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03/10/1994 | FRANCE | N°109075

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 03 octobre 1994, 109075


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 juillet 1989 et 17 août 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la S.A. DRESSER PRODUITS INDUSTRIELS (D.P.I.) dont le siège social est ..., représentée par son président-directeur-général en exercice domicilié au dit siège, et venant aux droits de la société Worthington Turbodyne S.A. ; la société demande que le Conseil d'Etat annule un jugement en date du 19 mai 1989 par lequel le tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de M. X... tendant à l'annulation

de la décision en date du 29 mai 1987 par laquelle le ministre des af...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 juillet 1989 et 17 août 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la S.A. DRESSER PRODUITS INDUSTRIELS (D.P.I.) dont le siège social est ..., représentée par son président-directeur-général en exercice domicilié au dit siège, et venant aux droits de la société Worthington Turbodyne S.A. ; la société demande que le Conseil d'Etat annule un jugement en date du 19 mai 1989 par lequel le tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de M. X... tendant à l'annulation de la décision en date du 29 mai 1987 par laquelle le ministre des affaires sociales et de l'emploi a annulé la décision du 6 janvier 1987 de l'inspecteur du travail refusant d'autoriser l'entreprise à licencier l'intéressé ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :- le rapport de M. Struillou, Auditeur,
- les observations de Me Delvolvé , avocat de la société anonyme DRESSER PRODUITS INDUSTRIELS (D.P.I.) et de la société Dresser Rand et de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de M. Henri Y...,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'intervention de la société Dresser Rand :
Considérant que la société Dresser Rand qui a repris les activités "turbines et compresseurs spéciaux" exploitées auparavant par la société Worthington Turbodyne S.A. (W.T.S.A.) a intérêt à l'annulation du jugement attaqué ; qu'ainsi son intervention est recevable ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Considérant qu'en vertu de l'article L 425-1 du code du travail, le licenciement d'un délégué du personnel ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ; que l'article L 436-1 du même code subordonne à la même autorisation le licenciement d'un membre du comité d'entreprise ; qu'en vertu de ces dispositions, les salariés concernés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives de l'intéressé ; que dans le cas où la demande est fondée sur un motif économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ; qu'en outre pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve, qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
Considérant que la société Worthington Turbodyne S.A. (W.T.S.A.) a demandé le 11 décembre 1986 l'autorisation de procéder au licenciement pour motif économique de M. X..., délégué du personnel, membre du comité d'établissement et du comité central d'entreprise ; que, par une décision en date du 6 janvier 1987, l'inspecteur du travail a refusé le licenciement de l'intéressé ; que, sur recours hiérarchique, formé par la société, le ministre des affaires sociales et de l'emploi a annulé le 29 mai 1987 la décision de l'inspecteur de travail et autorisé le licenciement de M. X... ; que la société anonyme DRESSER PRODUITS INDUSTRIELS venant aux droits de la société Worthington Turbodyne S.A. fait appel du jugement en date du 19 mai 1989 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du ministre des affaires sociales et de l'emploi ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., à la date à laquelle l'entreprise a sollicité l'autorisation de le licencier, était occupé depuis plus d'un an au bureau d'études "turbines" implanté provisoirement dans l'établissement de Rungis ; que ce bureau d'études devait être transféré à la fin de l'année 1986 à l'établissement du Havre dans le cadre du plan de restructuration décidé par la direction ; que M. X... a refusé ce transfert ; que, dansces conditions, son poste de travail doit être regardé comme supprimé et la réalité du motif économique avancé à l'appui de la demande d'autorisation de licenciement comme établie ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur l'amélioration de la situation économique du secteur des compresseurs spéciaux et du groupe Dresser France pour regarder le motif économique comme dépourvu de réalité ;
Considérant, toutefois, qu'en se bornant à adresser à M. X... une seule proposition que le salarié a acceptée et à laquelle l'employeur n'a pas lui-même donné suite et alors qu'elle n'établit pas qu'elle aurait été dans l'impossibilité d'assurer le reclassement de l'intéressé sur un emploi correspondant à sa qualification dans l'établissement situé à Rungis, notamment dans le secteur des "compresseurs spéciaux" dont le carnet de commandes s'était sensiblement amélioré à compter du dernier trimestre 1986, la société ne peut être regardée comme ayant fait les efforts nécessaires de reclassement lui incombant ; que, dès lors, le ministre des affaires sociales et de l'emploi était pour ce seul motif tenu de refuser l'autorisation sollicitée ; que, par suite, la société anonyme DRESSER PRODUITS INDUSTRIELS n'est pas fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision en date du 29 mai 1987 du ministre des affaires sociales et de l'emploi accordant l'autorisation de licencier l'intéressé ;
Article 1er : L'intervention de la société Dresser Rand est admise.
Article 2 : La requête de la société anonyme DRESSER PRODUITS INDUSTRIELS est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société anonyme DRESSER PRODUITS INDUSTRIELS, à la société Dresser Rand, à M. Henri X... et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES.


Références :

Code du travail L425-1, L436-1


Publications
Proposition de citation: CE, 03 oct. 1994, n° 109075
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Struillou
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Formation : 8 / 9 ssr
Date de la décision : 03/10/1994
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 109075
Numéro NOR : CETATEXT000007869970 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1994-10-03;109075 ?
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