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30/07/2003 | FRANCE | N°248532

France | France, Conseil d'État, 3eme sous-section jugeant seule, 30 juillet 2003, 248532


Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 3 mai 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 26 novembre 2001 décidant la reconduite à la frontière de Mme Mahoua X ;

2°) de rejeter la demande de Mme X devant le tribunal administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des dr

oits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre ...

Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 3 mai 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 26 novembre 2001 décidant la reconduite à la frontière de Mme Mahoua X ;

2°) de rejeter la demande de Mme X devant le tribunal administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Crépey, Auditeur,

- les observations de la SCP Laugier, Caston, avocat de Mme Mahoua X,

- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait... ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Mahoua X , de nationalité ivoirienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 17 décembre 2000, de la décision du même jour par laquelle le PREFET DE POLICE a rejeté la demande de titre de séjour qu'elle avait présentée et l'a invitée à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas visé au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance susvisée, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 1998 : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ;

Considérant qu'aux termes de l'article 7-5 introduit dans le décret du 30 juin 1946 par le décret du 5 mai 1999 : Pour l'application du 11° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée, le préfet délivre la carte de séjour temporaire, au vu de l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé. A Paris, l'avis est émis par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Cet avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'intégration, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur (...) ; que l'arrêté du 8 juillet 1999 pris pour l'application de ces dispositions impose au médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales d'émettre un avis précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans son pays ; qu'il appartient ainsi au médecin inspecteur, tout en respectant le secret médical, de donner au préfet les éléments relatifs à la gravité de la pathologie présentée par l'étranger intéressé et à la nature des traitements qu'il doit suivre nécessaires pour éclairer sa décision ; qu'en se fondant sur un avis rendu par le médecin chef du service médical de la préfecture de police qui se limitait à la seule mention manuscrite séjour non justifié, la décision en date du 17 décembre 2000 par laquelle le PREFET DE POLICE a refusé à Mme Mahoua X le titre de séjour qu'elle demandait en application du 11° de l'article 12 bis précité a été pris suivant une procédure irrégulière ; qu'au surplus il ressort des pièces du dossier que, par un certificat en date du 2 mars 2000, le professeur Jacques Milliez, chef du service de gynécologie obstétrique de l'hôpital Saint-Antoine certifie que Mme Mahoua X présente une pathologie nécessitant la poursuite d'un traitement entrepris plusieurs mois auparavant et ne pouvant être assuré dans son pays d'origine ; que, par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour, l'arrêté de reconduite litigieux est illégal ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 26 décembre 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; que Mme X demande qu'il soit enjoint à l'administration de lui délivrer un titre de séjour ; que si la présente décision rend impossible l'exécution de la mesure de reconduite prise à son encontre, elle n'implique pas par elle-même la délivrance d'un tel titre ; que, par suite, les conclusions de Mme X tendant à ce qu'il soit enjoint au PREFET DE POLICE de lui délivrer une carte de séjour ne peuvent être accueillies ; qu'en revanche il y a lieu, en application de l'article L. 911-2 du même code, de prescrire au PREFET DE POLICE de se prononcer sur sa situation, au regard des règles rappelées par la présente décision, dans le délai d'un mois suivant la notification de cette décision ;

Sur les conclusions de Mme X tendant à l'application combinées des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que Mme X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Laugier, Caston, avocat de Mme X , renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de condamner l'Etat à payer à la SCP Laugier, Caston la somme de 2 000 euros ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint au PREFET DE POLICE de réexaminer dans le délai d'un mois la situation de Mme X au regard des règles rappelées par la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à la SCP Laugier, Caston, avocat de Mme X une somme de 2 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ladite société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de Mme X est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mme Mahoua X à la SCP Laugier, Caston et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 3eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 248532
Date de la décision : 30/07/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 2003, n° 248532
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin Laprade
Rapporteur ?: M. Edouard Crépey
Rapporteur public ?: M. Séners
Avocat(s) : SCP LAUGIER, CASTON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:248532.20030730
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