Vu, enregistrés le 30 mai et le 28 juillet 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, le recours et le mémoire complémentaire présentés par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 mars 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a, à la demande de Mme Jacqueline X..., déclaré nulle et non avenue la décision du 20 avril 1994 par laquelle le préfet de police a refusé la réouverture du studio dont elle est propriétaire au ... ;
2°) de rejeter la demande de Mme X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code pénal ;
Vu le code des communes ;
Vu l'arrêté des Consuls du 12 Messidor an VIII ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Blanc, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Hubac, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un arrêté du 26 octobre 1993, le préfet de police a ordonné la fermeture d'un local situé ... (1er) appartenant à Mme Jacqueline X..., au motif que ce local servait à des activités contraires à la morale et à l'ordre public ; qu'en exécution de cet arrêté, une société a, sur l'ordre de la préfecture de police, procédé le 3 novembre 1993 au murage de la porte de ce local ; que, par procès-verbal du 20 avril 1994 notifié le même jour à Mme X..., le préfet de police a refusé à l'intéressée qu'il soit mis fin à la condamnation de cette porte ;
Considérant qu'en l'absence d'une disposition législative le permettant expressément et en dehors de situations d'urgence dûment établie, il n'appartient pas à l'administration d'assurer elle-même l'exécution forcée de ses décisions alors que leur éventuelle violation est passible de sanctions pénales ;
Considérant qu'en refusant à Mme X..., par la décision susmentionnée du 20 avril 1994, de lui rendre le libre usage de son appartement, le préfet de police a illégalement porté atteinte à son droit de propriété et, de la sorte, pris une décision manifestement insusceptible de se rattacher à l'exercice d'un pouvoir appartenant à l'administration ; que cette décision est constitutive d'une voie de fait et qu'elle doit, par suite, être regardée comme nulle et non avenue ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 10 mars 1995, le tribunal administratif de Paris a déclaré nulle et non avenue la décision du 20 avril 1994 du préfet de police ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à Mme Jacqueline X....