Vu la requête enregistrée le 25 juillet 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Marie-Claude Y..., demeurant ... ; Mme WEISBECKER demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 4 mai 1995 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du 16 mars 1993 du tribunal administratif d'Orléans qui a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre des années 1983 à 1986 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme de Saint-Pulgent, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat de Mme Y...,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, pour demander à la cour administrative d'appel de Nantes d'annuler le jugement du 16 mars 1993, par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre des années 1983 à 1986, Mme WEISBECKER s'était notamment prévalue, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction administrative 5D-I-77 du 4 février 1977 et de la réponse ministérielle faite le 3 mars 1979 à une question écrite de M. X..., député ; que la cour a rejeté la requête de Mme WEISBECKER sans répondre à ce moyen ; que, dès lors, Mme WEISBECKER est fondée à soutenir que l'arrêt attaqué est entaché d'omission à statuer et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11, deuxième alinéa, de la loi du 31 décembre 1987, de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'aux termes des dispositions, applicables en l'espèce, de l'article 156 du code général des impôts : "L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu est établi ... sous déduction : I. Du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la cinquième année inclusivement. Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation ... 3° des déficits fonciers, lesquels s'imputent exclusivement sur les revenus fonciers des cinq années suivantes ... ; cette disposition n'est pas applicable aux propriétaires d'immeubles ayant fait l'objet de travaux exécutés dans le cadre d'une opération groupée de restauration immobilière faite en application des dispositions des articles L. 313-1 à L. 313-15 du code de l'urbanisme ..." ; que l'article 156I-3° se réfère ainsi, notamment, aux dispositions de l'article L. 313-3 du code de l'urbanisme, selon lesquelles les opérations de restauration d'immeubles situés à l'intérieur de "secteurs sauvegardés" créés et délimités aux fins et selon la procédure prévue à l'article L. 313-1 du même code, peuvent, en particulier, être décidées et exécutées "à l'initiative" de plusieurs propriétaires, "groupés ou non en association syndicale", auquel cas ceux-ci doivent y être "spécialement autorisés dans des conditions qui seront fixées par un décret en Conseil d'Etat qui précise notamment les engagements exigés d'eux quant à la nature et l'importance des travaux", l'article R. 313-25 du même code précisant que l'autorisation, délivrée par le préfet, doit toujours être expresse ;
Considérant qu'il résulte notamment de la combinaison de ces diverses dispositions que sont seuls autorisés à imputer sur leur revenu global les déficits fonciers provenant de dépenses de restauration d'immeubles situés dans un "secteur sauvegardé", les propriétaires de ces immeubles qui ont obtenu, préalablement à l'engagement des travaux, l'autorisation spéciale exigée par l'article L. 313-3 du code de l'urbanisme, la délivrance dupermis de construire ne pouvant tenir lieu de cette autorisation ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les dépenses qui sont à l'origine des déficits fonciers que Mme WEISBECKER a demandé à imputer sur son revenu global des années 1983 à 1986 ont été exposées en vue de la restauration d'un immeuble lui appartenant sis ..., dans le "secteur sauvegardé" de Tours ; que, toutefois, l'autorisation spéciale exigée par l'article L. 313-3 précité ne lui a été accordée, le 26 décembre 1989, qu'après l'achèvement des travaux ; qu'ainsi et alors même que cette autorisation spéciale avait été demandée avant l'engagement des travaux et que ceux-ci ont fait l'objet d'un permis de construire, Mme WEISBECKER ne remplit pas les conditions fixées par l'article 156-1-3° du code général des impôts pour bénéficier de l'imputation prévue par cet article ;
Considérant que, ni l'instruction 5-D-I-77 du 4 février 1977, sur l'imputation des déficits fonciers, ni la réponse ministérielle à M. X..., qu'invoque Mme WEISBECKER, ne donnent des dispositions précitées du code général des impôts une interprétation différente de celle qui ressort de ce qui a été ci-dessus ; que Mme WEISBECKER ne peut donc s'en prévaloir utilement sur le fondement de l'article L. 80-A du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme WEISBECKER n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par son jugement du 16 mars 1993, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme WEISBECKER la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 4 mai 1995 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par Mme WEISBECKER devant la cour administrative d'appel de Nantes est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme WEISBECKER est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Marie-Claude WEISBECKER et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.