Vu le recours sommaire et le mémoire complémentaire du MINISTRE DELEGUE AU BUDGET enregistrés les 26 août 1991 et 18 décembre 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DELEGUE AU BUDGET demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 19 juin 1991 par lequel le tribunal administratif de Nouméa a annulé, à la demande de M. X..., la décision contenue dans la lettre du 18 janvier 1990 par laquelle le ministre de l'intérieur a fait connaître au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie que M. X... ne pouvait prétendre au bénéfice du régime particulier de retraite institué par la loi du 8 avril 1957, ainsi que, par voie de conséquence, l'arrêté du 7 février 1990 du Haut-Commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, rapportant les dispositions d'un précédent arrêté du 1er juin 1989 admettant M. X... à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 10 février 1990 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Nouméa ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 57-444 du 8 avril 1957 ;
Vu la loi n° 77-412 du 23 décembre 1977 ;
Vu le décret n° 79-441 du 29 mai 1979 ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Bandet, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Pochard, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que la demande présentée devant le tribunal administratif de Nouméa par M. X... tendait non seulement à l'annulation de la décision contenue dans une lettre du 18 janvier 1990 adressée par le ministre de l'intérieur au Haut-Commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie mais également à l'annulation de l'arrêté du Haut-Commissaire en date du 7 février 1990 pris en exécution de la décision ministérielle et retirant un précédent arrêté par lequel il avait admis l'intéressé par anticipation à faire valoir ses droits à la retraite ; que le ministre délégué au budget n'est, dès lors, pas fondé à soutenir qu'en prononçant l'annulation de l'arrêté du 7 février 1990, le tribunal administratif aurait statué au-delà des conclusions dont il était saisi et entaché son jugement d'irrégularité ;
Sur la légalité des décisions attaquées :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 23 décembre 1977 : "Les fonctionnaires du cadre de complément de la police de Nouvelle-Calédonie seront intégrés dans les corps homologues de la police nationale. Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités selon lesquelles il est procédé à ces intégrations qui prendront effet à la date de promulgation de la présete loi" ; que le décret du 29 mai 1979 pris pour l'application de ces dispositions prévoit que : "pour l'appréciation des conditions de service exigées par les statuts des corps de la police nationale, en ce qui concerne l'avancement, la participation aux concours ou examens, ou tout autre avantage de carrière, les services effectifs accomplis dans le cadre de complément par les fonctionnaires intégrés ... sont assimilés à des services effectifs accomplis dans les corps de la police nationale" ;
Considérant que la loi susvisée du 8 avril 1957 a institué un régime particulier de retraite en faveur des personnels actifs de la police ; qu'en vertu de cette loi, lesdits personnels bénéficient d'une part, pour la liquidation de leur pension d'ancienneté ou proportionnelle, d'une bonification d'une durée maximum de cinq ans égale à un cinquième du temps qu'ils ont effectivement passé en position d'activité dans des services actifs de police et ont d'autre part, sous certaines conditions, la possibilité d'être admis à la retraite par anticipation avec attribution d'une pension d'ancienneté après 25 ans de services effectifs ouvrant droit à bonification s'ils se trouvent à moins de cinq ans de la limite d'âge de leur grade ;
Considérant que les avantages ainsi institués constituent des avantages de carrière au sens de l'article 2 du décret du 29 mai 1979 dont les fonctionnaires du cadre de complément de la Nouvelle-Calédonie intégrés dans les corps homologues de la police nationale sont susceptibles d'obtenir le bénéfice et pour la détermination desquels il y a lieu de tenir compte des services qu'ils ont accomplis avant leur intégration dans des emplois actifs du cadre de complément ; que, par suite, la décision du 18 janvier 1990 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé aux policiers issus du cadre de complément la prise en compte des services antérieurs à leur intégration pour l'appréciation de leurs droits aux avantages institués par la loi du 8 avril 1957 et en conséquence a refusé à M. X... le droit à ces avantages, méconnaît l'article 2 précité du décret du 29 mai 1979 et est entachée d'excès de pouvoir ;
Considérant qu'en exécution de la décision contenue dans la lettre du 18 janvier 1990 le Haut-Commissaire en Nouvelle-Calédonie a, par un arrêté du 7 février 1990, retiré un précédent arrêté du 1er juin 1989 par lequel il avait admis M. X... à faire valoir ses droits à la retraite par anticipation en application de l'article 2 de la loi du 8 avril 1957 ; que ce nouvel arrêté qui retire un acte créateur de droits est entaché de la même illégalité que la décision du 18 janvier 1990 dont il fait application ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre délégué au budget n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nouméa a annulé la décision ministérielle du 18 janvier 1990 et, par voie de conséquence, l'arrêté du Haut-Commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en date du 7 février 1990 ;
Article 1er : Le recours susvisé du MINISTRE DELEGUE AU BUDGET est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre du budget, au ministre de l'intérieur et de la sécurité publique et à M. X....