Vu la requête, enregistrée le 15 avril 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Félicien X... demeurant ... de Tassigny à Colmar (68000) ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir :
1°) la décision du 17 mai 1996 par laquelle le directeur régional des anciens combattants et victimes de guerre de la région Centre atteste que l'intéressé peut bénéficier, dans le cadre de l'autorisation de cure militaire qui lui est accordée, d'une dispense d'avance de frais limitée au tarif de responsabilité de la sécurité sociale pour l'ensemble des soins ;
2°) la décision du 7 juillet 1998 par laquelle le directeur régional des anciens combattants et victimes de guerre de Strasbourg atteste que l'intéressé peut bénéficier, dans le cadre de l'admission à une cure thermale au titre de l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, d'une dispense d'avance de frais limitée au tarif de responsabilité de la sécurité sociale concernant le forfait de surveillance médicale de cure ;
3°) la circulaire en date du 11 février 1992 du directeur du service de santé de la circonscription militaire de défense de Lyon relative aux cures thermales dans les centres thermaux agréés, en tant qu'elle prévoit pour la prise en charge des soins thermaux que "seule subsiste la 2ème classe" ;
4°) la circulaire en date du 13 décembre 1995 du ministre des anciens combattants et victimes de guerre, en tant qu'elle prévoit qu' "à compter du 1er janvier 1996, il n'existe plus qu'un régime unique de cures thermales prises en charge au titre de l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre" et que "la commission du thermalisme n'est plus susceptible d'être saisie" ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu la loi du 12 juillet 1873 ;
Vu le décret n° 78-194 du 24 février 1978 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Rapone, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions individuelles des 17 mai 1996 et 7 juillet 1998 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " L'Etat doit gratuitement aux titulaires d'une pension d'invalidité attribuée au titre du présent code les prestations médicales, paramédicales, chirurgicales et pharmaceutiques nécessitées par les infirmités qui donnent lieu à pension, en ce qui concerne exclusivement les accidents et complications résultant de la blessure ou de la maladie qui ouvre droit à pension " ; qu'aux termes de l'article L. 118 du même code : " ... toutes les contestations auxquelles donne lieu l'application de l'article L. 115 et des textes pris pour son application, sont jugées en premier ressort par la commission contentieuse des soins gratuits ", laquelle constitue une juridiction administrative ;
Considérant que M. X... a présenté des conclusions dirigées contre les décisions du 17 mai 1996 et du 7 juillet 1998 prises respectivement par le directeur régional des anciens combattants et victimes de guerre de la région Centre et par le directeur régional des anciens combattants et victimes de guerre de Strasbourg, et ayant pour objet d'attester que l'intéressé peut bénéficier, dans le cadre de l'admission à une cure thermale au titre de l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, d'une dispense d'avance de frais limitée au tarif de responsabilité de la sécurité sociale pour l'ensemble des soins thermaux ; que ce litige a trait à l'application de l'article L. 115 précité et relève dès lors, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 118 du même code, de la compétence de la commission contentieuse des soins gratuits ; qu'il y a lieu, par suite, pour le Conseil d'Etat, en vertu de l'article R. 351-1 du code de justice administrative, de renvoyer le jugement de l'affaire à la commission départementale des soins gratuits du Haut-Rhin, dans le ressort de laquelle M. X... est domicilié ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de certaines dispositions des circulaires des 11 février 1992 et 13 décembre 1995 :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 12 juillet 1873 relative à l'envoi et au traitement aux frais de l'Etat, dans les établissements d'eaux minérales, des anciens militaires et marins blessés ou infirmes : "Chaque année, à dater de la promulgation de la présente loi, les anciens militaires et marins, ainsi que leurs assimilés ( ...) dont les infirmités ou les blessures contractées au service nécessiteraient l'emploi des eaux seront, après en avoir obtenu l'autorisation du ministre