Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 avril et 21 juillet 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION DU DOMAINE DE BARRIOL, dont le siège social est au Domaine de Barriol à Valréas (84600) ; la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION DU DOMAINE DE BARRIOL demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 15 février 1993 par lequel le tribunal administratif de Marseille a constaté qu'aucune décision implicite d'autorisation d'exploiter n'a été acquise à l'expiration d'un délai de deux mois et quinze jours à compter de la demande dont le préfet de Vaucluse a été saisi le 24 février 1989 par la société requérante ;
2°) de rejeter la demande des consorts X... ;
3°) de condamner les consorts X... à lui verser une somme de 8.000 Francs au titre de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, et notamment son article 75-I ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Thiellay, Auditeur,
- les observations de Me Jacoupy, avocat de la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE DU DOMAINE DE BARRIOL,
- les conclusions de Mme Pécresse, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les dispositions de l'article 188-2 du code rural, dans sa rédaction alors en vigueur résultant de la loi du 1er août 1984, soumettent à autorisation préalable du préfet, après avis de la commission départementale des structures agricoles, les cumuls et réunions d'exploitations agricoles répondant à certaines conditions et qu'aux termes de l'article 188-5 du même code : "L'autorisation est réputée accordée si la décision n'a pas été notifiée au demandeur dans un délai de deux mois et quinze jours à compter de la réception de la demande" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE DU DOMAINE DE BARRIOL, dont les membres souhaitaient reprendre l'exploitation des terres mises en valeur par M. et Mme Jean X... et M. et Mme Serge X..., pour une superficie totale de 41 hectares 85 ares, ont formé une demande d'autorisation de cumul parvenue au directeur départemental de l'agriculture et de la forêt de Vaucluse le 24 février 1989, en fournissant tous les renseignements demandés par l'administration dans l'imprimé constituant la demande ; que le délai de deux mois et quinze jours s'étant écoulé sans que le préfet ait notifié une décision expresse à la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE DU DOMAINE DE BARRIOL, celle-ci est devenue titulaire d'une autorisation de cumul par décision implicite du 9 mai 1989 ; que la circonstance que les consorts X... n'auraient pas été consultés sur l'opération envisagée est sans influence sur l'existence de cette décision implicite ; qu'ainsi le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 15 février 1993 qui, dans l'article 1er de son dispositif a constaté qu'aucune décision implicite d'autorisation n'a été acquise, doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par les consorts X... devant le tribunal administratif de Marseille ;
Considérant qu'aux termes de l'article 188-5 du code rural dans sa rédaction alors en vigueur : "L'autorisation prévue à l'article 188-2 est délivrée, après avis de la commission départementale des structures agricoles, par le représentant de l'Etat dans le département sur le territoire duquel est situé le fonds pour lequel l'autorisation d'exploiter est sollicitée ( ...)" ; qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'autorisation de cumul présentée par la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE DU DOMAINE DE BARRIOL n'a pas été transmise à la commission départementale des structures agricoles du Vaucluse ; qu'ainsi, l'autorisation implicite de cumul est née, le 9 mai 1989, à la suite d'uneprocédure irrégulière ; que, par suite, elle doit être annulée ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que les consorts X..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnés à verser à la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE DU DOMAINE DE BARRIOL la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE DU DOMAINE DE BARRIOL à payer aux consorts X... la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement en date du 15 février 1993 du tribunal administratif de Marseille est annulé.
Article 2 : La décision implicite d'autorisation de cumul du préfet de Vaucluse accordée à la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE DU DOMAINE DE BARRIOL est annulée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE DU DOMAINE DE BARRIOL est rejeté.
Article 4 : La SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE DU DOMAINE DE BARRIOL versera aux consorts X... 8 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE DU DOMAINE DE BARRIOL, aux consorts X... et au ministre de l'agriculture et de la pêche.