Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 juin 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 18 juin 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Aomar X et la décision du même jour fixant le pays à destination duquel ce dernier doit être reconduit ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le décret n° 50-722 du 24 juin 1950 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. J. Boucher, Auditeur,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 20 février 1998, de la décision du 18 février par laquelle le PREFET DU VAL-D'OISE a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a invité à quitter le territoire ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sur la légalité de l'arrêté du 18 juin 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X :
Considérant que, pour annuler l'arrêté du 18 juin 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur un moyen tiré de la méconnaissance, par cet arrêté, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois, un tel moyen était inopérant à l'appui des conclusions de M. X dirigées contre la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre ; que, par suite, le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur ce moyen pour annuler l'arrêté du 18 juin 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X, qui ne comporte aucune décision distincte fixant le pays à destination duquel ce dernier doit être reconduit ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif de Versailles à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 juin 1999 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 24 juin 1950 modifié relatif à la délégation des pouvoirs propres aux préfets, sous-préfets et secrétaires généraux de préfecture : En cas de vacance momentanée d'une préfecture, d'absence ou d'empêchement d'un préfet, sans que ce dernier ait délégué l'exercice de ses fonctions dans les conditions prévues à l'article précédent, le secrétaire général de la préfecture assure l'administration du département ; qu'en vertu de cette disposition, le secrétaire général exerce de plein droit, dans les cas de vacance, d'absence ou d'empêchement qu'elle vise, l'ensemble des pouvoirs dévolus au préfet ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par un décret du 6 mai 1999 publié au Journal officiel de la République française du 7 mai, M. Jean-Pierre Lacroix, préfet du Val-d'Oise, a été nommé préfet de Corse, préfet de la Corse-du-Sud ; que, par un décret du 24 juin 1999 publié au Journal officiel du 27 juin, M. Michel Mathieu, préfet hors cadre, a été nommé préfet du Val-d'Oise ; qu'il n'est pas contesté qu'à la date du 19 juin 1999, la préfecture du Val-d'Oise était effectivement vacante ; que, dès lors, M. X n'est pas fondé à soutenir que M. Hugues Bousiges, secrétaire général de la préfecture du Val-d'Oise, n'aurait pas été compétent, à cette date et en vertu des dispositions de l'article 2 précité du décret du 24 juin 1950, pour signer l'arrêté litigieux ;
Considérant que l'arrêté litigieux, qui indique que M. X a fait l'objet d'un refus de renouvellement de titre de séjour et s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification de ce refus, est suffisamment motivé ;
Considérant que si M. X, âgé de vingt-sept ans à la date de l'arrêté litigieux, célibataire et sans enfant, fait valoir qu'il résidait en France, à cette date, depuis presque sept ans, que ses parents sont décédés et que plusieurs membres de sa famille résident en France, il n'allègue pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où vivent notamment deux de ses frères ; que, dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté litigieux du 18 juin 1999 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ;
Considérant que si M. X soutient que son état de santé nécessite un suivi médical, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté litigieux soit entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé, dès lors notamment qu'il n'est soutenu ni que ce dernier ne serait pas en état de supporter un voyage, ni que le suivi de la pathologie dont il est affecté ne pourrait être assuré dans son pays d'origine ;
Sur la légalité de la décision du 18 juin 1999 fixant le pays à destination duquel M. X doit être reconduit :
Considérant que si M. X fait valoir son appartenance à la communauté kabyle, ses activités associatives en faveur de cette communauté et les menaces dont ses frères auraient été l'objet à l'occasion d'activités similaires, les éléments qu'il apporte au soutien de ses allégations ne suffisent pas à établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles s'est fondé, pour annuler la décision litigieuse, sur la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, en l'absence de tout autre moyen soulevé par M. X au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit, que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé cette décision ainsi que l'arrêté du 18 juin 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de l'intéressé ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles en date du 22 juin 1999 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-D'OISE, à M. Aomar X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.