Vu, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 2 octobre 1998, l'ordonnance en date du 7 juillet 1998 par laquelle le président du tribunal administratif de Paris transmet au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 82 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le dossier de la requête dont ce tribunal a été saisi par M. Pascal X... ;
Vu la requête enregistrée au greffe du tribunal administratif de Paris le 8 décembre 1995, présentée par M. Pascal X..., demeurant ... ; M. X... demande l'annulation de la décision du 29 septembre 1997 par laquelle le président de la commission nationale de l'informatique et des libertés lui a fait savoir que l'un des membres de cette commission avait procédé à des vérifications concernant les fichiers des renseignements généraux ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique et aux libertés modifiée notamment par la loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 ;
Vu le décret n° 78-774 du 17 juillet 1978 ;
Vu le décret n° 79-1160 du 28 décembre 1979 ;
Vu le décret n° 86-326 du 7 mars 1986 ;
Vu les décrets n° 91-1051 et 91-1052 du 14 octobre 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Gounin, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Daussun, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 31 de la loi du 6 janvier 1978 : "Il est interdit de mettre ou conserver en mémoire informatisée, sauf accord exprès de l'intéressé, des données nominatives qui, directement ou indirectement, font apparaître les origines raciales ou les opinions politiques, philosophiques ou les appartenances syndicales ou les moeurs des personnes" ; que, toutefois, selon le troisième alinéa du même article, pour des motifs d'intérêt public, il peut être fait exception à l'interdiction ci-dessus sur proposition ou avis conforme de la Commission nationale de l'informatique et des libertés par décret en Conseil d'Etat ; que, sur le fondement de ces dernières dispositions, est intervenu notamment le décret n° 91-1051 du 14 octobre 1991 applicable aux fichiers gérés par les services des renseignements généraux ;
Considérant, par ailleurs, que les articles 34 et 45 de la loi posent en principe que toute personne justifiant de son identité a le droit d'interroger les services ou organismes qui détiennent les fichiers visés par ces articles en vue de savoir s'ils contiennent des informations nominatives la concernant ; que le titulaire du droit d'accès a le droit d'obtenir communication de ces informations et peut exiger qu'il soit fait application des dispositions de la loi relatives au droit de rectification ; qu'il est spécifié au troisième alinéa de l'article 45 que "les dispositions des articles 37, 38, 39 et 40 sont également applicables" ; qu'aux termes de l'article 39 de la loi : "En ce qui concerne les traitements intéressant la sûreté de l'Etat, la défense et la sécurité publique, la demande est adressée à la commission qui désigne l'un de ses membres appartenant ou ayant appartenu au Conseil d'Etat, à la Cour de cassation ou à la Cour des comptes pour mener toutes investigations utiles et faire procéder aux modifications nécessaires ( ...)/ Il est notifié au requérant qu'il a été procédé aux vérifications" ;
Considérant que le décret n° 91-1051 du 14 octobre 1991 portant application de l'article 31, alinéa 3, de la loi du 6 janvier 1978 aux fichiers gérés par les services des renseignements généraux, tout en posant en principe que le droit d'accès à ces fichiers s'exerce "conformément aux dispositions de l'article 39 de la loi", détermine des modalités complémentaires de mise en oeuvre de ce droit, qui sont énoncées respectivement dans les troisième, quatrième et cinquième alinéas de l'article 7 dudit décret ;
Considérant que le troisième alinéa de l'article 7 du décret du 14 octobre 1991 vise les cas, d'une part, des informations concernant des personnes ayant obtenu ou sollicitant une autorisation d'accès à des informations protégées en application du décret n° 81-514 du 12 mai 1981 et, d'autre part, des informations relatives à des personnes physiques ou morales qui ont sollicité, exercé ou exercent un mandat politique, syndical ou économique ou qui jouent un rôle politique, économique, social ou religieux significatif ; que, dans ces hypothèses, il est prévu que"la Commission nationale de l'informatique et des libertés, en accord avec le ministre de l'intérieur, peut constater que ces informations ne mettent pas en cause la sûreté de l'Etat, la défense ou la sécurité publique et qu'il y a donc lieu de les communiquer à l'intéressé" ; qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article 7 du décret : "Lorsque le requérant n'est pas connu du service des renseignements généraux, la Commission nationale de l'informatique et des libertés lui indique, avec l'accord du ministre de l'intérieur, qu'aucune information le concernant ne figure dans le fichier" ; que le cinquième et dernier alinéa de l'article 7 du décret dispose que : "Le ministre de l'intérieur peut s'opposer à la communication au requérant de tout ou partie des informations le concernant lorsque cette communication peut nuire à la sûreté de l'Etat, à la défense ou à la sécurité publique. Dans ce cas, la Commission nationale de l'informatique et des libertés informe le requérant qu'il a été procédé aux vérifications" ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions de l'article 39 de la loi du 6 janvier 1978 et de celles de l'article 7 du décret du 14 octobre 1991 que la Commission nationale de l'informatique et des libertés, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'accès aux fichiers des renseignements généraux, n'est appelée à se prononcer, en tant qu'instance collégiale, que dans l'hypothèse où elle décide de charger un de ses membres habilités par la loi à procéder aux investigations utiles et aux modifications nécessaires ainsi que dans le cas où, à l'initiative du commissaire désigné par elle et après accord du ministre de l'intérieur, elle décide, soit de faire procéder à la communication prévue par le troisième alinéa de l'article 7 du décret, soit en application du quatrième alinéa de cet article, d'informer le requérant qu'il ne figure pas dans le fichier ;
Considérant que M. X... a saisi, par lettre du 21 mai 1995, la Commission nationale de l'informatique et des libertés d'une demande tendant à ce que lui soient communiquées les informations le concernant contenues dans les fichiers des renseignements généraux ; que le président de la Commission nationale de l'informatique et des libertés lui a fait savoir, par lettre du 26 septembre 1995, que l'un des membres de la commission chargé de l'exercice du droit d'accès indirect avait procédé aux vérifications demandées, en application de l'article 39 de la loi du 6 janvier 1978 ;
Considérant que, rapprochée des termes de la demande formulée par M. X..., la lettre du 26 septembre 1995 doit être regardée comme l'informant qu'une décision de refus de communication lui était opposée ; qu'à défaut dans le texte de la lettre de précisions faisant apparaître que la demande de l'intéressé aurait été soumise à la commission sur le fondement soit du troisième, soit du quatrième alinéa de l'article 7 du décret du 14 octobre 1991, le refus de communication s'analyse, eu égard aux dispositions précitées du cinquième alinéa de l'article 7 dudit décret, en une décision du ministre de l'intérieur s'opposant à la communication au requérant des informations le concernant ; qu'aucune disposition ne donne compétence au Conseil d'Etat pour connaître en premier et dernier ressort des conclusions tendant à l'annulation du refus ainsi opposé à l'intéressé ; qu'il y a lieu, par suite, en application des dispositions de l'article R. 46 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, de transmettre la requête susvisée de M. X... au tribunal administratif de Paris ;
Article 1er : Le jugement des conclusions de la requête de M. X... est attribué au tribunal administratif de Paris.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Pascal X..., à la Commission nationalede l'informatique et des libertés, au président du tribunal administratif de Paris et au ministre de l'intérieur.