La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/11/2000 | FRANCE | N°204764

France | France, Conseil d'État, 29 novembre 2000, 204764


Vu la requête, enregistrée le 17 février 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Alain X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les décisions, en date des 3 septembre 1997 et 16 décembre 1998, du conseil médical de l'aéronautique civile le déclarant inapte classe 1 et inapte classe 2 à l'exercice de la fonction de pilote de ligne de l'aéronautique civile ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièce

s du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de l'aviatio...

Vu la requête, enregistrée le 17 février 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Alain X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les décisions, en date des 3 septembre 1997 et 16 décembre 1998, du conseil médical de l'aéronautique civile le déclarant inapte classe 1 et inapte classe 2 à l'exercice de la fonction de pilote de ligne de l'aéronautique civile ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de l'aviation civile ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 ;
Vu le décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 ;
Vu l'arrêté du 2 décembre 1988 modifié, relatif à l'aptitude physique et mentale du personnel navigant technique de l'aviation civile ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Maïa, Auditeur,
- les observations de Me Ricard, avocat de M. Alain X...,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X... demande l'annulation des décisions des 3 septembre 1997 et 16 décembre 1998 par lesquelles le conseil médical de l'aéronautique civile l'a déclaré "inapte classe 1" et "inapte classe 2" à l'exercice des fonctions de pilote ;
Sur la légalité externe des décisions attaquées :
Considérant qu'aux termes de l'article D. 424-4 du code de l'aviation civile : "Les membres du conseil médical sont convoqués individuellement à chaque séance par le président. En cas d'absence ou d'empêchement, le président est remplacé par le vice-président. Le conseil ne peut valablement délibérer que si cinq au moins de ses membres à voix délibérative sont présents ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les convocations aux réunions du 3 septembre 1998 et du 16 décembre 1998 ont été régulièrement adressées à l'ensemble des membres du conseil médical de l'aéronautique civile ; que les procès-verbaux de séance montrent que cinq membres ayant voix délibérative étaient présents au cours de ces séances ; que, par suite, la procédure fixée à l'article D. 424-4 du code de l'aviation civile pour les délibérations du conseil médical de l'aéronautique civile a été respectée ;
Considérant que les décisions attaquées ont été prises par le conseil médical de l'aéronautique civile dans le cadre d'attributions lui imposant, selon les dispositions des articles 4 et 104 du décret du 6 septembre 1995, pris en application de l'article L. 366 du code de la santé publique, de ne fournir "à l'administration ou à l'organisme qui l'emploie" que "ses conclusions sur le plan administratif sans indiquer les raisons médicales qui les motivent" ; qu'ainsi, et conformément au deuxième alinéa de l'article 4 de la loi du 11 juillet 1979, aux termes duquel "les dispositions de la présente loi ne dérogent pas aux textes législatifs interdisant la divulgation ou la publication de faits couverts par le secret", les décisions du conseil médical de l'aéronautique civile concernant M. X... n'avaient pas à être motivées ;
Considérant que les dispositions de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont pas applicables au conseil médical de l'aéronautique civile dont les décisions ne présentent pas le caractère de décisions juridictionnelles ;
Sur la légalité interne des décisions attaquées :

