Vu la requête, enregistrée le 6 mars 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ISERE ; le PREFET DE L'ISERE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 13 février 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 21 janvier 2003 décidant la reconduite à la frontière de Mme Aïcha X et l'arrêté du même jour fixant l'Algérie comme pays de destination ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif de Grenoble ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Landais, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Devys, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Le représentant de l'Etat dans le département et à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme XY, de nationalité algérienne, s'est maintenue dans de telles conditions sur le territoire français ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié par le troisième avenant à cet accord signé le 11 juillet 2001 : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. (...) et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, où à la protection des droits et libertés d'autrui ;
Considérant que Mme X, veuve depuis huit années, est entrée en France, en mai 2000 d'abord, puis le 19 janvier 2002 pour y rejoindre sa fille, Mme , son gendre et leurs deux enfants et s'installer chez eux afin d'y reconstituer une vie familiale ; qu'il ressort des pièces du dossier que les intéressés peuvent, en dépit de la modestie de leurs ressources, l'héberger et subvenir à ses besoins, contrairement à ses enfants vivant en Algérie ; que, dans les circonstances particulières de l'espèce, et alors même que Mme X conserve des attaches familiales en Algérie, l'arrêté contesté a porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le PREFET DE L'ISERE n'est pas fondé à se plaindre de ce que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 21 janvier 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête du PREFET DE L'ISERE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'ISERE, à Mme Aïcha X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.