Vu la requête enregistrée le 25 août 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES YVELINES ; le PREFET DES YVELINES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 12 août 1994 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 2 août 1994 décidant la reconduite à la frontière de M. Dieudonné X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant ledit tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989 et la loi du 10 janvier 1990 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Olson, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. Dieudonné X...,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la demande présentée par M. Dieudonné X... devant le tribunal administratif de Versailles :
Considérant que la présence ou l'absence de la décision complémentaire fixant le pays à destination duquel un étranger peut être reconduit est sans incidence sur la légalité de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière ; que, par suite, c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur l'absence de la décision fixant le pays de destination pour annuler l'arrêté en date du 2 août 1994 par lequel le PREFET DES YVELINES a décidé la reconduite à la frontière de M. X... ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Sur la légalité externe :
Considérant que l'arrêté du 2 août 1994, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la mesure de reconduite à la frontière, est suffisamment motivé ;
Sur la légalité interne :
Considérant que M. X... a reçu le 16 mai 1994 notification, avec l'indication des délais et voies de recours, de la décision du PREFET DES YVELINES du 15 avril 1994 lui retirant la carte de résident ; que cette décision était devenue définitive à la date d'enregistrement au greffe du tribunal administratif de Versailles de la demande d'annulation de l'arrêté du 2 août 1994 décidant sa reconduite à la frontière présentée par M. X... ; que dès lors M. X... n'est pas recevable à exciper de l'illégalité de ladite décision à l'encontre de l'arrêté contesté ;
Considérant que si M. X... fait valoir qu'il vit en France depuis 1981, que ses enfants, dont certains sont nés en France, y sont scolarisés, qu'il y a acquis un appartement, qu'il y exerce une activité professionnelle et y a transféré le centre de ses intérêts familiaux, il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DES YVELINES aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle del'intéressé ni qu'il ait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie familiale et méconnu ainsi l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que n'est invoquée aucune circonstance le mettant dans l'impossibilité d'emmener sa femme et ses enfants avec lui ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES YVELINES est fondé à demander l'annulation du jugement en date du 12 août 1994 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté en date du 2 août 1994 décidant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Article 1er : Le jugement en date du 12 août 1994 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES YVELINES, à M. Dieudonné X... et au ministre de l'intérieur.