Vu la requête, enregistrée le 14 juin 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Wassila Y... demeurant ... ; Mlle Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 5 mai 2000 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 avril 2000 par lequel le préfet des Yvelines a décidé de la reconduire à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention "étudiant" ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié par l'avenant du 22 décembre 1985 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Edouard Philippe, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle Y..., de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 15 janvier 2000, de la décision du 13 janvier 2000 du préfet des Yvelines lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant toutefois qu'aux termes du titre III du protocole annexe à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié par l'avenant du 22 décembre 1985 : "Les ressortissants algériens qui suivent un enseignement, un stage ou font des études en France et justifient de moyens d'existence suffisants ( ...) reçoivent, sur présentation soit d'une attestation de préinscription ou d'inscription dans un établissement d'enseignement français, soit d'une attestation de stage, un certificat de résidence valable un an, renouvelable et portant la mention étudiant ou stagiaire" ;
Considérant que le refus de renouvellement du certificat de résidence de Mlle LAKHDARI en qualité d'étudiante est fondé sur la circonstance qu'elle n'était pas inscrite à l'université au cours de l'année 1998-1999 ; que, toutefois, à la date de la décision de refus de renouvellement de son titre de séjour, Mlle Y... était régulièrement inscrite à l'institut d'administration des entreprises de l'université Paris I en vue de l'obtention d'un diplôme d'études supérieures spécialisées dénommé "systèmes d'information et de communication" ; que si elle n'était pas inscrite à l'université au cours de l'année 1998-1999, alors qu'elle avait été inscrite l'année précédente, l'interruption de ses études s'expliquait par la nécessité de se rendre au chevet de son père malade en Algérie ; qu'après sa réinscription l'année suivante, elle a fait preuve d'assiduité et de sérieux dans ses études, comme l'attestent les documents qu'elle a produits ; que, dans ces conditions, le préfet des Yvelines a inexactement apprécié les circonstances de l'espèce en lui refusant le renouvellement de son certificat de résidence en qualité d'étudiante ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, Mlle Y... est fondée à se prévaloir de l'illégalité de ce refus pour demander l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre le 13 avril 2000 ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ... prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution" ;
Considérant qu'eu égard à ses motifs, l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière prononcée par la présente décision implique nécessairement qu'un certificat de résidence portant la mention étudiant soit délivré à Mlle Y... ; qu'il y a lieu d'ordonner au préfet des Yvelines de délivrer un tel certificat à Mlle X... dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ;
Considérant enfin qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à verser à Mlle X... la somme de 8 000 F que demande celle-ci au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 5 mai 2000 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles et l'arrêté du 13 avril 2000 du préfet des Yvelines ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Y... sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Yvelines de délivrer à Mlle Y... dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, un certificat de résidence portant la mention étudiant.
Article 3 : L'Etat versera à Mlle Y... une somme de 8 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mlle Wassila Y..., au préfet des Yvelines et au ministre de l'intérieur.