Vu la requête, enregistrée le 21 mars 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES YVELINES ; le PREFET DES YVELINES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 8 février 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 23 janvier 2001 décidant la reconduite à la frontière de Mme Y... Cissé et a condamné l'Etat à verser à l'intéressée la somme de 1 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Lambron, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., de nationalité malienne, s'est maintenue plus d'un mois sur le territoire français à compter de la notification de la décision du 23 août 2000 par laquelle le PREFET DES YVELINES lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., entrée en France en 1998, est mariée depuis 1987 avec un compatriote titulaire d'une carte de résident expirant en 2006 ; que les époux X... sont les parents de deux enfants dont l'un est né en France ; qu'à la date de l'arrêté attaqué, Mme X... était enceinte d'environ huit mois ; qu'en ordonnant dans de telles circonstances et à cette date la reconduite à la frontière de Mme X..., le PREFET DES YVELINES a porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels a été décidée cette mesure ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES YVELINES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le premier juge a annulé l'arrêté susvisé en date du 23 janvier 2001 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application desdites dispositions et de condamner l'Etat à payer à Mme X... une somme de 5 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du PREFET DES YVELINES est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Mme X... une somme de 5 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES YVELINES, à Mme Y... Cissé et au ministre de l'intérieur.