Vu la requête sommaire et les mémoires additifs et complémentaires, enregistrés les 22 août 1994 et 25 août 1994 et les 26 septembre 1994 et 3 octobre 1994, au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'association Expressions maghrébines au féminin, dont le siège est ..., représentée par son président en exercice ; l'association Expressions maghrébines au féminin demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision n° 94-325 du 10 mai 1994 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel lui a retiré son autorisation d'exploiter un service de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de la communication ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Salat-Baroux, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lemaître, Monod, avocat de l'association Expressions maghrébines au féminin,
- les conclusions de M. Daël, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 42-3 de la loi du 30 septembre 1986 : "L'autorisation peut être retirée, sans mise en demeure préalable, en cas de modification substantielle des données au vu desquelles l'autorisation avait été délivrée, notamment des changements intervenus dans la composition du capital social ou des organes de direction et dans les modalités de financement" ; qu'aux termes de l'article 42-7 : "Les sanctions prévues aux 2°, 3° et 4° de l'article 42-1 ainsi que celles de l'article 42-3 sont prononcées dans les conditions prévues au présent article. Le vice-président du Conseil d'Etat désigne un membre de la juridiction administrative chargé d'instruire le dossier et d'établir un rapport. Le rapporteur peut présenter des observations orales. Il assiste au délibéré avec voix consultative ..." ; que le rapporteur ainsi chargé de l'instruction a pour mission de donner son opinion sur la réalité des faits reprochés et la qualification qui est susceptible de leur être attribuée ainsi que sur le degré de la sanction que lui paraissent mériter les manquements commis ; que pour l'exercice de sa mission, il n'est pas tenu d'entendre les représentants de l'organisme contre lequel la procédure de sanction a été mise en oeuvre ;
Considérant que, par la décision attaquée en date du 10 mai 1994, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, se fondant sur les dispositions précitées de l'article 42-3 de la loi du 30 septembre 1986, a retiré à l'association Expressions maghrébines au féminin (EMAF) l'autorisation d'exploiter un service de radiodiffusion sonore qui lui avait été accordée par une décision du 25 août 1992 ; qu'il est constant que cette décision n'a pas été précédée de l'instruction prévue par l'article 42-7 précité de la loi du 30 septembre 1986 ; que la circonstance, à la supposer établie, que l'association Expressions maghrébines au féminin n'était plus dotée d'une représentation régulière et qu'ainsi le rapporteur n'aurait pu conduire une procédure contradictoire n'est pas à elle seule de nature à rendre sans objet la procédure d'instruction prévue par l'article 42-7 de la loi du 30 septembre 1986 ; que, dès lors, l'association Expressions maghrébines au féminin est fondée à soutenir que la décision attaquée a été prise à la suite d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;
Article 1er : La décision n° 94-325 du 10 mai 1994 du Conseil supérieur de l'audiovisuel est annulée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association Expressions maghrébines au féminin, au Conseil supérieur de l'audiovisuel et au ministre de la communication.