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions du 2 et du 4 a), b), d) de l'article D. 424-2 du code de l'aviation civile qu'il appartient au conseil médical de l'aéronautique civilede se prononcer sur l'aptitude physique et mentale du personnel navigant professionnel et non-professionnel en fonction des normes d'aptitude réglementairement définies et de son pouvoir d'appréciation sur les demandes de dérogation dont il est saisi ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 2 décembre 1988 relatif à l'aptitude physique et mentale du personnel navigant technique de l'aviation civile : "La délivrance et le renouvellement d'une carte de stagiaire ou d'une licence sont subordonnés à des conditions d'aptitude physique et mentale appréciée lors d'une consultation effectuée par une autorité médicale agréée" ; que ces conditions, en ce qui concerne le personnel navigant professionnel, sont notamment définies au paragraphe 1.11.1 de l'annexe de l'arrêté du 2 décembre 1988 précité ; qu'aux termes de l'article 9 de cet arrêté, lorsqu'un candidat déclaré inapte saisit le conseil médical de son dossier, celui-ci "se prononce sur l'aptitude de l'intéressé et peut accorder une dérogation si elle ne nuit pas à la sécurité aérienne ... Il peut assortir sa décision de conditions et de restrictions ..." ;
Considérant que dans le cas où l'état du dossier ne lui permet pas de se prononcer sur la régularité d'une décision, il appartient au juge administratif de requérir des administrations compétentes la production de tous les documents qu'il juge de nature à permettre la vérification des allégations des parties en cause à la seule exception de ceux de ces documents dont la communication conviendrait à une prescription législative ; que si le respect du secret médical s'oppose à ce que le juge demande directement à l'administation la communication de documents couverts par un tel secret, il peut, en revanche, enjoindre à l'administration de communiquer son dossier médical au requérant, selon des modalités compatibles avec les prescriptions du code de déontologie médicale, afin de lui permettre le cas échéant d'en révéler lui-même le contenu au juge administratif en vue de l'exercice par celui-ci de son contrôle de la légalité de la décision attaquée ;
Considérant que le conseil médical de l'aéronautique civile s'est fondé sur le dossier médical du requérant pour prendre les décisions attaquées ; que l'état du dossier ne permet pas au Conseil d'Etat d'apprécier si l'état de santé de M. X... justifiait légalement les décisions attaquées ; que dès lors, il y a lieu, avant de statuer sur sa requête, d'enjoindre au ministre de l'équipement, du transport et du logement de communiquer au médecin que M. X... désignera le dossier médical au vu duquel le conseil médical de l'aéronautique civile a pris les décisions attaquées, afin que le requérant décide, le cas échéant, d'autoriser le Conseil d'Etat à en prendre connaissance ;
Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution des décisions attaquées :

Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article 54 du décret du 30 juillet 1963 modifié : " ... Le sursis peut être ordonné à la demande du requérant, par la sous-section en formation du jugement, les sous-sections réunies, par la section ou par l'assemblée du contentieux, si l'exécution de la décision attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier l'annulation de la décision attaquée ..." ;
Considérant que M. X... ne justifie pas que l'exécution des décisions en date des 3 septembre 1997 et 16 décembre 1998 par lesquelles le conseil médical de l'aéronautique l'a déclaré "inapte classe 1" et "inapte classe 2" à l'exercice de la fonction de pilote de ligne de l'aéronautique civile risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables ; que, dès lors, M. X... n'est pas fondé à demander que le Conseil d'Etat ordonne qu'il soit sursis à l'exécution de ces décisions ;
Article 1er : Avant-dire-droit sur la requête de M. X..., il est enjoint au ministre de l'équipement du transport et du logement de procéder, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, à la communication au médecin que M. X... désignera du dossier médical sur lequel le conseil médical de l'aéronautique civile s'est fondé pour prendre les décisions attaquées.
Article 2 : Les conclusions à fin de sursis à exécution des décisions en date des 3 septembre 1997 et 16 décembre 1998 du conseil médical de l'aéronautique civile présentées par M. X... sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Alain X... et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 204764
Date de la décision : 29/11/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

65-03-01 TRANSPORTS - TRANSPORTS AERIENS - PERSONNELS.


Références :

Arrêté du 02 décembre 1988 art. 1, art. 9
Code de l'aviation civile D424-4, D424-2
Code de la santé publique L366
Décret 63-766 du 30 juillet 1963 art. 54
Décret 95-1000 du 06 septembre 1995 art. 4, art. 104
Instruction du 03 septembre 1998
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 4


Publications
Proposition de citation : CE, 29 nov. 2000, n° 204764
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Maïa
Rapporteur public ?: M. Arrighi de Casanova

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:204764.20001129
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award