Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 2 janvier 1995, présentée par M. X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule pour excès de pouvoir la décision implicite de refus opposé à sa demande du 4 juillet 1994 tendant à la prise en compte de la période de son service national lors de son reclassement dans le corps de conseillers de tribunal administratif ;
2°) condamne l'Etat à lui verser la somme de 2 000 F en application de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du service national et notamment son article 63 ;
Vu la loi du 16 janvier 1941 ;
Vu la loi n° 80-511 du 7 juillet 1980 ;
Vu la loi n° 86-14 du 6 janvier 1986 ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n° 88-938 du 28 septembre 1988 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-984 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Stasse, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la loi susvisée du 6 janvier 1986 : "Les membres du corps des tribunaux administratifs sont recrutés parmi les anciens élèves de l'Ecole Nationale d'Administration, sous réserve des dispositions des articles 8, 9 et 12 de la présente loi." et qu'aux termes de l'article 9 de la même loi : "Le recrutement complémentaire, par voie de concours, des conseillers de deuxième classe et de première classe de tribunal administratif organisé par l'article 1er de la loi n° 80-511 du 7 juillet 1980 relative au recrutement des membres des tribunaux administratifs, est prorogé jusqu'au 31 décembre 1990 ..." ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 7 juillet 1980 : "Jusqu'au 31 décembre 1985, il pourra être procédé au recrutement complémentaire de conseillers de deuxième classe et de première classe de tribunaux administratifs par voie de concours ..." ; et qu'aux termes de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1987 susvisée : "Le recrutement complémentaire, par voie de concours, de conseillers de deuxième et de première classe de tribunal administratif organisé par l'article 1er de la loi susvisée du 7 juillet 1980, est prorogé jusqu'au 31 décembre 1995 ..." ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 16 janvier 1941 : "Les dispositions en vertu desquelles est compté, pour une durée équivalente de services civils, dans le calcul de l'ancienneté de service exigée pour l'avancement, le temps passé sous les drapeaux, ne sont pas applicables aux agents ... nommés dans un cadre administratif, par dérogation temporaire aux règles normales de recrutement, à un grade ou à une classe comportant un traitement autre que celui afférent à la dernière classe de l'emploi du début de ce cadre." ;
Considérant que, suivant le statut particulier des membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel résultant du décret susvisé du 28 septembre 1988, ce corps comporte sept grades ; que l'avancement indiciaire à l'intérieur desdits grades s'effectue d'échelon à échelon, du premier au septième d'entre eux ; que le traitement afférent au premier échelon du grade de conseiller de deuxième classe constitue le traitement correspondant à l'emploi de début de ce corps au sens de la loi du 16 janvier 1941 précitée ;
Considérant que le recrutement complémentaire autorisé par les dispositions susrapellées de l'article 1er de la loi du 7 juillet 1980, bien que conforme à la règle générale du recrutement des fonctionnaires par voie de concours posée à l'article 19 de la loi susvisée du 11 janvier 1984, déroge au recrutement institué à l'article 7 de la loi 6 janvier 1986 ; que si ce mode de recrutement a été prorogé par les dispositions précitées de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1987 le législateur ne lui a pas donné un caractère permanent ; qu'il constitue ainsi une dérogation temporaire aux règles normales de recrutement dans le corps des membres des tribunaux administratifs au sens de la loi du 16 janvier 1941 ;
Considérant que M. X..., précédemment attaché d'administration centrale au Conseil d'Etat a été nommé, au titre du recrutement complémentaire, comme conseiller detribunal administratif de deuxième classe au quatrième échelon de ce grade avec une ancienneté conservée de 5 mois et 15 jours, par arrêté du 25 avril 1994 ; qu'ainsi il a été classé à un grade et à un échelon comportant un traitement autre que celui afférent au premier échelon de l'emploi de début au sens des dispositions susrappelées de la loi susvisée du 16 janvier 1941 ;
Considérant que tous les agents issus du recrutement complémentaire autorisé par l'article 1er de la loi du 7 juillet 1980 sont soumis aux règles de reclassement posées par la loi du 16 janvier 1941 dès lors qu'ils remplissent les conditions posées à son application ; qu'ils ne se trouvent pas, par suite, dans une situation qui méconnaîtrait le principe d'égalité applicable à tous les agents d'une même catégorie ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du vice-président du Conseil d'Etat refusant de prendre en compte l'ancienneté liée au temps qu'il a passé obligatoirement sous les drapeaux pour son classement dans le tableau d'ancienneté des conseillers de seconde classe ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à la condamnation du ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice au versement d'une somme de 2 000 F et du ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice tendant à la condamnation de M. X... au versement d'une somme de 2 000 F :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées de ces mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à verser à M. X... une somme de 2 000 F et, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu de condamner M. X... à verser à l'Etat la somme de 2 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête susvisée de M. X... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au garde des sceaux, ministre de la justice.