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28/12/1988 | FRANCE | N°75000

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 28 décembre 1988, 75000


Vu le recours du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale enregistré le 21 janvier 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule les jugements n°s 1279 et 1280 en date du 9 octobre 1985 par lesquels le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 22 mai 1984 du directeur régional du travail et de l'emploi des Pays de Loire en tant que ladite décision exige la modification des dispositions de l'article 13, relatives à la procédure d'alerte, des règlements intérieurs de la Société Drog-

Ouest Distribution et de la Société Décor-Ouest Diffusion,
2°) re...

Vu le recours du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale enregistré le 21 janvier 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule les jugements n°s 1279 et 1280 en date du 9 octobre 1985 par lesquels le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 22 mai 1984 du directeur régional du travail et de l'emploi des Pays de Loire en tant que ladite décision exige la modification des dispositions de l'article 13, relatives à la procédure d'alerte, des règlements intérieurs de la Société Drog-Ouest Distribution et de la Société Décor-Ouest Diffusion,
2°) rejette les demandes présentées devant le tribunal administratif par les Sociétés Drog-Ouest Distribution et Décor-Ouest Diffusion ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de la Ménardière, Auditeur,
- les observations de Me Jousselin, avocat de la Société Drog Ouest Distribution,
- les conclusions de M. Tuot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu de l'article L.122-34 du code du travail, le règlement intérieur "fixe exclusivement : ... les mesures d'application de la réglementation en matière d'hygiène et de sécurité dans l'entreprise ou l'établissement ; les règles générales et permanentes relatives à la discipline ..." ; qu'aux termes de l'article L.122-35 du même code : "Le règlement intérieur ne peut contenir de clause contraire aux lois et règlements, ainsi qu'aux dispositions des conventions et accords collectifs de travail applicables dans l'entreprise ou l'établissement. Il ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ..." ; qu'en vertu de l'article L.122-37 : "L'inspecteur du travail peut à tout moment exiger le retrait ou la modification des dispositions contraires aux articles L.122-34 et L.122-35" ;
Considérant que les alinéas 2 et 3 de l'article 13 de chacun des règlements intérieurs établis par les sociétés Drog-Ouest Distribution et Décor-Ouest Diffusion prévoient que tout salarié qui a un motif raisonnable de se considérer en danger grave pour sa santé ou pour sa vie "devra ...enregistrer par écrit, sur un registre spécial, la situation qui a provoqué l'alerte ou le retrait, dans les conditions prévues par note de service. Le refus ou l'omission du respect de la procédure écrite dans les délais prescrits sont constitutifs d'une faute susceptible de sanction disciplinaire ..." ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.231-8 du code du travail : "Le salarié signale immédiatement à l'employeur ou à son représentant toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé", et qu'aux termes de l'article L.231-8-1 : "Aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l'encontre d'un salarié ou d'un groupe de salariés qui se sont retirés d'une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou pour la santé de chacun d'eux" ; que, si ces dispositions impliquent que le salarié est tenu de signaler immédiatement l'existence d'une situation de travail qu'il estime dangereuse, elles ne l'obligent pas à le faire par écrit ; qu'ayant pour effet d'obliger le salarié à faire connaître par écrit les motifs de son retrait, les dispositions précitées des règlements intérieurs établis par les sociétés Drog-Ouest Distribution et Décor-Ouest Diffusion imposent aux salariés de ces entreprises, dans l'exercice de leur droit de retrait, une sujétion qui n'est pas justifiée par les nécessités de la sécurité ;

Considérant qu'il résulte de ce qu'il précède que le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Nantes a annulé les décisions du directeur régional du travail et de l'emploi des Pays de Loire en date du 22 mai 1984 en tant que, par lesdites décisions, le directeur régional a confirmé les décisions de l'inspecteur du travail de Loire-Atlantique en date du 25 janvier 1984 exigent la modification des alinéas 2 et 3 de l'article 13 de chacun des règlements intérieurs établis par les sociétés Drog-Ouest Distribution et Décor-Ouest Diffusion ;
Article 1er : Les jugements du tribunal administratif de Nantes n°s 1279/84 et 1280/4 en date du 9 octobre 1985 sont annulés.
Article 2 : Les demandes présentées devant le tribunal administratif de Nantes par les sociétés Drog-Ouest Distribution et Décor-Ouest Diffusion sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, à la société Drog-Ouest Distribution et à la société Décor-Ouest Diffusion.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 75000
Date de la décision : 28/12/1988
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-03-01-01 TRAVAIL ET EMPLOI - CONDITIONS DE TRAVAIL - REGLEMENT INTERIEUR - CONTROLE PAR L'INSPECTEUR DU TRAVAIL -Dispositions imposant au salarié, en cas de danger grave et imminent, de consigner par écrit, sur un registre spécial, la situation ayant provoqué l'alerte ou le retrait, et prévoyant, en cas de non respect, des sanctions disciplinaires - Illégalité - Incompatibilité avec les articles L231-8 et L231-8-1 du code du travail.


Références :

Code du travail L122-34, L122-35, L122-37, L231-8, L2131-8-1
Décision du 22 mai 1984 Directeur régional du travail et de l'emploi Pays de Loire décision attaquée confirmation


Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 1988, n° 75000
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: de la Ménardière
Rapporteur public ?: Tuot

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:75000.19881228
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