La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/07/2002 | FRANCE | N°243957

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 29 juillet 2002, 243957


Vu la requête, enregistrée le 11 mars 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Michèle X..., ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance en date du 15 février 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Dijon a ordonné la suspension de l'exécution de l'arrêté du préfet de l'Yonne en date du 7 septembre 2001 autorisant Mme X... à transférer son officine de pharmacie dans un local situé dans le parc commercial de la Petite Ile ;
2°) de régler la demande en référé ;
3°) de condamner M

me Frédérique Y... à lui verser la somme de 3 000 euros en application des dispos...

Vu la requête, enregistrée le 11 mars 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Michèle X..., ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance en date du 15 février 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Dijon a ordonné la suspension de l'exécution de l'arrêté du préfet de l'Yonne en date du 7 septembre 2001 autorisant Mme X... à transférer son officine de pharmacie dans un local situé dans le parc commercial de la Petite Ile ;
2°) de régler la demande en référé ;
3°) de condamner Mme Frédérique Y... à lui verser la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Courson, Maître des Requêtes ;
- les observations de Me Cossa, avocat de Mme X... et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de Mme Y...,
- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision ou de certains effets de celle-ci, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (.) " ;
Considérant que, pour suspendre, à la demande de Mme Y..., pharmacienne à Joigny, la décision du préfet de l'Yonne en date du 7 septembre 2001 autorisant le transfert de la pharmacie de Mme X... du centre ville de Joigny vers le centre commercial dénommé " la Petite Ile " situé dans la même ville sur la rive gauche de l'Yonne, le juge des référés du tribunal administratif de Dijon a relevé que " compte tenu de l'intention de Mme X... d'ouvrir sa nouvelle officine dans des délais proches, il y a urgence à ordonner la suspension de l'arrêté préfectoral, une telle suspension étant d'ailleurs sans incidence sur l'intérêt public " ;
Considérant que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; qu'il lui appartient également, l'urgence s'appréciant objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de chaque espèce, de faire apparaître dans sa décision tous les éléments qui, eu égard notamment à l'argumentation des parties, l'ont conduit à considérer que la suspension demandée revêtait un caractère d'urgence ;
Considérant qu'en se bornant à se référer à l'ouverture imminente de la pharmacie de Mme X... et à l'absence d'incidence sur l'intérêt public pour justifier la suspension de la mesure autorisant cette ouverture, sans répondre à l'argumentation en défense, non inopérante, selon laquelle cette ouverture n'était pas susceptible de porter atteinte de manière grave et immédiate à l'activité de la pharmacie de Mme Y... et selon laquelle la suspension placerait, au contraire, Mme X... dans une situation financière difficile, le juge des référés a entaché son ordonnance d'une insuffisance de motivation ; qu'elle doit, par suite, être annulée ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut " régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie " ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant que les circonstances invoquées par Mme Y..., qui se borne à invoquer l'imminence de l'ouverture de la pharmacie de Mme X... et le préjudice grave qui en résulterait pour elle, sans aucune indication chiffrée sur la situation actuelle de sa pharmacie, ainsi que l'absence d'intérêt public à autoriser ce transfert, ne sont pas susceptibles de caractériser une urgence de nature à justifier que l'exécution de l'arrêté du préfet de l'Yonne en date du 7 septembre 2001 autorisant Mme X... à transférer sa pharmacie du centre ville de Joigny vers le centre commercial " la Petite Ile " soit suspendue ; que, par suite, la demande de Mme Y... tendant à ce que cet arrêté soit suspendu ne peut être accueillie ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme X..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à Mme Y... la somme que demande celle-ci au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner Mme Y... à verser à Mme X... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Dijon en date du 15 février 2002 est annulée.
Article 2 : La demande de Mme Y... présentée devant le juge des référés du tribunal administratif de Dijon ainsi que ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Mme Y... versera à Mme X... une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Michèle X..., à Mme Frédérique Y... et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 243957
Date de la décision : 29/07/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

PROCEDURE - PROCEDURES INSTITUEES PAR LA LOI DU 30 JUIN 2000 - REFERE SUSPENSION (ARTICLE L - 521-1 DU CODE DE JUSTICE ADMINISTRATIVE) - CONDITIONS D'OCTROI DE LA SUSPENSION DEMANDEE - URGENCE.

PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - CONDITIONS D'EXERCICE DES PROFESSIONS - PHARMACIENS - AUTORISATION D'OUVERTURE OU DE TRANSFERT D'OFFICINE.


Références :

Arrêté du 07 septembre 2001
Code de justice administrative L521-1, L821-2, L761-1


Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 2002, n° 243957
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Courson
Rapporteur public ?: Mme Boissard

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:243957.20020729
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award