Vu la requête, enregistrée le 27 octobre 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES, dont le siège est ... (75116) ; la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 1er octobre 1998 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa saisine relative au compte de campagne de M. Jean-Paul X..., candidat à l'élection cantonale de la Somme (Canton d'Amiens VII Sud-Ouest) qui s'est déroulée le 22 mars 1998 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral modifié notamment par la loi n° 96-300 du 10 avril 1996 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lambron, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 52-8 du code électoral : "Les dons consentis par une personne physique dûment identifiée pour le financement de la campagne d'un ou plusieurs candidats lors des mêmes élections ne peuvent excéder 30 000 F. Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués" ; qu'aux termes de l'article L. 52-15 du même code : "La commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne ( ...) Lorsque la commission a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté ou si, le cas échéant, après réformation, il fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales, la commission saisit le juge de l'élection" ; que l'article L. 118-3 du code électoral, dans sa rédaction issue de la loi du 10 avril 1996, dispose que "Saisi par la commission instituée par l'article L. 52-14, le juge de l'élection peut déclarer inéligible pendant un an le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales. Dans les autres cas, le juge de l'élection peut ne pas prononcer l'inéligibilité du candidat dont la bonne foi est établie ou relever le candidat de cette inéligibilité. Si le juge de l'élection a déclaré inéligible un candidat proclamé élu, il annule son élection ou, si l'élection n'a pas été contestée, le déclare démissionnaire d'office" ; qu'enfin, selon l'article L. 197 du code électoral, applicable à l'élection des conseillers généraux, "Peut être déclaré inéligible pendant un an celui qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits par l'article L. 52-12 et celui dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit" ;
Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 52-8 du code électoral, dans leur rédaction issue de la loi du 19 janvier 1995, ont pour effet d'interdire aux personnes morales, qu'il s'agisse de personnes publiques ou de personnes morales de droit privé, à l'exception des partis ou groupements politiques, de consentir à un candidat des dons en nature ou en espèces, sous quelque forme et de quelque montant que ce soit ; que, toutefois, ni l'article L. 52-15 ni aucune autre disposition législative n'obligent la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES à rejeter le compte d'un candidat faisant apparaître qu'il a bénéficié de la part de personnes morales d'un avantage prohibé par l'article L. 52-8 ; qu'il lui appartient, sous le contrôle du juge de l'élection, d'apprécier si, compte tenu notamment des circonstances dans lesquelles le don a été consenti et de son montant, sa perception doit entraîner le rejet du compte et, le cas échéant, et par application de l'article L. 197 du code électoral, l'inéligibilité du candidat dont il s'agit ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Jean-Paul X..., candidat aux élections cantonales dans le canton d'Amiens (7ème, Sud-Ouest), qui se sont déroulées le 22 mars 1998 dans une circonscription où le plafond des dépenses électorales s'élevait à 81 846 F, a reçu des contributions versées par trois entreprises pour un montant total de 2 800 F ; qu'il a ainsi bénéficié de la part de trois personnes morales de droit privé de dons prohibés par l'article L. 52-8 du code électoral ; que, toutefois, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu notamment du faible montant des dons consentis, il n'y a pas lieu de prononcer le rejet du compte de campagne et l'inéligibilité de M. X... ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a décidé qu'il n'y avait pas lieu de rejeter le compte de campagne de M. X... et de déclarer ce dernier inéligible aux fonctions de conseiller général pour une durée d'un an ;
Article 1er : La requête de la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES, à M. Jean-Paul X... et au ministre de l'intérieur.