de la guerre, sur l'avis de la commission spéciale instituée dans chaque département ( ...), transportés et hospitalisés aux frais de l'Etat dans les localités déterminées par le ministre de la guerre " ; qu'aux termes de l'article D. 62 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Les pensionnés ayant la qualité de militaire ou d'ancien militaire désirant effectuer une cure thermale au titre de l'article L. 115 peuvent, s'ils le désirent, être admis à effectuer cette cure dans les conditions prévues par la loi du 12 juillet 1873 relative à l'envoi et au traitement aux frais de l'Etat, dans les établissements d'eaux minérales, des anciens militaires et marins blessés ou infirmes. Ils sont dans ce cas assujettis aux dispositions de cette loi et aux dispositions réglementaires prises pour son application. Les pensionnés n'ayant pas la qualité de militaire ou d'ancien militaire ou ceux qui ayant cette qualité ne désirent pas faire appel aux dispositions de la loi du 12 juillet 1873 peuvent être admis à suivre une cure dans les établissements thermaux agréés au titre du régime général de sécurité sociale " ;
Considérant que le requérant demande l'annulation de la circulaire du 11 février 1992 du directeur du service de santé de la circonscription militaire de défense de Lyon relative aux cures thermales dans les centres thermaux agréés en ce qu'elle prévoit, pour la prise en charge des soins thermaux, que les suppléments au titre de la 1ère classe restent à la charge du curiste, dans la mesure où " seule subsiste la 2ème classe " ; qu'en indiquant ainsi les conditions de prise en charge des soins thermaux applicables aux pensionnés militaires ou anciens militaires admis à suivre une cure au titre de l'article L. 115 précité, sans aucunement remettre en cause le principe de gratuité de l'accès aux soins thermaux tel qu'il est affirmé par les dispositions législatives et réglementaires susmentionnées, lesquelles ne prévoient pas une organisation des cures différenciée en 1ère et 2ème classes en fonction du grade détenu par les militaires ou anciens militaires, l'auteur de la circulaire n'a pas fait une inexacte interprétation des dispositions en vigueur et n'a modifié en rien l'ordonnancement juridique en résultant ; qu'il suit de là que la disposition contestée de la circulaire en cause est dépourvue de caractère réglementaire, et que les conclusions de la requête de M. X... sur ce point ne sont pas recevables et doivent donc être rejetées ;
Considérant que l'intéressé demande également l'annulation de la circulaire du 13 décembre 1995 du ministre chargé des anciens combattants et des victimes de guerre relative au thermalisme des pensionnés au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre en tant qu'elle prévoit qu' " à compter du 1er janvier 1996 il n'existe plus qu'un régime unique de cures thermales prises en charge au titre de l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre " et que "la commission du thermalisme n'est plus susceptible d'être saisie" ; qu'en instaurant une telle unicité de régime, qui exclut ainsi le régime particulier prévu par la loi du 12 juillet 1873 au bénéfice duquel peuvent être admis, conformément aux dispositions de l'article D 62 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, les seuls pensionnés ayant la qualité de militaire ou d'ancien militaire, le ministre a incompétemment restreint le champ d'application desdites dispositions législatives et réglementaires ; que, par suite, M. X... est recevable et fondé à soutenir que la circulaire litigieuse est, dans cette mesure, entachée d'excès de pouvoir et à en demander l'annulation ;
Article 1er : Le jugement des conclusions de la requête dirigées contre les décisions individuelles de prise en charge des frais de soins thermaux des 17 mai 1996 et 7 juillet 1998 est renvoyé à la commission départementale des soins gratuits du Haut-Rhin.
Article 2 : La circulaire du 13 décembre 1995 du ministre chargé des anciens combattants et des victimes de guerre est annulée en tant qu'elle prévoit qu'"à compter du 1er janvier 1996, il n'existe plus qu'un régime unique de cures thermales prises en charge au titre de l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre" et que "la commission du thermalisme n'est plus susceptible d'être saisie".
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Félicien X..., au ministre de la défense et au secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants.