Vu la requête, enregistrée le 23 octobre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Elisabeth X..., demeurant chez M. Y..., 25, square de la Rouvraie à Cergy-Saint-Christophe (95800) ; Mlle X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 17 février 1995 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 1995 par lequel le préfet du Val-d'Oise a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;
3°) d'ordonner le sursis à exécution dudit arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de M. Gaeremynck, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X..., ressortissante haïtienne, vit, depuis son entrée en France en 1983, au domicile de sa soeur et de son beau-frère, titulaires l'un et l'autre d'une carte de résident ; que le frère de Mlle X... séjourne également en France sous couvert d'une telle carte ; que Mlle X... soutient, sans être contredite, que toutes ses attaches familiales sont désormais en France ; que, dans ces conditions, l'arrêté attaqué en date du 14 février 1995 du préfet du Val-d'Oise ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X... a porté au droit de cette dernière au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ledit arrêté a été pris ; qu'il a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 17 février 1995, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 14 février 1995 ;
Article 1er : Le jugement du 17 février 1995 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles, ensemble l'arrêté du 14 février 1995 du préfet du Val-d'Oise décidant la reconduite à la frontière de Mlle X..., sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Elisabeth X..., au préfet du Val-d'Oise et au ministre de l'intérieur.