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28/09/1988 | FRANCE | N°64014

France | France, Conseil d'État, 8 / 7 ssr, 28 septembre 1988, 64014


Vu le recours du ministre de l'économie, des finances et du budget, enregistré le 19 novembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement en date du 18 juin 1984 par lequel le tribunal administratif de Marseille a accordé à M. Georges X... la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ce contribuable a été assujetti au titre des années 1973 à 1976 dans les rôles de la ville de Marseille,
2° remette à la charge de M. X... les droits et pénalités dont la décharge

a été accordée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général d...

Vu le recours du ministre de l'économie, des finances et du budget, enregistré le 19 novembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement en date du 18 juin 1984 par lequel le tribunal administratif de Marseille a accordé à M. Georges X... la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ce contribuable a été assujetti au titre des années 1973 à 1976 dans les rôles de la ville de Marseille,
2° remette à la charge de M. X... les droits et pénalités dont la décharge a été accordée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Descoings, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Martin Martinière, Ricard, avocat de M. Georges X...,
- les conclusions de M. Chahid-Nouraï, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les compléments d'imposition en matière d'impôt sur le revenu et de majoration exceptionnelle que conteste M. Georges X..., établis, respectivement, au titre des années 1973 à 1976 et au titre des années 1973 et 1975, procèdent, d'une part, du rehaussement, à la suite d'une vérification de comptabilité, des bénéfices industriels et commerciaux tirés par son épouse, Mme X..., de l'exploitation d'un salon de coiffure, bénéfices fixés par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires selon les règles du régime forfaitaire d'imposition, d'autre part, de l'imposition, par voie de taxation d'office, pour défaut de réponse à une demande de justifications, de revenus d'origine indéterminée qu'aurait perçus le foyer fiscal imposé au nom de M. X... ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les bases d'imposition, s'agissant des revenus d'origine indéterminée, ont été évaluées non à l'issue d'une vérification de comptabilité mais à l'issue d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ; qu'aucune disposition du code général des impôts ne prévoit ou n'implique que les opérations de contrôle que comporte une vérification de ce type, laquelle n'a aucun caractère contraignant, se déroulent au domicile du contribuable ou que le vérificateur commette une irrégularité s'il demande au contribuable de lui confier en dépôt des documents pour les examiner en son cabinet ; que, par suite, la seule circonstance que le vérificateur a demandé M. X... de lui remettre des relevés de comptes bancaires ou postaux et a conservé un certain temps les documents ainsi remis, alors que le contribuable n'avait pas personnellement formulé par écrit une autorisation ou une demande, n'est pas, par elle-même, de nature à vicier la procédure d'imposition ; qu'il suit de là quele MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour estimer que la procédure d'imposition avait été irrégulière et accorder, par voie de conséquence, la décharge des impositions litigieuses, le tribunal administratif s'est fondé sur ce que, à l'occasion de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble susmentionnée, le vérificateur avait emporté, pour les consulter dans son cabinet, des relevés bancaires alors qu'aucune demande ou autorisation en ce sens n'avait été établie par le contribuable ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. X... devant le tribunal administratif ainsi que celui qu'il développe dans sa défense devant le Conseil d'Etat ;
En ce qui concerne les redressements de bénéfices industriels et commerciaux :
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le vérificateur, à l'occasion du contrôle sur place des écritures comptables du salon de coiffure exploité à titre personnel par Mme X..., ait emporté aucun document de caractère comptable relatif à cette entreprise ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que la vérification sur place aurait, en méconnaissance des dispositions de l'article 1649 septies F au code général des impôts, applicable en l'espèce, excédé trois mois ; que, par suite, les moyens présentés par M. X... sur ces deux points manquent en fait ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que les compléments d'imposition qu'il conteste, en tant qu'ils portent sur les bénéfices industriels et commerciaux réalisés par son épouse, ont été établis à la suite d'une procédure irrégulière ;
En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :
Sur la procédure d'imposition et la charge de la preuve :
Considérant qu'aux termes de l'article 176 du code général des impôts, applicable aux impositions contestées : "En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration ... peut ... demander au contribuable ... des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qui font l'objet de sa déclaration ..." ; qu'en vertu de l'article 179 du même code, également applicable, est taxé d'office, sous réserve des règles propres à la détermination de certaines catégories de revenus, le contribuable qui s'est abstenu de répondre aux demandes de justifications de l'administration ; que, d'après l'article 181 dudit code, la charge de la preuve incombe au contribuable qui, taxé d'office, demande, par la voie contentieuse, la réduction ou la décharge de l'imposition ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment de deux documents signés par le contribuable et son épouse, que les documents confiés au vérificateur dans le cadre de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ont été restitués par celui-ci le 8 mai 1978, date de la demande de justifications présentée à l'intéressé sur le fondement des dispositions précitées de l'article 176 du code général des impôts ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé à soutenir que, du fait de la rétention, postérieurement à la demande de justifications, de documents confiés au vérificateur, cette demande a été formulée dans des conditions qui ne permettaient pas au contribuable de faire valoir pleinement ses droits ; que, dès lors, le moyen présenté par M. X... en ce qui concerne la procédure d'imposition doit être rejeté ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant que, pour contester les impositions, M. X... se borne à soutenir, d'une part, que le service aurait retenu à tort des sommes qui avaient fait l'objet de simples virements de l'un de ses comptes à un autre, d'autre part, aurait omis de tenir compte des disponibilités provenant de prêts et d'un héritage ;
Considérant, sur le premier point, qu'il résulte de l'instruction que, pour la détermination des revenus d'origine inexpliquée, le vérificateur a écarté, comme il convenait de le faire, des virements opérés par M. X... entre ses divers comptes, à concurrence de 86 044 F en 1974 et de 26 986 F en 1975 ; que, si M. X... soutient que d'autres virements auraient été effectués, il n'apporte aucun commencement de justification à l'appui de cette allégation ;

