Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 2 septembre et 29 décembre 1997, présentés pour la SARL CONSTRUCTIONS DE GIORGI, dont le siège social est ... ; la SARL CONSTRUCTIONS DE GIORGI demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 12 juin 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a annulé, à la demande de la commune de Champagnole, le jugement du 21 avril 1994 par lequel le tribunal administratif de Besançon avait annulé l'arrêté du 29 juin 1992 du maire de Champagnole portant sursis à statuer sur sa demande de permis de construire, a rejeté sa demande dirigée contre cet arrêté et l'a condamnée à verser à la commune de Champagnole une somme de 10 000 F au titre des frais irrépétibles ;
2°) de condamner la commune de Champagnole à lui verser la somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ; Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 88-905 du 2 septembre 1988 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Le Bihan-Graf, Auditeur,
- les observations de Me Parmentier, avocat de la SARL CONSTRUCTIONS DE GIORGI et de la SCP Boré, Xavier, avocat de la commune de Champagnole,
- les conclusions de M. Salat-Baroux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la SARL CONSTRUCTIONS DE GIORGI a déposé, le 17 mars 1992, une demande de permis de construire qu'elle a complétée le 6 avril 1992 ; qu'elle a reçu du maire de Champagnole (Doubs) la lettre prévue à l'article R. 421-25 du code de l'urbanisme l'avisant qu'en cas de silence gardé pendant trois mois par l'autorité compétente, elle serait titulaire, le 6 juillet 1992, d'un permis de construire tacite ; que toutefois par une décision datée du 29 juin 1992 dont la société a reçu la notification le 8 juillet 1992 le maire a prononcé, sur le fondement de l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme, un sursis à statuer sur la demande de permis de construire pendant un délai de deux ans ou jusqu'à ce que le plan d'occupation des sols de la commune, mis en révision le 25 septembre 1990, ait été rendu public ; que cette décision est fondée sur ce que : "le terrain en cause sera situé dans un secteur soumis à plan de masse, celui-ci réglementant la hauteur, l'implantation et l'aspect des bâtiments" et "qu'un remodelage de la voirie est envisagé sur ce quartier" ; que par l'arrêt attaqué la cour administrative d'appel a annulé le jugement par lequel le tribunal administratif avait, à la demande de la société, annulé la décision du 29 juin 1992 et a rejeté la demande de la société dirigée contre cette décision ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme : "Lorsque l'établissement d'un plan d'occupation des sols est prescrit, ou lorsque la révision d'un plan approuvé a été ordonnée, l'autorité compétente peut surseoir à statuer, dans les conditions et délais prévus à l'article L. 111-8, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan" ;
Considérant que, pour rejeter la demande de la société dirigée contre la décision du 29 juin 1992, notifiée le 8 juillet 1992, la cour administrative d'appel s'est fondée, exclusivement, sur ce que le retrait du permis de construire tacite résultant de cette décision de sursis à statuer aurait été légal ; qu'elle a relevé à cet égard que "l'administration était tenue de prononcer le retrait de ce permis dans le délai du recours contentieux ainsi qu'elle l'a fait" en raison de la contradiction dudit permis avec certaines dispositions du plan d'occupation des sols en vigueur de la commune de Champagnole ;
Considérant qu'en se fondant ainsi sur le seul motif tiré de la légalité du permis tacite au regard des dispositions du plan d'occupation des sols en vigueur et en le substituant àcelui relatif à l'application de l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme la cour administrative n'a pas légalement justifié son arrêt, qui doit dès lors être annulé ;
Sur les conclusions de la SARL CONSTRUCTIONS DE GIORGI tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de la SARL CONSTRUCTIONS DE GIORGI et de condamner la commune de Champagnole à lui payer la somme de 15 000 F qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions de la commune de Champagnole tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la SARL CONSTRUCTIONS DE GIORGI qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la commune de Champagnole la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt du 12 juin 1997 de la cour administrative d'appel de Nancy est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Douai.
Article 3 : La commune de Champagnole versera à la SARL CONSTRUCTIONS DE GIORGI la somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SARL CONSTRUCTIONS DE GIORGI, à la commune de Champagnole, au président de la cour administrative d'appel de Douai et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.