Vu la requête, enregistrée le 16 décembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAR ; le PREFET DU VAR demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 19 novembre 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du 8 novembre 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ahmed X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Nice ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. de la Ménardière, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : " Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 25 septembre 1999, de l'arrêté du 23 septembre 1999 par lequel le PREFET DU VAR lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que si, à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X... a fait valoir qu'il était marié, père d'une petite fille, que sa femme était enceinte, et que des membres de sa famille, dont certains de nationalité française, résidaient en France, il résulte des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée du séjour de M. X..., entré en France le 22 février 1999 et du caractère récent de son mariage, intervenu le 26 mars 1999, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, cet arrêté à la date à laquelle il a été pris par le préfet avant de mettre à exécution la mesure de reconduite à la frontière n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que les circonstances postérieures à cet arrêté dont fait état M. X..., si elles peuvent légalement faire obstacle à l'exécution de cette mesure, sont sans influence sur sa légalité ; que c'est, dès lors, à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice s'est fondé sur ce qu'il méconnaissait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par M. X... devant le tribunal administratif de Nice ;
Considérant que M. X... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant un titre de séjour aurait méconnu les stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 prévoyant la délivrance du certificat de résidence de 10 ans au conjoint algérien d'un ressortissant français, dès lors que l'intéressé n'était pas muni à son entrée en France d'un visa de long séjour comme l'exige l'article 9 du même accord ;
Considérant que si M. X... soutient que la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre l'empêchera de subvenir aux besoins de sa famille, il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DU VAR ait entaché son arrêté du 8 novembre 1999 d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAR est fondé à demander l'annulation du jugement du 19 novembre 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice a annulé son arrêté du 8 novembre 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer au requérant la somme qu'il demande au titre des frais engagés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 19 novembre 1999 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Nice par M. X... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAR, à M. Ahmed X... et au ministre de l'intérieur.