Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 février et 20 juin 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Alain X..., ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 20 décembre 2000 par laquelle la section des assurances sociales du Conseil national de l'Ordre des médecins, réformant la décision du 23 février 1994 de la section des assurances sociales du conseil régional de l'Ordre des médecins de Rhône-Alpes, a prononcé à son encontre la sanction de l'interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant quatre mois, assortie du sursis pour une durée d'un mois ;
2°) de condamner la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon au versement de la somme de 20 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Dumortier, Auditeur ;
- les observations de la SCP Gatineau, avocat de M. X... et de la SCP Vier, Barthélemy, avocat du Conseil national de l'Ordre des médecins,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par décision en date du 20 décembre 2000, la section des assurances sociales du Conseil national de l'Ordre des médecins a infligé à M. X..., masseur-kinésithérapeute exerçant à Lyon, la sanction de l'interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de quatre mois, dont un mois avec sursis ;
Sur la compétence de la section des assurances sociales du Conseil national de l'Ordre des médecins :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 4321-13 du code de la santé publique, dans sa rédaction alors en vigueur issue de la loi du 4 février 1995 portant diverses dispositions d'ordre social : "Il est institué un ordre national des masseurs-kinésithérapeutes groupant obligatoirement tous les masseurs-kinésithérapeutes habilités à exercer leur profession en France, à l'exception des masseurs-kinésithérapeutes relevant du service de santé des armées." ; qu'aux termes de l'article L. 4321-14 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur issue de la même loi : "L'Ordre des masseurs-kinésithérapeutes veille au maintien des principes de moralité indispensables à l'exercice de la masso-kinésithérapie et à l'observation, par tous ses membres, des droits, devoirs et obligations professionnels, ainsi que des règles édictées par le code de déontologie prévu à l'article L. 4321-22" ; qu'aux termes de l'article L. 145-4 du code de la sécurité sociale, relatif au contentieux du contrôle technique, dans sa rédaction issue de la même loi : "Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles les dispositions du présent chapitre sont étendues et adaptées aux difficultés nées de l'exécution du contrôle des services techniques en ce qui concerne les pharmaciens et les auxiliaires médicaux. / Il édicte également les mesures nécessaires à l'application des dispositions du présent chapitre et fixe notamment les règles de la procédure." ; qu'aux termes de l'article R. 145-8 du même code pris pour l'application de cet article L. 145-4 : "Les dispositions sur le contentieux du contrôle technique des médecins, prévues aux articles L. 145-1 à L. 145-3, L. 145-6 à L. 145-8, R. 145-15 à R. 145-27, sont applicables en cas de fautes, abus, fraudes et tous faits intéressant l'exercice de la profession, relevés à l'encontre des auxiliaires médicaux à l'occasion de soins dispensés aux assurés sociaux. / Dans les affaires concernant les auxiliaires médicaux, l'un des assesseurs médecins de la section des assurances sociales du conseil régional de discipline de l'Ordre des médecins est remplacé par un auxiliaire médical de la même catégorie que la personne concernée proposé par les syndicats les plus représentatifs de cette catégorie dans la région et nommé par le préfet de région. / A la section des assurances sociales du Conseil national de l'Ordre des médecins, l'un des assesseurs médecins est remplacé par un auxiliaire médical de la même catégorie proposé par les groupements syndicaux d'auxiliaires médicaux les plus représentatifs de cette catégorie sur le plan national et nommé par le ministre chargé de la sécurité sociale" ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que si la loi du 4 février 1995 a institué un ordre national des masseurs-kinésithérapeutes compétent en matière de discipline professionnelle, elle a maintenu, en ce qui concerne le contentieux du contrôle technique des masseurs-kinésithérapeutes, la compétence des sections des assurances sociales du conseil régional de l'Ordre des médecins et, en appel, de la section des assurances sociales du Conseil national de l'Ordre des médecins ; qu'ainsi cette dernière était compétente pour connaître de l'appel dirigé par M. X..., masseur-kinésithérapeute, à l'encontre de la décision de la section des assurances sociales du conseil régional de l'Ordre des médecins de Rhône-Alpes en date du 23 février 1994 ;
Sur les autres moyens de la requête :
Considérant que les membres des sections des assurances sociales bénéficient de garanties leur permettant, alors même qu'un organisme de sécurité sociale ou les médecins conseils ont la faculté de saisir la section des assurances sociales des conseils régionaux, de porter, en toute indépendance et dans le cadre des règles générales de procédure, une appréciation personnelle sur le comportement professionnel des médecins ou auxiliaires médicaux poursuivis devant ces juridictions ; que le requérant n'est dès lors pas fondé à soutenir que la section des assurances sociales du Conseil national ne satisferait pas à l'exigence d'indépendance et d'impartialité des juridictions rappelée par l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ces stipulations ne font pas obstacle à ce que participe au délibéré celui des membres composant la section des assurances sociales, désigné comme rapporteur, dont les attributions ne diffèrent pas de celles que la formation collégiale de jugement pourrait elle-même exercer et qui ne peut décider par lui-même de modifier le champ de la saisine de la juridiction ; qu'elles n'exigent pas non plus que le texte de l'exposé de l'affaire par le rapporteur lors de l'audience soit préalablement communiqué aux parties ;
Considérant qu'en estimant, que M. X... avait, à plusieurs reprises, facturé des actes non exécutés, facturé des dépassements d'honoraires sans en apporter la justification, perçu les honoraires avant l'exécution des soins, attesté avoir dispensé des actes qui avaient en réalité été exécutés par son épouse, ou n'avait pas respecté les prescriptions médicales, la section des assurances sociales du Conseil national de l'Ordre des médecins n'a pas dénaturé les pièces du dossier ; qu'en estimant que ces faits, précisément décrits, étaient dès lors exclus de l'amnistie prévue par la loi du 3 août 1995, elle a suffisamment motivé sa décision et n'a pas fait une inexacte application de cette loi ; qu'elle n'a pas non plus commis d'erreur de droit en estimant que l'amnistie des sanctions pénales résultant de cette loi n'emportait pas nécessairement amnistie des faits soumis au juge disciplinaire ;
Considérant enfin qu'il n'appartient pas au juge de cassation de contrôler la proportionnalité de la sanction aux manquements retenus ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la caisse primaire d'assurances maladie de Lyon, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Alain X..., au Conseil national de l'Ordre des médecins, à la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon, au médecin conseil chef de service de l'échelon local de Lyon et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.