La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/10/2003 | FRANCE | N°220280

France | France, Conseil d'État, 9eme et 10eme sous-sections reunies, 03 octobre 2003, 220280


Vu la requête, enregistrée le 25 avril 2000, présentée pour la SOCIETE TEZIER, dont le siège est ... ; la société demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 16 février 2000, par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, sur le recours du ministre de l'économie et des finances, annulé le jugement du 6 mars 1986 par lequel le tribunal administratif de Grenoble lui avait accordé la décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1991 à 1994 dans les rôles de la commune de Portes-les-Valence et a remis intégralement à sa char

ge cette imposition ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code...

Vu la requête, enregistrée le 25 avril 2000, présentée pour la SOCIETE TEZIER, dont le siège est ... ; la société demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 16 février 2000, par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, sur le recours du ministre de l'économie et des finances, annulé le jugement du 6 mars 1986 par lequel le tribunal administratif de Grenoble lui avait accordé la décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1991 à 1994 dans les rôles de la commune de Portes-les-Valence et a remis intégralement à sa charge cette imposition ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Guilhemsans, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de la SOCIETE TEZIER,

- les conclusions de M. Vallée, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu de l'article 1447 du code général des impôts : La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée ; qu'aux termes de l'article 1448 de ce code : La taxe professionnelle est établie selon la capacité contributive des redevables, appréciée d'après des critères économiques en fonction de l'importance des activités exercées par eux sur le territoire de la collectivité bénéficiaire ou dans la zone de compétence de l'organisme concerné ; que l'article 1450 exonère les exploitants agricoles de la taxe professionnelle ; qu'en vertu des dispositions des articles 1467 et 1467 A, la taxe professionnelle due par les contribuables autres que les titulaires de bénéfices non commerciaux a pour base, d'une part, la valeur locative des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle, d'autre part, les salaires versés pendant la période de référence, laquelle est l'avant-dernière année précédant celle de l'imposition ou, pour les immobilisations et les recettes imposables, le dernier exercice de douze mois clos au cours de cette même année, lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l'année civile ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE TEZIER, qui avait une activité de producteur-grainier, exerçait également au cours des années 1991 à 1994, à titre accessoire, une activité d'achat, de stockage et de revente de semences potagères et florales ; qu'elle a été imposée à la taxe professionnelle à raison des immobilisations utilisées et des salaires versés au titre de l'ensemble de ses activités ; que le jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble l'a déchargée de la totalité de cette imposition, en omettant toutefois d'examiner l'un des moyens de l'administration, a été annulé par la cour administrative d'appel de Lyon ; que la cour, après avoir jugé que la société ne pouvait bénéficier, à raison de son activité d'achat-revente de semences potagères et florales, de l'exonération prévue à l'article 1450 du code général des impôts, tandis que son activité de producteur-grainier était une activité agricole, au titre de laquelle elle pouvait bénéficier de cette exonération, a jugé que la taxe professionnelle à laquelle elle avait été assujettie devait être calculée compte tenu de la totalité des salaires et des immobilisations affectés à ces deux activités, dans la mesure où la société n'avait apporté aucun élément permettant de déterminer dans quelles proportions les éléments d'imposition étaient affectés à chacune de ces activités ;

Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par une lettre du 13 janvier 1993, la SOCIETE TEZIER avait fourni à la direction des services fiscaux de la Drôme, la ventilation entre activités exonérées et activités assujetties à la taxe professionnelle de ses immobilisations ainsi que de son personnel, au cours des exercices pris en compte pour le calcul de la taxe professionnelle des années 1989, 1990 et 1991 ; qu'elle a par ailleurs indiqué que, depuis ce dernier exercice, au titre duquel elle a affecté à son activité d'achat-revente 13 % de ses immobilisations et 12 % de son personnel, le volume de son activité non agricole est resté stable de même que l'importance respective de l'utilisation de ses immobilisations et de l'emploi de son personnel au titre de ses deux activités ; que, dès lors, en jugeant que la société ne fournissait aucun élément permettant de déterminer, pour le calcul de la taxe professionnelle des années 1991 à 1994, dans quelles proportions les éléments d'imposition étaient affectés à chacune de ses activités, la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis ; que l'arrêt attaqué doit, par suite, être annulé, en tant qu'il statue sur les demandes de la SOCIETE TEZIER devant le tribunal administratif de Grenoble ;

