Vu la requête, enregistrée le 16 mars 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Pierre X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 18 décembre 1997 de la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins qui lui a infligé la sanction de l'interdiction d'exercer la médecine pendant deux mois ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ;
Vu le décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 relatif au fonctionnement des Conseils de l'Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes et de la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins ;
Vu le décret n° 79-500 du 28 juin 1979 portant code de déontologie médicale ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. François Bernard, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Lesourd, avocat de M. X... et de la SCP Vier, Barthélemy, avocat du Conseil national de l'Ordre des médecins,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle" ; que si ces stipulations sont applicables au contentieux disciplinaire dont les juridictions des ordres professionnels ont à connaître, c'est en raison du rattachement de ce dernier aux contestations portant sur des droits et obligations de caractère civil ; qu'en revanche, ce contentieux n'entre pas dans le champ des prévisions du paragraphe 3 de l'article 6 de la convention, lequel vise uniquement les droits de "tout accusé", ce qui limite son champ d'application à la "matière pénale" au sens du paragraphe 1 du même article ;
Considérant qu'il suit de là que le respect des stipulations du paragraphe 3 de l'article 6 de la convention précitée, qui reconnaissent dans l'alinéa d) le droit de tout accusé à "interroger ou faire interroger les témoins à charge", ne s'imposait pas au Conseil national de l'Ordre des médecins dans la procédure disciplinaire concernant M. X... ; qu'il appartient aux seuls juges du fond de décider, le cas échéant, de procéder à l'audition de témoins ; qu'ainsi la décision attaquée, qui a d'ailleurs explicitement écarté la demande d'audition de témoins dont elle avait été saisie, a été rendue sur une procédure régulière ;
Considérant qu'il résulte des termes de la décision attaquée que la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins s'est fondée sur la concordance de divers indices tels que l'inscription du docteur X... dans les annuaires professionnels, l'affiliation de certains de ses patients à des caisses d'assurance maladie ou de mutualité sociale agricole ou l'évolution de l'activité d'une société dans laquelle il possédait des intérêts, pour estimer que ce praticien, inscrit depuis le mois de novembre 1993 au tableau de l'ordre de la Gironde, exerçait simultanément son activité professionnelle au cours de l'année 1994, dans un cabinet situé à Idron dans le département des Pyrénées-Atlantiques et que cet exercice simultané avait été motivé non par l'intérêt des malades mais par l'intérêt financier du médecin ;
Considérant qu'il n'appartient pas au juge de cassation de contrôler l'appréciation portée par les juges du fond sur la valeur des preuves ; que la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins n'a pas inexactement qualifié les faits ainsi souverainement appréciés en les regardant comme des manquements aux dispositions de l'article 63 du code de déontologie médicale alors en vigueur ;
Considérant que les faits reprochés au docteur X... sont contraires à la probité et à l'honneur ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que la section disciplinaire les a regardés comme exclus du bénéfice de l'amnistie ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le docteur X... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Pierre X..., au Conseil national de l'Ordre des médecins et au ministre de l'emploi et de la solidarité.