Vu le recours du ministre de l'économie, des finances et du budget enregistré le 25 août 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 30 mai 1983 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à l'Association consulaire et interprofessionnelle pour le développement de la formation continue ACIDEF décharge du versement au Trésor Public prévu par l'article L.920-10 du code du travail qui lui a été réclamé, au titre des années 1976 à 1978, par avis de mise en recouvrement n° 804 037 E du 23 décembre 1980 et 814 095 E du 12 janvier 1981 ;
2° remette à la charge de l'A.C.I.D.E.F. les sommes faisant l'objet des avis de mise en recouvrement susmentionnés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le décret n° 47-233 du 23 janvier 1947 ;
Vu la loi n° 75-1332 du 31 décembre 1975 ;
Vu le décret n° 76-451 du 18 mai 1976 ;
Vu le décret n° 76-830 du 28 août 1976 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Latournerie, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Odent avocat de l'Association consulaire et interprofessionnelle de la formation continue ACIDEF ,
- les conclusions de M. Martin-Laprade, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.920-10 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 75-1332 du 31 décembre 1975 : "Lorsque des dépenses faites par le dispensateur de formation pour l'exécution d'une convention du titre II du présent livre ne sont pas admises parce qu'elles ne peuvent, par leur nature, être rattachées à l'exécution d'une convention de formation ou que le prix des prestations est excessif eu égard à leur prix de revient normal, le dispensateur de formation est tenu, solidairement avec ses dirigeants de fait ou de droit de verser au Trésor public une somme égale au double du montant de ces dépenses" ; qu'en vertu de l'article L.950-8 du même code des agents commissionnés par l'autorité administrative sont habilités à procéder au contrôle sur place des dépenses effectuées par les dispensateurs de formation pour l'exécution des conventions de formation professionnelle prévues au titre II du livre IX du code du travail ; qu'aux termes, enfin, de l'article 9 du décret 76-451 du 18 mai 1976 pris sur le fondement de l'article L.950-8 du code du travail : "Les agents chargés du contrôle de la participation des employeurs au financement de la formation professionnelle continue visés à l'article L.950-8 du code du travail sont commissionnés, soit par le Premier Ministre, soit par les préfets de région" ;
Considérant, d'autre part, que le décret n° 78-538 du 13 avril 1978 dispose : " M. Robert Y..., ministre du tavail et de la participation, suit, par délégation du Premier Ministre, les affaires concernant la formation professionnelle continue dans le cadre de l'éducation permanente... Il a autorité sur le secrétariat général de la formation professionnelle" ; qu'aux termes du décret n° 78-539 du 13 avril 1978 " M. Jacques Z..., secrétaire d'Etat auprès du ministre du travail et de la participation est chargé, sous l'autorité du ministre, des affaires concernant la formation professionnelle. M. Jacques Z... reçoit délégation du ministre du travail et de la participation pour signer, en son nom, tous actes, arrêtés ou décisions dans la limite des attributions mentionnées ci-dessus. Il est lui-même autorisé à déléguer sa signature, dans les conditions prévues par le décret du 23 janvier 1947 modifié ..." ; qu'en vertu de l'article 1er de ce décret, modifié par le décret n° 76-830 du 28 août 1976 : "les ministres peuvent, par arrêté, donner délégation pour signer tous actes individuels ou règlementaires, à l'exception des décrets ... 2° Aux fonctionnaires de leur administration centrale ayant au moins le grade d'administrateur civil ou un grade équivalent ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions qu'un agent pouvait légalement être commissionné pour procéder au contrôle de la participation des employeurs au fonctionnement de la formation professionnelle continue par un fonctionnaire de l'administration centrale ayant au moins le grade d'administrateur civil de 2è classe ou un grade équivalent auquel M. Jacques Z..., secrétaire d'Etat auprès du ministre du travail et de la participation formation professionnelle avait régulièrement délégué sa signature ;