Considérant qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de juger l'affaire au fond ;

Considérant que, si l'activité de producteur-grainier de la SOCIETE TEZIER constitue une activité agricole, exonérée de taxe professionnelle en application de l'article 1450, précité, du code général des impôts, les opérations que cette société effectue dans le cadre de son activité accessoire d'achat-revente de semences florales et potagères, et qui n'ont pour objet que le tri et le stockage des semences dans de bonnes conditions, ne peuvent être regardées comme revêtant le caractère d'une activité agricole entrant dans le champ d'application de cet article ;

Considérant que, dans l'hypothèse où une entreprise exerce à la fois des activités taxables et non taxables à la taxe professionnelle, elle n'est redevable de cette taxe qu'à raison des bases d'imposition relatives à ses activités professionnelles taxables ; que, si ces différentes activités sont effectuées par le même personnel et utilisent les mêmes immobilisations, il y a lieu de prendre en compte, pour le calcul de la taxe professionnelle, les salaires versés au prorata du temps passé par le personnel à des activités taxables et la valeur locative des immobilisations au prorata de leur temps d'utilisation pour ces mêmes activités ; que l'administration ne fait état d'aucun élément permettant de mettre en doute les déclarations susmentionnées de la société, s'agissant des immobilisations utilisées et des salaires versés pour les besoins de son activité professionnelle taxable ; que, dès lors, les éléments à prendre en compte pour le calcul de la taxe professionnelle due par la société au titre des années 1991 à 1994, doivent être fixés à 13 % de la valeur locative des immobilisations et 12 % de la base salariale déclarée par la société au titre des périodes de référence ; que la SOCIETE TEZIER est fondée à demander la décharge de la différence entre la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie et les montants ainsi calculés ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 2 de l'arrêt du 16 février 2000 de la cour administrative de Lyon est annulé.

Article 2 : Les bases d'imposition de la SOCIETE TEZIER à la taxe professionnelle au titre des années 1991 à 1994 sont réduites à 13 % de la valeur locative totale des immobilisations et 12 % de la masse salariale prises en compte pour le calcul de cette taxe.

Article 3 : La SOCIETE TEZIER est déchargée de la différence entre le montant de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1991 à 1994 et le montant de la taxe professionnelle résultant de l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la SOCIETE TEZIER devant le tribunal administratif de Grenoble et le Conseil d'Etat et des conclusions du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie devant la cour administrative d'appel de Lyon est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE TEZIER et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 9eme et 10eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 220280
Date de la décision : 03/10/2003
Sens de l'arrêt : Réduction de l'imposition
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-04-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE - ASSIETTE - ENTREPRISE EXERÇANT À LA FOIS DES ACTIVITÉS TAXABLES ET NON TAXABLES - CAS DANS LEQUEL CES ACTIVITÉS SONT EFFECTUÉES PAR LE MÊME PERSONNEL ET UTILISENT LES MÊMES IMMOBILISATIONS - MODALITÉS DE VENTILATION DES SALAIRES ET DE LA VALEUR LOCATIVE [RJ1].

19-03-04-04 Dans l'hypothèse où une entreprise exerce à la fois des activités taxables et non taxables à la taxe professionnelle, elle n'est redevable de cette taxe qu'à raison des bases d'imposition relatives à ses activités professionnelles taxables. Si ces différentes activités sont effectuées par le même personnel et utilisent les mêmes immobilisations, il y a lieu de prendre en compte, pour le calcul de la taxe professionnelle, les salaires versés au prorata du temps passé par le personnel à des activités taxables et la valeur locative des immobilisations au prorata de leur temps d'utilisation pour ces mêmes activités.


Références :

[RJ1]

Rappr. 1er juin 2001, Centre national des caisses d'épargne et de prévoyance, T. p. 918.


Publications
Proposition de citation : CE, 03 oct. 2003, n° 220280
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Lasserre
Rapporteur ?: Mme Marie-Françoise Guilhemsans
Rapporteur public ?: M. Vallée
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:220280.20031003
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award