Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au président de la section du Contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 18 mars 1996 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 11 mars 1996 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Rachid X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Bonnot, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions relatives à l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° -Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° -Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant que si M. X..., de nationalité algérienne, né en 1963, célibataire et sans enfant, fait valoir que sa mère, titulaire d'une carte de résident, et ses demi-frères de nationalité française, vivent en France et qu'il n'a plus de véritables attaches familiales en Algérie, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions du séjour de M. X... en France et de ses liens avec l'Algérie, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du PREFET DE POLICE du 11 mars 1996 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par ailleurs, M. X... ne saurait invoquer des circonstances postérieures à la date de l'arrêté attaqué ; qu'ainsi, le PREFET DE POLICE n'a pas fait une appréciation manifestement erronée des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de M. X... ;
Sur les conclusions relatives à la décision de reconduite de M. X... vers son pays d'origine :
Considérant que l'existence d'une décision ordonnant la reconduite de M. X... vers son pays d'origine doit être regardée comme établie par les mentions figurant dans la notification de l'arrêté de reconduite ;
Considérant que si M. X... invoque les risques qu'il courrait en cas de retour dans son pays d'origine, les justificatifs qu'il produit ne sont pas, en tout état de cause, relatifs à des menaces dont il aurait fait personnellement l'objet ; qu'ainsi, M. X... ne justifie d'aucune raison qui fasse obstacle à sa reconduite à destination du pays dont il a la nationalité et ne peut, en tout état de cause, soutenir que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme auraient été méconnues ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 18 mars 1996 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 11 mars 1996 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris du 18 mars 1996 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Rachid X... et au ministre de l'intérieur.