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16/06/1997 | FRANCE | N°158971

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 16 juin 1997, 158971


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er juin 1994 et 3 octobre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Cornélie X..., demeurant ..., Mme Valérie X..., demeurant ... et M. Julien X..., demeurant ... ; les consorts X... demandent au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt en date du 31 mars 1994 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté leur demande tendant d'une part à l'annulation du jugement du 28 octobre 1992 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la condamnation

de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris à leur verser ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er juin 1994 et 3 octobre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Cornélie X..., demeurant ..., Mme Valérie X..., demeurant ... et M. Julien X..., demeurant ... ; les consorts X... demandent au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt en date du 31 mars 1994 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté leur demande tendant d'une part à l'annulation du jugement du 28 octobre 1992 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris à leur verser une indemnité de 2 000 000 F en réparation du préjudice subi du fait du décès de M. Jean X... des suites de sa contamination par le virus de l'immuno-déficience humaine assortie des intérêts capitalisés à compter du 23 août 1988 et d'autre part la somme de 118 609 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Laigneau, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez , avocat de Mme X... et autres et de Me Foussard, avocat de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris,
- les conclusions de Mme Pécresse, Commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la santé :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 53-3 du décret du 30 juillet 1963 : "Lorsque la requête ou le recours mentionne l'intention du requérant ou du ministre de présenter un mémoire complémentaire, la production annoncée doit intervenir dans le délai de quatre mois à compter de la date à laquelle la requête a été enregistrée ..." ; que le délai de quatre mois ainsi institué est un délai franc ; qu'il ressort des pièces du dossier que la requête sommaire présentée par les consorts X... a été enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 1er juin 1994 et que le mémoire complémentaire l'a été le lundi 3 octobre 1994 ; que les consorts X... ne sauraient dès lors être regardés comme s'étant désistés de leur requête ;
Sur les conclusions des consorts X... dirigées contre l'Etat :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les consorts X... avaient saisi la cour administrative d'appel de conclusions dirigées contre l'Etat ; que la Cour n'a pas statué sur ces conclusions et a donc entaché sur ce point son arrêt d'irrégularité ; qu'il y a lieu d'annuler pour ce motif l'arrêt attaqué en tant qu'il a omis de statuer sur lesdites conclusions ;
Sur les conclusions dirigées contre l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris :
Considérant que pour rejeter la demande présentée par les consorts X... tendant à la condamnation de l'Assistance publique à Paris à indemniser le préjudice résultant de la contamination par le virus de l'immuno-déficience humaine de M. Jean X..., lors d'une intervention chirurgicale réalisée à l'hôpital Broussais le 13 décembre 1984, après avoir estimé que la responsabilité de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris n'était pas engagée en l'absence de toute faute pouvant lui être imputée, la cour administrative d'appel de Paris a jugé "qu'en raison du nombre important de contaminations par le virus de l'immuno-déficience humaine à la suite de transfusions sanguines à l'époque des faits, le préjudice invoqué par les requérants ne peut être regardé comme revêtant un caractère spécial de nature à engager la responsabilité sans faute de l'Assistance publique" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'hôpital Broussais où a eu lieu l'intervention chirurgicale pratiquée sur M. X..., n'a pas de personnalité juridique distincte de celle du centre de transfusion sanguine de l'hôpital de La Pitié-Salpétrière d'où provenaient les produits sanguins injectés à ce dernier ; que ces deux établissements relèvent de la même personne morale, l'Assistance publique à Paris ; qu'il en résulte que la responsabilité de l'hôpital doit être recherchée non seulement, comme la Cour l'a fait, sur le fondement des principes qui gouvernent la responsabilité des hôpitaux en tant que dispensateurs de prestations médicales mais aussi, au cas d'espèce, sur la base des règles propres à son activité de gestionnaire d'un centre de transfusion sanguine ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de la loi du 21 janvier 1952 modifiée par la loi du 2 août 1961, les centres de transfusion sanguine ont le monopole des opérations de collecte du sang et ont pour mission d'assurer le contrôle médical des prélèvements, le traitement, le conditionnement et la fourniture aux utilisateurs de produits sanguins ; qu'eu égard tant à la mission qui leur est confiée par la loi qu'aux risques que présente la fourniture de produits sanguins, les centres de transfusions sont responsables, même en l'absence de faute, des conséquences dommageables de la mauvaise qualité des produits fournis ;
Considérant qu'en jugeant que la responsabilité de l'administration générale de l'Assistance publique à Paris à l'égard de M. X... ne pouvait être engagée sur le terrain de la responsabilité sans faute alors qu'elle aurait dû rechercher la responsabilité de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris, en tant que fournisseur d'un produit sanguin vicié, la cour administrative d'appel de Paris a fait une inexacte application des règles qui régissent la responsabilité des collectivités publiques ; que son arrêt doit par suite être également annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions dirigées contre l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris ;
Considérant qu'il y a lieu de renvoyer l'affaire devant la cour administrative d'appel de Paris ;
Article 1er : L'arrêt du 31 mars 1994 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mmes Cornélie et Valérie X..., à M. Julien X..., à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris, au président de la cour administrative d'appel de Paris et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 5 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 158971
Date de la décision : 16/06/1997
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTE.

SANTE PUBLIQUE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - RESPONSABILITE DES HOPITAUX (VOIR RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE).


Références :

Décret 63-766 du 30 juillet 1963 art. 53-3
Loi 52-854 du 21 janvier 1952
Loi 61-846 du 02 août 1961


Publications
Proposition de citation : CE, 16 jui. 1997, n° 158971
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mlle Laigneau
Rapporteur public ?: Mme Pécresse

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:158971.19970616
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