Vu le recours et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 mai 1985 et 12 septembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le MINISTRE DE LA DEFENSE, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule le jugement du 5 mars 1985 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a annulé la décision ministérielle du 14 décembre 1982 portant suspension des droits à pension militaire de retraite de M. Jean X...,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu la loi du 4 août 1981 portant amnistie ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Richer, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Lenoir, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 59 du code des pensions civiles et militaires de retraite : "Le droit à ... la jouissance de la pension ... est suspendu à l'égard de tout bénéficiaire du présent code qui aura été ... mis à la retraite d'office ... pour avoir été convaincu de malversations relatives à son service" ;
Considérant que M. X..., sous-officier comptable au centre mobilisateur °n 69, a été radié des cadres par mesure disciplinaire et mis à la retraite d'office par arrêté du ministre de la défense en date du 21 juin 1982 pour "avoir connu des déficits dans les stocks dont il avait la charge, avoir modifié les écritures afin de mettre les existants en accord avec la comptabilité du matériel et avoir reconnu en outre avoir détourné des matériels militaires provenant de stocks de mobilisation" ; qu'il n'a pas contesté ledit arrêté devant le juge administratif ; que si, par jugement du tribunal de grande instance de Reims du 19 avril 1985, non frappé d'appel, il a été relaxé du chef de "dissipation de matériel militaire", le tribunal ayant estimé que le délit n'était pas établi, le même jugement le reconnait coupable d'avoir, en 1980 et 1981, commis des "faux en écritures privées par altérations, surcharges d'écritures dans les feuillets ... d'un registre inventaire récapitulatif de l'habillement mobilisation" et d'avoir "fait usage de ces écritures falsifiées, notamment en les mettant à la disposition de son successeur, de même en ce qui concerne les bordereaux de distribution journalière" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, compte tenu des faits, revêtus de l'autorité absolue de chose jugée, que le tribunal de grande instance de Reims a retenus pour se prononcer sur les poursuites, M. X... s'est rendu coupable de malversations relatives à son service ; qu'il suit de là que le ministre de la défense a pu, sans méconnaître l'autorité de la chose jugée au pénal, prendre, le 14 décembre 1982, la décision de suspendre son droit à l'obtention d'une pension militaire de retraite ; que le ministre de la défense est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, en date du 5 mars 1985, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a prononcé l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision en se fondant sur ce que la condition prévue pour l'application des dispositions de l'article 59 du code des pensions civiles et militaires de retraite n'était pas remplie ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués en première instance par M. X... ;
Considérant que les mesures dont M. X... a été l'objet ne sont pas de celles qui entrent dans le champ d'application de la loi du 4 août 1981 portant amnistie ;
Considérant que la circonstance que les supérieurs hiérarchiques de M. X... auraient été l'objet de sanctions moins sévères que celles qui l'ont frappé alors que leurs responsabilités seraient plus grandes n'est pas de nature, par elle-même, à entacher d'illégalité la décision attaquée ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne du 5 mars 1985 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Jean X... devant le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de la défense et à M. Jean X....