Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA REGION RHONE-ALPES, PREFET DU RHONE ; le PREFET DE LA REGION RHONE-ALPES, PREFET DU RHONE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 août 2000, par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 31 juillet 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Leila X... et la décision du même jour fixant le pays de renvoi ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Lyon ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1888 modifié par l'avenant du 19 décembre 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. El Nouchi, Maître des Requêtes ;
- les conclusions de M. Collin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X..., ressortissante tunisienne et croate, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification de l'arrêté du 30 mars 1999 par lequel le PREFET DE LA REGION RHONE-ALPES, PREFET DU RHONE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application des dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que si Mlle X..., revenue en France au début de 1999, était retournée vivre en Tunisie avec son père, en 1985, à la suite de la séparation de ses parents, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'arrivée en France quelques semaines après sa naissance en 1973, elle y a vécu avec ses parents jusqu'à l'âge de 12 ans ; qu'elle n'a plus aucune attache familiale en Tunisie du fait du décès de son père en 1991 et de celui de ses grands-parents alors qu'elle a en France sa mère et son frère, tous deux de nationalité française ; que, dès lors, l'arrêté attaqué a porté au droit de Mlle X... au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et, a, par suite, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA REGION RHONE-ALPES, PREFET DU RHONE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 22 août 2000, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêt du 31 juillet 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X... et la décision du même jour fixant le pays à destination duquel elle doit être éloignée ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 repris par l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application des dispositions susvisées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à verser à Mlle X... la somme de 600 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du PREFET DE LA REGION RHONE-ALPES, PREFET DU RHONE est rejetée.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à Mlle X... la somme de 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA REGION RHONE-ALPES, PREFET DU RHONE, à Mlle Leila X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.