Considérant, sur le second point, que M. X... n'apporte aucune justification de la réalité des prêts dont il déclare avoir bénéficié en 1974 et 1976 et, que, s'il soutient que son épouse aurait perçu, lors du décès de son père, en 1972, l'intégralité de la somme de 345 000 F, figurant en liquidités dans l'actif successoral, ce qui aurait permis l'achat de bons de caisse revendus pendant la période vérifiée, il ne produit aucun commencement de preuve à l'appui de ces allégations ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET est fondé à demander le rétablissement de M. X... aux rôles de l'impôt sur le revenu et de la majoration exceptionnelle à raison de l'intégralité des cotisations supplémentaires assorties des pénalités auxquelles il avait été assujetti ;
Article ler : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 18 juin 1984 est annulé.
Article 2 : M. Georges X... est rétabli aux rôles de l'impôt sur le revenu et de la majoration exceptionnelle respectivement au titre des années 1973, 1974, 1975 et 1976 et au titre des années 1973 et 1975 à raison de l'intégralité des impositions supplémentaires assorties des pénalités qui lui avaient été assignées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-03-01-03-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - VERIFICATION APPROFONDIE DE SITUATION FISCALE D'ENSEMBLE - PROCEDURE -Garanties non applicables en cas de V.A.S.F.E. - Interdiction d'emport des documents confiés par le contribuable.

19-01-03-01-03-03 Aucune disposition du CGI ne prévoit ou n'implique que les opérations de contrôle que comporte une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble, laquelle n'a aucun caractère contraignant, se déroulent au domicile du contribuable ou que le vérificateur commette une irrégularité s'il demande au contribuable de lui confier en dépôt des documents pour les examiner en son cabinet. Par suite, la seule circonstance que le vérificateur a demandé au contribuable de lui remettre des relevés de comptes bancaires ou postaux et a conservé un certain temps les documents ainsi remis, alors que le contribuable n'avait pas personnellement formulé par écrit une autorisation ou une demande, n'est pas, par elle-même, de nature à vicier la procédure d'imposition.


Références :

CGI 1649 septies F, 176, 179, 181


Publications
Proposition de citation: CE, 28 sep. 1988, n° 64014
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Ducamin
Rapporteur ?: M. Descoings
Rapporteur public ?: M. Chahid-Nouraï

Origine de la décision
Formation : 8 / 7 ssr
Date de la décision : 28/09/1988
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 64014
Numéro NOR : CETATEXT000007621674 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1988-09-28;64014 ?
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