Vu l'ordonnance en date du 24 juin 1994, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 30 juin 1994, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à cette Cour par la SARL J.D. GAMBETTA ;
Vu la demande, enregistrée le 6 juin 1994 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, présentée par la SARL J.D. GAMBETTA, dont le siège social est ..., représentée par son gérant en exercice, et tendant à :
1°) l'annulation du jugement du 10 février 1994 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande dirigée contre la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de quatre mois par le préfet de la Gironde sur sa demande tendant à l'abrogation de l'arrêté du 25 février 1980 portant fermeture collective hebdomadaire des salons de coiffure du département ;
2°) l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n° 53-1169 du 28 novembre 1953 modifié, notamment par le décret n° 72-143 du 22 février 1972 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de Bellescize, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que l'autorité compétente, saisie d'une demande tendant à l'abrogation d'un règlement illégal, est tenue d'y déférer, soit que ce règlement ait été illégal dès la date de sa signature, soit que l'illégalité résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date ; que la SARL J.D. GAMBETTA, par lettre reçue en préfecture le 6 juillet 1992, a demandé au préfet de la Gironde d'abroger son arrêté du 25 février 1980 ordonnant la fermeture au public des salons de coiffure de tout le département de la Gironde pendant la journée du lundi ; que le préfet de la Gironde n'ayant pas répondu à cette demande dans le délai de quatre mois, il en est résulté une décision implicite de rejet, dont la SARL J.D. GAMBETTA a demandé l'annulation pour excès de pouvoir ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 221-4 du code du travail : "Le repos hebdomadaire doit avoir une durée minimale de vingt-quatre heures consécutives" et que, selon l'article L. 221-5 : "Le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche" ; qu'en vertu de l'article L. 221-17 du même code, lorsqu'un accord est intervenu entre les syndicats d'employeurs et de travailleurs d'une profession et d'une région déterminées sur les conditions dans lesquelles le repos hebdomadaire est donné au personnel suivant un des modes prévus à la date de l'intervention de l'arrêté litigieux, par les articles L. 221-6 et suivants, le préfet du département peut, par arrêté, sur la demande des syndicats intéressés, ordonner la fermeture au public des établissements de la profession ou de la région pendant toute la durée de ce repos ;
Considérant que si les articles L. 221-4 et L. 221-5 précités du code du travail ne font pas obstacle à ce que l'employeur accorde à son personnel un repos hebdomadaire supérieur à 24 heures, les articles L. 221-6 et suivants ont seulement pour but de prévoir les diverses modalités selon lesquelles le repos minimum de 24 heures doit être donné ; qu'il résulte de l'article L. 221-17 précité que la fermeture obligatoire qu'il prévoit ne peut être imposée par le préfet que pendant la durée dudit repos minimum ;
Considérant que les accords syndicaux des 14 juin 1974 et 17 décembre 1979 au vu desquels le préfet a édicté l'arrêté litigieux avaient pour objet, non de fixer au lundi le jour du repos hebdomadaire dans les salons de coiffure du département, par dérogation à la règle du repos dominical, mais de demander au préfet d'ordonner la fermeture obligatoire de tous lessalons de coiffure le lundi, qui restaient tenus de donner le repos hebdomadaire le dimanche en application de l'article L. 221-5 ; qu'en donnant suite à cette demande par l'arrêté litigieux, alors que le lundi n'était pas le jour où était donné le repos hebdomadaire dans la profession en cause, le préfet de la Gironde avait excédé les pouvoirs qu'il tenait de l'article L. 221-17 du code du travail ; que, par suite, la SARL J.D. GAMBETTA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de quatre mois par le préfet de la Gironde sur sa demande tendant à l'abrogation de l'arrêté du 25 février 1980 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 10 février 1994, ensemble la décision de rejet née du silence gardé pendant plus de quatre mois par le préfet de la Gironde sur la demande de la SARL J.D. GAMBETTA tendant à l'abrogation de l'arrêté du 25 février 1980 portant fermeture collective hebdomadaire des salons de coiffure du département, sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SARL J.D. GAMBETTA et au ministre de l'emploi et de la solidarité.