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05/05/2000 | FRANCE | N°212901

France | France, Conseil d'État, 3 ss, 05 mai 2000, 212901


Vu la requête enregistrée le 28 septembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Hong Y... demeurant chez M. Patrick X...
... ; Mlle Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 3 septembre 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 1998 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler ledit arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention europ

éenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ord...

Vu la requête enregistrée le 28 septembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Hong Y... demeurant chez M. Patrick X...
... ; Mlle Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 3 septembre 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 1998 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler ledit arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Stefanini, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Touvet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, le représentant de l'Etat dans le département peut "décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle Hong Y..., qui est de nationalité chinoise, s'est maintenue sur le territoire national au-delà du délai fixé par les dispositions précitées ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application de ces dispositions ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision de reconduite à la frontière :
Considérant que l'arrêté du 24 novembre 1998 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui justifient qu'il soit procédé à la reconduite à la frontière de Mlle Y... ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cet arrêté serait insuffisamment motivé doit être écarté ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient la requérante, l'arrêté attaqué fixe en son article 2 le pays de destination de la reconduite ; que, par suite, et en tout état de cause, la requérante ne saurait soutenir que cet arrêté a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article 27 ter de l'ordonnance du 2 novembre 1945 faute d'être accompagné de la décision fixant le pays de destination de la reconduite ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;

Considérant que si Mlle Y... soutient qu'elle est entrée en France en 1993 où elle réside depuis lors, qu'elle vit en concubinage avec un Français depuis environ quatre ans, que plusieurs membres de sa famille, dont une soeur, une tante et un oncle vivent en France, qu'elle a essayé de s'intégrer en exerçant une activité professionnelle et en suivant des cours de formation et que ses attaches sociales et affectives se trouvent en France, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué, compte tenu des circonstances de l'espèce et notamment des conditions et de la durée du séjour de l'intéressée en France, du fait qu'elle est célibataire et sans enfant, que son concubin est marié et qu'il n'est pas établi qu'elle n'ait plus d'attaches familiales en Chine, n'a pas porté au droit de Mlle Y... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que cet arrêté n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il ne ressort pas des circonstances susrappelées que le préfet de police aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure litigieuse sur lasituation personnelle de l'intéressée ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination de la reconduite :
Considérant que si Mlle Y... allègue qu'elle se trouve exposée à des risques pour sa sécurité en cas de reconduite dans son pays d'origine, elle n'assortit ses affirmations d'aucune précision ni justification propres à établir la réalité des risques auxquels elle serait dans cette hypothèse personnellement exposée et dont l'Office français de protection des réfugiés et apatrides n'a d'ailleurs pas reconnu l'existence ; que, dès lors, aucune circonstance particulière ne faisant obstacle à la reconduite à la frontière de Mlle Y... à destination de son pays d'origine, la décision attaquée ne peut être regardée comme méconnaissant les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle Y... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 1998 du préfet de police décidant sa reconduite à la frontière ;
Article 1er : La requête de Mlle Hong Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Hong Y..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 24 novembre 1998 art. 2
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3, art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 27 ter


Publications
Proposition de citation: CE, 05 mai. 2000, n° 212901
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Stefanini
Rapporteur public ?: M. Touvet

Origine de la décision
Formation : 3 ss
Date de la décision : 05/05/2000
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 212901
Numéro NOR : CETATEXT000008061945 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2000-05-05;212901 ?
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