Vu, 1°/ sous le n° 167731, la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 7 mars 1995, présentée par M. X... et Mme Aïcha Y..., demeurant ... ; M. et Mme Y... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 février 1995 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté leur demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des décisions du 27 septembre 1994 par lesquelles le préfet de la Haute-Marne leur a refusé le renouvellement de leur carte de résident et les a invités à quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;
2°) d'annuler lesdites décisions ;
3°) de décider qu'il soit sursis à l'exécution desdites décisions ;
Vu, 2°/ sous le n° 168810, la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 19 avril 1995, présentée pour Mme Aïcha Y... ; Mme Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 février 1995 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 27 septembre 1994 par laquelle le préfet de la Haute-Marne lui a refusé le renouvellement de sa carte de résident et l'a invitée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu, 3°/ sous le n° 168812, la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 19 avril 1995, présentée pour M. X... DAOUD ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 février 1995 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 27 septembre 1994 par laquelle le préfet de la Haute-Marne lui a refusé le renouvellement de sa carte de résident et l'a invité à quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention franco-algérienne du 27 décembre 1968 ;
Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Bordry, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Parmentier, avocat des époux Y...,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de M. et Mme Y... sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens des requêtes :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention franco-algérienne signée le 27 décembre 1968, dans sa rédaction en vigueur à la date des décisions attaquées : "les ressortissants algériens titulaires d'un certificat de résidence, qui auront quitté le territoire français pendant une période supérieure à six mois consécutifs, seront, s'ils y reviennent, considérés comme nouveaux immigrants" ;
Considérant que, pour refuser de renouveler les certificats de résidence de M. et Mme Y..., le préfet de la Haute-Marne s'est fondé sur la circonstance que les intéressés n'avaient pas répondu à sa demande de production de pièces justifiant leur présence en France de 1989 à octobre 1993 pour M. Y... et 1994 pour Mme Y... ; que les intéressés ont produit devant le Conseil d'Etat plusieurs documents de nature à établir qu'ils résidaient à Marseille au cours de cette période ; que le ministre de l'intérieur n'a pas contesté la valeur probante de ces documents ; qu'ainsi, le motif des décisions attaquées tiré de ce que M. et Mme Y... auraient quitté le territoire français pendant une période supérieure à six mois consécutifs repose sur une appréciation erronée des faits de l'espèce ; que M. et Mme Y... sont, dès lors, fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces décisions ;
Considérant que les motifs de la présente décision n'impliquent pas que soit prononcée une injonction sous astreinte tendant au renouvellement de ces certificats de résidence ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer aux requérants la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne du 14 janvier 1995 et les deux arrêtés du préfet de la Haute-Marne du 27 septembre 1994 sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. et Mme Y... est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X... et Mme Aïcha Y... et au ministre de l'intérieur.