Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 22 janvier et 22 mai 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA COTE-D'OR, dont le siège est ... (21203 Cedex), et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule l'arrêt n° 93NC00794 du 9 novembre 1995 de la cour administrative d'appel de Nancy, en tant que celle-ci a rejeté les conclusions subsidiaires de sa requête tendant à obtenir, au titre de la compensation prévue par l'article L. 205 du livre des procédures fiscales, une réduction des compléments de taxe sur les salaires auxquels elle a été assujettie au titre des années 1987, 1988 et 1989 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code rural ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Salat-Baroux, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA COTE-D'OR,
- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de la procédure suivie devant la cour administrative d'appel de Nancy :
Considérant qu'il ressort de l'examen du dernier mémoire, enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy le 3 août 1995, qu'elle a produit devant cette Cour, que l'administration ne faisait qu'y reprendre les moyens de défense qu'elle avait précédemment invoqués dans des mémoires précédents, sans apporter d'éléments nouveaux au débat ; que, dans ces conditions, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA COTE-D'OR n'est pas fondée à soutenir que, du fait qu'elle n'a pas été mise en mesure de répondre à ce mémoire, l'arrêt attaqué aurait été rendu au terme d'une procédure irrégulière ;
Sur le bien-fondé de l'arrêt :
Considérant qu'aux termes des deux premières phrases du premier alinéa du I de l'article 231 du code général des impôts : "Les sommes payées à titre de traitements, salaires, indemnités et émoluments, y compris la valeur des avantages en nature, sont soumises à une taxe sur les salaires ..., à la charge des personnes ou organismes ..., qui paient ces traitements, salaires, indemnités et émoluments lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année précédant celles du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total" ; que les troisième et quatrième phrases qui ont été ajoutées au même alinéa du 1. de l'article 231 par le I. de l'article 18 de la loi de finances rectificative pour 1993, n° 93-1353 du 30 décembre 1993, et dont, aux termes du II du même article, les dispositions "ont un caractère interprétatif et s'appliquent aux instances en cours, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée", précisent, notamment, que "le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'(entend) du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée" et que "le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le montant du chiffre d'affaires provenant de la réalisation d'opérations consistant en "l'octroi et la négociation de crédits" que le 1° a) de l'article 261 C du code général des impôts exonère de la taxe sur la valeur ajoutée, doit, dans le cas des établissements bancaires qui, au cours de l'année civile de référence définie dans la première phrase du premier alinéa du 1. de l'article 231, précitée, se sont livrés, d'une part, à ces opérations et, le cas échéant, à d'autres opérations exonérées de la taxe sur la valeurajoutée ou placées hors du champ d'application de cet impôt, d'autre part, et pour plus de 10 % de leur chiffre d'affaires total, à des opérations au titre desquelles ils ont été assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée, être pris en compte tant dans le numérateur que dans le dénominateur du rapport défini au premier alinéa du 1. de l'article 231, et calculé conformément aux dispositions, ci-dessus rappelées, qui ont été ajoutées à cet alinéa par l'article 18 de la loi de finances rectificative pour 1993, entré en vigueur à la date de l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Nancy, en retenant le total des "recettes et autres produits" perçus par ces établissements en rémunération des prêts accordés, c'est-à-dire par l'ensemble des sommes, et notamment, par les intérêts, que les emprunteurs leur ont versés, sans qu'il y a ait lieu d'en déduire les frais que les mêmes établissements ont pu devoir exposer pour se procurer les fonds prêtés ;
Considérant qu'il découle de ce qui précède qu'en jugeant que, dans le cas des prêts consentis par les caisses régionales de crédit agricole mutuel, il y avait lieu de prendre en compte, tant dans le numérateur que dans le dénominateur du rapport défini par le premier alinéa du 1. de l'article 231 du code général des impôts, le montant des intérêts effectivement versés par les emprunteurs, sans qu'en soient déduites les charges financières supportées par ces caisses au titre des avances de la Caisse nationale de crédit agricole, prévues par l'article 648 du code rural, qui constituaient la source du financement de certains de ces prêts, la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas commis d'erreur de droit ; que, par suite, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA COTE-D'OR n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt de cette Cour, en tant que celle-ci, après avoir rejeté les conclusions principales de sa requête qui tendaient à la décharge des compléments de taxe sur les salaires auxquels elle a été assujettie au titre des années 1987, 1988 et 1989, en conséquence des redressements dont elle a fait l'objet en ce qui concerne le montant du chiffre d'affaires tiré d'opérations de change manuel à retenir pour le calcul du rapport défini par le 1. de l'article 231 du code général des impôts, a rejeté aussi les conclusions subsidiaires dont elle l'avait saisie en vue d'obtenir, au titre de la compensation prévue par l'article L. 205 du livre des procédures fiscales, une réduction de ces impositions, devant, selon elle, résulter de la prise en compte, dans le calcul de ce rapport, de la seule différence entre les intérêts des prêts consentis par elle sur des fonds avancés par la Caisse nationale de crédit agricole et les charges financières afférentes à ces avances ;
Article 1er : La requête de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA COTE-D'OR est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA COTE-D'OR et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.