat, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'à l'appui de sa demande présentée devant le tribunal administratif de Paris, Mme A a soutenu que l'arrêté du préfet de police du 12 août 2003 ordonnant sa reconduite à la frontière portait atteinte à son droit au respect de sa vie familiale ; qu'il ressort du jugement attaqué du 9 décembre 2003 que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a omis de répondre à ce moyen ; que Mme A est, dès lors, fondée à demander l'annulation de ce jugement ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Paris ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la demande :
Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale prévue au premier alinéa du même article est délivrée de plein droit : (...) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans (...) ;
Considérant qu'il ressort de façon suffisamment probante des pièces du dossier que Mme A vit habituellement en France depuis le mois de mai 1993, soit depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué ; que, par suite, le préfet de police ne pouvait légalement prendre à son encontre l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué sans méconnaître les dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée précité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à demander l'annulation de l'arrêté en date du 12 août 2003 par lequel le préfet de police a ordonné sa reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes du III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas ; qu'il y a lieu, par application de ces dispositions, d'ordonner au préfet de police de délivrer, dans un délai d'un mois, une autorisation provisoire de séjour à Mme A et de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 9 décembre 2003 du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police en date du 12 août 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme A sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer, dans un délai d'un mois, une autorisation provisoire de séjour à Mme A et de se prononcer sur un droit à un titre de séjour.
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Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme A, au préfet de police et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.