Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 22 février 1984 et 7 mars 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. X...
Y..., demeurant ... 94110 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 12 décembre 1983 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre des années 1981 et 1982 par avis de mise en recouvrement du 2 septembre 1982 et restant dus après dégrèvement partiel du 6 septembre 1983,
2° lui accorde la décharge de l'imposition contestée,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Renauld, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;
Sur le dégrèvement intervenu :
Considérant que par décision du 6 septembre 1983 postérieure à l'enregistrement de la demande de M. Y... devant le tribunal administratif de Paris, le directeur des services fiscaux du département du Val-de-Marne a, accordé un dégrèvement de 5 386 F, sur les droits en litige ; que la demande était dans cette mesure devenue sans objet ; qu'ainsi c'est à tort que le tribunal administratif a statué sur l'intégralité de ladite demande ; qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il statue sur les conclusions de la demande devenues sans objet, d'évoquer ces conclusions et de décider qu'il n'y a lieu d'y statuer ;
Sur les impositions restant à la charge de M. Y... :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est, d'ailleurs, pas contesté que M. Y... a formé les 26 et 30 décembre 1982 des réclamations tendant à la décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti sous le régime du forfait au titre de la période correspondant à chacune des années civiles 1981 et 1982 par avis de mise en recouvrement du 2 septembre 1982 ; que c'est, dès lors, à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté les conclusions de la demande formée le 4 août 1983 par M. Y... en décharge des impositions restant en litige, comme irrecevables faute d'avoir été précédées d'une réclamation à l'administration ; que dès lors les dispositions de ce jugement par lesquelles le tribunal administratif a statué sur ces conclusions doivent également être annulées ;
Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur lesdites conclusions ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 261 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à la période d'imposition litigieuse : "Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée... 3-1° Sous réserve, le cas chéant, des dispositions de l'article 257-13° et 15° les ventes de biens usagés faites par les personnes qui les ont utilisés pour les besoins de leurs exploitations... 2° Les opérations de vente, de commission et de courtage portant sur les déchets neufs d'industrie et sur les matières de récupération" ; que les objets usagés revendus par M. Y..., brocanteur, ne constituent ni des déchets neufs d'industrie, ni des matières de récupération au sens du 3-3° de l'article 261 précité du code, ni davantage des biens usagés vendus dans les conditions prévues par le 3-1° du même article ; que, par suite, les ventes litigieuses, qui entraient dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée défini à l'article 256 du code, ne peuvent pas, contrairement à ce que soutient le requérant, être exonérées de ladite taxe en application des dispositions précitées de l'article 261 du même code ;
Considérant, en deuxième lieu, que si, en vertu des dispositions du 1-3°-a de l'article 261, sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée "lorsqu'elles sont soumises au droit proportionnel d'enregistrement prévu à l'article 733, les ventes publiques... d'objets d'occasion..." cette disposition ne vise pas la revente aux clients d'objets d'occasion même si ceux-ci provenaient de ventes publiques ; que, dès lors, M. Y... ne peut prétendre à ce titre à aucune exonération ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 282 du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au cours des années d'imposition : "1. La taxe sur la valeur ajoutée n'est pas mise en recouvrement lorsque son montant annuel n'excède pas 1 350 F -2 Lorsque ce montant est supérieur à 1 350 F et n'excède pas 5 400 F, l'impôt exigible est réduit par application d'une décote dont les modalités de calcul sont fixées par décret" ; qu'il résulte de ces dispositions que la franchise prévue au 1 de l'article 282 s'applique au montant des droits de taxe sur la valeur ajoutée exigibles avant et non pas après application de la décote prévue au 2 du même article ; que, dès lors, M. Y..., qui était redevable, au titre des périodes correspondant à chacune des années 1981 et 1982, de droits de taxe sur la valeur ajoutée s'élevant, avant application de la décote susmentionnée, à 2 296 F n'est pas fondé à demander le bénéfice de la franchise prévue au 2 de l'article 282 précité du code ;
Article ler : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 12 décembre 1983 est annulé.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande présentée devant le tribunal administratif en tant qu'elles tendent à la décharge d'une somme de 5 386 F.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Y... et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.