Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 23 avril 2002, présentée par Mme Arife A épouse B, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'ordonner à l'administration de produire l'entier dossier administratif la concernant ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 29 octobre 2001 rapportant le décret du 30 juin 1999 lui accordant la nationalité française ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 820 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme de Margerie, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 21-16 du code civil : Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation ; qu'aux termes de l'article 27-2 du même code : Les décrets portant acquisition, naturalisation ou réintégration peuvent être rapportés sur avis conforme du Conseil d'Etat dans le délai d'un an à compter de leur publication au Journal Officiel si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales ; si la décision a été obtenue par mensonge ou par fraude, ces décrets peuvent être rapportés dans le délai de deux ans à partir de la découverte de la fraude ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, dans la déclaration sur l'honneur qu'elle a remplie le 16 mai 1999 en vue d'obtenir sa naturalisation, Mme A a confirmé qu'elle était célibataire, ainsi qu'elle l'avait déclaré lors du dépôt de sa demande de naturalisation en 1996, alors qu'elle avait épousé le 5 août 1997 un ressortissant turc vivant en Turquie ; qu'ainsi, elle n'avait pas fixé en France le centre de ses intérêts et ne satisfaisait pas à la condition de résidence prévue par les dispositions de l'article 21-16 du code civil ; que, par suite, le décret du 30 juin 1999 prononçant sa naturalisation doit être regardé comme ayant été obtenu par fraude ;
Considérant que le délai de deux ans imparti au gouvernement pour prononcer le retrait de la naturalisation de Mme A a commencé à courir à la date à laquelle l'existence du mariage de l'intéressée a été portée à la connaissance du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, autorité compétente pour proposer la naturalisation, par le ministre des affaires étrangères, soit le 16 mai 2000 ; qu'ainsi, le décret du 29 octobre 2001 a été pris dans le délai prévu à l'article 27-2 du code civil ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'instruction demandée, que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation du décret attaqué ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à Mme A la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Arife A épouse B et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.