Vu la requête, enregistrée le 1er juin 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Boubacar X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 mai 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 12 octobre 1998 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée le 4 novembre 1950 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bordry, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : "I.- Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ... : 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., ressortissant de la République du Sénégal, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 20 mai 1998, de la décision du préfet de police en date du 7 mai 1998 refusant de lui délivrer un titre de séjour ; qu'ainsi, il se trouvait dans le cas prévu par les dispositions législatives précitées où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant que, par un arrêté du 22 juin 1998 publié au "Bulletin municipal officiel de la Ville de Paris" daté du 3 juillet 1998, le préfet de police a donné à M. Jean-Pierre Y..., sous-directeur de l'administration des étrangers à la direction de la police générale, délégation pour signer, en cas d'absence ou d'empêchement du directeur, les arrêtés de reconduite à la frontière pris en application des dispositions de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; qu'ainsi, M. X... n'est pas fondé à prétendre que M. Y... n'aurait pas eu qualité pour signer l'arrêté du 12 octobre 1998 décidant sa reconduite à la frontière ;
Considérant que l'arrêté attaqué énonce avec une précision suffisante les éléments de droit et de fait sur lesquels le préfet de police s'est fondé pour décider la reconduite à la frontière de M. X... ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cet arrêté serait entaché d'un défaut de motivation doit être écarté ;
Considérant que la circulaire du ministre de l'intérieur en date du 24 juin 1997 relative au réexamen de la situation de certaines catégories d'étrangers en situation irrégulière ne présente pas un caractére réglementaire ; qu'ainsi, M. X... ne saurait utilement se prévaloir de ce que la décision du préfet de police en date du 7 mai 1998 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour aurait été prise en méconnaissance de la teneur de cette circulaire ; que, dès lors, il n'est pas fondé à invoquer l'illégalité de ladite décision au soutien de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 12 octobre 1998 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit ... à l'étranger ... qui justifie pas tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans" ; que, si M. X... soutient être entré en France en 1988, il ne justifie pas y avoir résidé de manière habituelle depuis plus de dix ans à la date à laquelle le préfet de police a pris l'arrêté attaqué ; qu'ainsi, il n'était pas en droit de bénéficier d'une carte de séjour temporaire en application des dispositions législatives précitées ; que, par suite, il n'est pas fondé à prétendre qu'il n'aurait pu légalement faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant que, si M. X... se prévaut de ce que plusieurs membres de sa famille résideraient sur le territoire français en situation régulière et de ce qu'il n'aurait pas conservé d'attaches familiales au Sénégal, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de la durée pouvant être regardée comme effective et des conditions du séjour en France de l'intéressé, qui est célibataire et sans charge de famille, le préfet de police ait porté à son droit au respect de la vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'arrêté attaqué ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'une mesure de reconduite à la frontière pouvait avoir sur la situation personnelle du requérant ;
Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police en date du 12 octobre 1998 décidant sa reconduite à la frontière ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Boubacar X..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.