Vu le recours du SECRETAIRE D'ETAT AUPRES DU PREMIER MINISTRE, CHARGE DE L'ENVIRONNEMENT enregistré le 24 juin 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le secrétaire d'Etat demande que le Conseil d'Etat :
1°- annule le jugement du 27 avril 1988 par lequel le tribunal administratif de Lyon a, à la demande de la fédération Rhône-Alpes de protection de la nature, annulé, d'une part, l'arrêté du 20 juillet 1987 du préfet du département de l'Ardèche fixant les dates d'ouverture et de clôture de la chasse, en tant qu'il autorise la chasse de certains oiseaux de passage et des gibiers d'eau au-delà du 31 janvier 1988 au soir, et, d'autre part, l'arrêté du 20 juillet 1987 du préfet du département du Rhône, fixant les modalités de clôture de la chasse, en tant qu'il autorise la chasse des gibiers d'eau au-delà du 31 janvier 1988 au soir,
2°- rejette la demande présentée par la fédération Rhône-Alpes de protection de la nature devant le tribunal administratif de Lyon,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité constituant la communauté économique européenne ;
Vu la directive du conseil des communautés européennes du 2 avril 1979 ;
Vu le décret n° 86-571 du 14 mars 1986 ;
Vu le code rural ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Schwartz, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Waquet, Farge, Hazan, avocat de l'Union nationale des fédérations départementales des chasseurs et de la S.C.P. de Chaisemartin avocat de la Fédération départementale des chasseurs de l'Ardèche et la Fédération départementale des chasseurs du Rhône,
- les conclusions de Mme de Saint-Pulgent, Commissaire du gouvernement ;
Sur les interventions de l'union nationale des fédérations départementales de chasseurs, de la fédération départementale des chasseurs de l'Ardèche et de la fédération départementale des chasseurs du Rhône :
Considérant que l'union nationale des fédérations départementales de chasseurs, la fédération départementale des chasseurs de l'Ardèche et la fédération départementale des chasseurs du Rhône ont intérêt au maintien, d'une part, de l'arrêté du commissaire de la République du département de l'Ardèche en date du 20 juillet 1987 fixant les dates d'ouverture et de clôture de la chasse dans le département de l'Ardèche et d'autre part de l'arrêté du commissaire de la République du département du Rhône en date du 20 juillet 1987 fixant les dates de clôture de la chasse dans le département du Rhône ; qu'ainsi, leurs interventions sont recevables ;
Sur l'intervention de la fédéraion française des sociétés de protection de la nature :
Considérant que la fédération française des sociétés de protection de la nature à intérêt à l'annulation des arrêtés précités des commissaires de la République des départements du Rhône et de l'Ardèche en date du 20 juillet 1987 ; qu'ainsi, son intervention est recevable ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'aux termes de l'article R.159 du code des tribunaux administratifs : "Lorsque l'affaire est en état, le président peut, par une ordonnance, fixer la date à partir de laquelle l'instruction sera close ... Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas visés dans le jugement. Les conclusions et moyens qu'ils contiennent ne sont pas examinés par le tribunal administratif" ; que si un mémoire complémentaire produit par la fédération Rhône-Alpes de protection de la nature a été communiqué après la clôture de l'instruction, fixée au 31 mars 1988, ce mémoire a été enregistré au greffe du tribunal administratif de Lyon le 30 mars 1988, avant la clôture ; qu'ainsi, le moyen tiré de la violation de l'article R.159 du code des tribunaux administratifs manque en fait ;
Sur la légalité des arrêtés préfectoraux litigieux :
Considérant que si la fédération départementale des chasseurs du Rhône et la fédération départementale des chasseurs de l'Ardèche soutiennent que la directive du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages serait illégale comme intervenue dans un domaine échappant à la compétence des instances communautaires, il ressort clairement des dispositions du traité instituant la communauté économique européenne que ladite directive prise selon les règles définies à l'article 235 pour réaliser l'un des objets de la communauté a été compétemment édictée par le conseil des communautés ;
Considérant qu'en vertu de l'article 7, paragraphe 4, de la directive mentionnée ci-dessus, les Etats-membres veillent en particulier, lorsqu'il s'agit d'espèces migratrices, à ce qu'elles ne soient pas chassées pendant leur période de reproduction et pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport réalisé conjointement en mars 1989 à la demande du ministre par le muséum national d'histoire naturelle et l'office national de la chasse que, pour les espèces de gibier d'eau auxquelles s'appliquent les arrêtés litigieux qui fixent pour 1987-1988 la clôture de la chasse, d'une part, au 15 février 1988 au soir pour le canard colvert et au 29 février 1988 au soir pour les autres gibiers d'eau dans le département de l'Ardèche et, d'autre part, au 28 février 1988 pour les gibiers d'eau dans le département du Rhône, le mois de février correspond au début du retour desdites espèces vers leurs lieux de nidification ; qu'ainsi, les arrêtés litigieux ont été pris sur ces points en méconnaissance des objectifs fixés par la directive ; que, par suite, même s'ils ne violent pas les dispositions du décret du 14 mars 1986, ils sont entachés d'excès de pouvoir ; que, dès lors, le secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé de l'environnement n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a, annulé, par le jugement contesté qui est suffisamment motivé, et par lequel les premiers juges ne se sont pas substitués à l'administration, l'arrêté du 20 juillet 1987 du commissaire de la République du département de l'Ardèche et l'arrêté du 20 juillet 1987 du commissaire de la République du département du Rhône en tant qu'ils autorisent la chasse des gibiers d'eau pendant le mois de février 1988 ;
Considérant, en revanche, qu'il n'est pas établi par les pièces du dossier que pour les grives et étourneaux pour lesquels l'arrêté attaqué du préfet de l'Ardèche fixe pour 1987-1988 la clôture de leur chasse au 29 février 1988 au soir, le mois de février correspond au début du retour desdites espèces vers leur lieu de nidification ; que le SECRETAIRE D'ETAT AUPRES DU PREMIER MINISTRE, CHARGE DE L'ENVIRONNEMENT est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté susvisé du préfet de l'Ardèche en tant qu'il autorise la chasse de ces oiseaux de passage au-delà du 31 janvier 1988 au soir ;
Article 1er : Les interventions de l'union nationale des fédérations départementales de chasseurs, de la fédération départementale des chasseurs de l'Ardèche, de la fédération départementale des chasseurs du Rhône, de la fédération française dessociétés de protection de la nature sont admises.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 27 avril 1988 est annulé dans la mesure où il a annulé l'arrêté du 20 juillet 1987 du préfet de l'Ardèche en tant qu'il autorise la chasse des grives et des étourneaux au-delà du 31 janvier 1988 au soir. Les conclusions de la demande présentées devant le tribunal administratifet tendant à l'annulation desdites dispositions de l'arrêté du préfetde l'Ardèche sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions du secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé de l'environnement, est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la fédération Rhône-Alpes de protection de la nature, à l'union nationale des fédérations départementale de chasseurs, à la fédération départementale des chasseurs de l'Ardèche, à la fédération départementale des chasseurs du Rhône, à la fédération française des sociétés de protection de la nature et au secrétaire d'Etat auprès duPremier ministre, chargé de l'environnement.