Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Benjamin X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 20 juin 2003 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer sous astreinte de 500 euros par jour de retard une autorisation provisoire de séjour de trois mois ;
2°) de régler l'affaire au fond et d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer Xune autorisation de séjour provisoire de trois mois en application de l'article 11 de la loi du 25 juillet 1952 modifiée ;
3°) de condamner l'Etat au versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1962 modifiée ;
Vu le décret n° 98-503 du 23 juin 1998 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bardou, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. Benjamin X,
- les conclusions de M. Glaser, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X demande l'annulation de l'ordonnance du 20 juin 2003 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a, sur le fondement de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de l'examen de sa demande d'asile politique ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public (...) aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale ; qu'aux termes de l'article L. 522-3 : Lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux premiers alinéas de l'article L. 522-1 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile : L'examen de la demande d'admission au titre de l'asile présentée à l'intérieur du territoire français relève du représentant de l'Etat dans le département (...) l'admission en France d'un demandeur d'asile ne peut être refusée que si (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. Constitue, en particulier, un recours abusif aux procédures d'asile la présentation frauduleuse de plusieurs demandes d'admission au séjour au titre de l'asile sous des identités différentes ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées qu'un étranger qui demande le bénéfice de l'asile conventionnel doit être admis à séjourner sur le territoire national sauf dans certains cas limitativement énumérés et notamment celui de fraude délibérée mentionné dans les dispositions précitées ; que le refus d'admission provisoire au séjour porte par lui-même une atteinte suffisamment grave et immédiate à la situation du demandeur d'asile pour que la condition d'urgence soit, sauf circonstances particulières, satisfaite ; que le ministre de l'intérieur n'invoquait devant le juge des référés aucune circonstance particulière propre à la situation de M. X ; que, dès lors, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a commis une erreur de droit en estimant qu'eu égard à l'existence d'une procédure de recours à caractère suspensif à l'encontre de la décision de reconduite à la frontière dont l'intéressé pourrait éventuellement faire l'objet, l'urgence ne justifiait pas que soit ordonnée la mesure sollicitée par M. X ; que son ordonnance doit, par suite, être annulée ;
Considérant qu'il y a lieu par application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par M. X devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
Considérant que pour refuser l'admission sur le territoire national de M. X le préfet du Bas-Rhin s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé avait présenté à l'appui de sa demande de faux papiers d'identité et qu'ainsi sa demande reposait sur une fraude délibérée ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'en refusant pour ce motif à M. X le bénéfice de l'admission le préfet ait porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ; que par suite la demande de M. X doit être rejetée ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à M. X la somme de 1 500 euros qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 20 juin 2003 du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg et le surplus de ses conclusions devant le Conseil d'Etat sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Benjamin X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.