Vu la requête enregistrée le 10 novembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. et Mme X..., demeurant ... les Conflans (54800) ; ils demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 22 octobre 1992 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté leur demande tendant à l'annulation du jugement du 22 octobre 1991 du tribunal administratif de Nancy rejetant leur demande tendant à l'annulation de la décision du 22 avril 1991 par lequel le trésorier payeur général de Meurthe et Moselle a rejeté l'opposition à contrainte qu'ils avaient formée contre le commandement de payer décerné à leur encontre par le percepteur de Jarny pour avoir paiement de l'impôt sur le revenu établi au titre des années 1978 à 1980 ;
2°) les décharges de l'obligation de payer cet impôt ;
3°) d'ordonner la restitution aux requérants de la somme de 42 924 francs augmentée des intérêts moratoires ;
4°) de condamner l'Etat à verser aux exposants une somme de 30 000 francs à titre de dommages et intérêts ;
5°) d'accorder le sursis à l'exécution de l'arrêt attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Le Roy, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Parmentier, avocat de M. et Mme Lino X...,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable à l'espèce : "le contribuable qui conteste le bien fondé ou le montant des impositions mises à sa charge peut être autorisé à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. A l'exception des cas où la réclamation concerne des impositions consécutives à la mise en oeuvre d'une procédure d'imposition d'office ou à des redressements donnant lieu à l'application des pénalités prévues en cas de mauvaise foi ou de manoeuvres frauduleuses, le sursis de paiement est accordé dès lors que le contribuable a constitué des garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor ..." ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : "les comptables du trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle, perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription" ; qu'il résulte de ces dispositions que le délai de prescription ne commence à courir que lorsque l'imposition devient exigible et est interrompu lorsque cette même imposition cesse d'être exigible, notamment lorsque le comptable est mis dans l'impossibilité d'agir en raison du sursis de paiement dont bénéficie le contribuable ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par application des dispositions précitées de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, M. X... a adressé le 14 juin 1983 au directeur des services fiscaux une demande régulière de sursis de paiement des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu établies en vertu d'une procédure d'imposition d'office au titre des années 1978 à 1980 ; que le silence gardé sur cette demande pendant quatre mois valait décision implicite de rejet, conformément aux dispositions de l'article 1er du décret du 11 janvier 1965 ;
Considérant dès lors que si, ainsi que la cour administrative d'appel l'a relevé, ces impositions avaient cessé d'être exigibles à la date de la demande du contribuable, elles l'étaient redevenues à compter de l'intervention de cette décision de rejet laquelle ouvrait au comptable du Trésor un nouveau délai de quatre ans pour exercer son action en recouvrement ; que, par suite, en estimant, pour rejeter la requête de M. X... fondée sur la prescription de cette action à la date de la délivrance, le 24 septembre 1990, d'un commandement de payer qu'en ne notifiant pas de décision refusant le bénéfice du sursis de paiement, le directeur des services fiscaux de Meurthe et Moselle avait renoncé à exercer le pouvoir d'appréciation qu'il tenait des dispositions de l'article L.277 du livre des procédures fiscales alors en vigueur et que l'imposition n'était pas exigible, la cour a entaché sa décision d'une erreur de droit ;
Mais considérant qu'aux termes de l'article R. 281-2 du livre des procédures fiscales, l'opposition à l'obligation de payer "doit, sous peine de nullité, être présentée au trésorier payeur général dans un délai de deux mois à partir de la notification de l'acte si le motif invoqué est un vice de forme ou, s'il s'agit de tout autre motif, dans un délai de deux mois après le premier acte qui permet d'invoquer ce motif" ; qu'il est constant que les époux X... ont reçu, le 26 septembre 1990, le commandement de payer litigieux ; que le délai dans lequel ils pouvaient former opposition à l'obligation de payer expirait le 27 novembre 1990 ; que, dès lors, le ministre du budget fondé à soutenir que l'opposition formée par eux devant le trésorier payeur général le 1er mars 1991 était tardive, et, par suite irrecevable ; que ce motif, qui répond à un moyen invoqué devant le juge du fond et ne comporte l'appréciation d'aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif juridiquement erroné retenu par l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Nancy, dont il justifie légalement le dispositif ;
Article 1er : La requête susvisée de M. et Mme X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme X... et au ministre du budget.