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28/11/2001 | FRANCE | N°228247

France | France, Conseil d'État, 9 ss, 28 novembre 2001, 228247


Vu la requête, enregistrée le 18 décembre 2000 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Cétin X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 7 décembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2000 par lequel le préfet de la Seine-Maritine a ordonné sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour par laquelle le préfet a fixé le pays de destination de M. X... ;
2°) d'annuler les deux décisions susmentionnée

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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauveg...

Vu la requête, enregistrée le 18 décembre 2000 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Cétin X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 7 décembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2000 par lequel le préfet de la Seine-Maritine a ordonné sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour par laquelle le préfet a fixé le pays de destination de M. X... ;
2°) d'annuler les deux décisions susmentionnées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Ménéménis, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Courtial, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'arrêté du 20 novembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité turque, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 19 juin 2000, de la décision du 6 juin 2000 du préfet de la région Haute-Normandie, préfet de la Seine-Maritime lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que, si M. X... a fait valoir qu'étant entré en France en 1994, il a épousé une ressortissante française le 6 mai 2000, après avoir vécu maritalement avec elle depuis le mois de juin 1999 et que certains membres de sa famille vivent en France, et s'il soutient qu'il n'a plus de relations avec les membres de sa famille restés en Turquie, de telles circonstances ne permettent pas, eu égard notamment à la durée limitée de vie commune de M. X... avec son épouse et aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, de regarder l'arrêté attaqué comme ayant porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris et comme ayant, par suite, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que M. X... n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2000 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a ordonné sa reconduite à la frontière ;
Sur la décision du 20 novembre 2000 fixant le pays de destination :
Considérant que le second alinéa de l'article 27 bis ajouté à l'ordonnance du 2 novembre 1945 par la loi du 24 août 1993 dispose qu'"un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ..." ; que ce dernier texte énonce que : "Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants" ;

Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;
Considérant que, si M. X... fait état de ce que sa famille, d'origine kurde, a fait l'objet à plusieurs reprises de mesures de répression et s'il soutient que sa propre sécurité serait exposée s'il rentrait en Turquie, il n'apporte, à l'appui de ses allégations, aucune preuve de nature à les justifier ; que, d'ailleurs, la demande de M. X... tendant à obtenir le statut de réfugié, examinée à trois reprises par l'office français de protection des réfugiés et apatrides et par la commission des recours des réfugiés, a été rejetée ; que, dès lors, M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 novembre 2000 par laquelle le préfet de la Seine-Maritime a fixé la Turquie comme pays de destination ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Cétin X..., au préfet de la Seine-Maritime et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 9 ss
Numéro d'arrêt : 228247
Date de la décision : 28/11/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 20 novembre 2000
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8, art. 3
Loi 93-1027 du 24 août 1993
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 27 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 28 nov. 2001, n° 228247
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Ménéménis
Rapporteur public ?: M. Courtial

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:228247.20011128
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