Considérant que par arrêté du 25 avril 1978, signé de M. Jacques Z... et publié au journal officiel du 10 mai 1978, M. Philippe X..., chef du groupe national de contrôle de la formation professionnelle, a été autorisé à signer, au nom du secrétaire d'Etat auprès du ministre du travail et de la participation formation professionnelle par délégation de celui-ci, tous actes, arrêtés ou décisions à l'exclusion des décrets, concernant le contrôle de la formation professionnelle ; qu'il n'est pas contesté que M. X... exerçait ses fonctions dans un service de l'administration centrale placé sous l'autorité de M. Robert Y..., ministre du travail et de la participation et mis à la disposition de M. Jacques Z..., secrétaire d'Etat auprès de ce ministre par les décrets n° 78-538 et 78-539 du 13 avril 1979 et qu'il était titulaire de l'un des grades mentionnés au 2° de l'article 1er du décret du 23 janvier 1947 précité ; que la circonstance que le groupe national de contrôle de la formation professionnelle, dont il était le chef, n'aurait été régulièrement créé qu'après la date de cette délégation et même après celle de la décision attaquée est sans influence sur la légalité de cette délégation et de cette décision ; qu'ainsi M. X... était compétent pour signer une décision commissionnant un agent de contrôle en application des dispositions précitées de l'article 9 du décret du 18 mai 1976 ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... a fait connaître au président de l'Association consulaire et interprofessionnelle pour le développement de la formation continue ACIDEF , par lettre du 8 janvier 1979, qu'il avait désigné M. A..., chargé de mission au groupe national de contrôle de la formation professionnelle, pour procéder au contrôle de cette association déclarée, en application de l'article L.920-4 du code du travail, comme organisme dispensateur de formation ; qu'ainsi M. A..., alors même qu'il n'aurait pas appartenu à un corps de contrôle, a été régulièrement commissionné pour effectuer ce contrôle ; que c'est, dès lors, à tort que le tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce que M. A... aurait été commissionné par une autorité incompétente pour accorder décharge à l'A.C.I.D.E.F. des versements au Trésor public qui, au vu des résultats du contrôle effectué par cet agent lui ont été réclamés sur le fondement des dispositions précitées de l'article L.920-10 du code du travail, par avis de mise en recouvrement du 23 décembre 1980, en ce qui concerne l'année 1976, et du 12 janvier 1981, en ce qui concerne les années 1977 et 1978 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel de l'ensemble du litige, d'examiner les autres moyens soulevés par l'A.C.I.D.E.F. devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'il résulte des dispositions déjà citées de l'article L.920-10 du code du travail qu'est assujetti au versement institué par ces dispositions le dispensateur de formation ayant conclu avec des employeurs des conventions en vertu du titre II du livre IX du code du travail, qui impute sur des fonds versés par ces employeurs en exécution du 1° de l'article L.950-2 du même code des dépenses faites par lui qui, soit n'entrent pas dans l'énumération des dépenses libératoires de cette obligation donnée par les dispositions réglementaires prises sur le fondement de l'article L.950-10 dudit code, soit se rapportent à des prestations de formation fournies par lui à ses cocontractants pour un prix excessif eu égard à leur prix de revient normal ;
Considérant, d'une part, que les écritures comptables par lesquelles l'A.C.I.D.E.F. a, par application des stipulations de conventions "multilatérales" de formation auxquelles elle était partie, transféré au profit de certains employeurs les droits à prestations de formation correspondant à une partie des fonds reçus d'autres employeurs au titre de l'article L.950-2-1° du code du travail ne peuvent être regardées comme retraçant des dépenses faites par cette association ; qu'elles n'ont donc pu légalement avoir pour effet de faire entrer l'A.C.I.D.E.F. dans le champ d'application du versement au Trésor prévu par l'article L.920-10 ; que, dès lors, l'A.C.I.D.E.F. est fondée à soutenir que, dans la mesure où il procède du "rejet" à concurrence de 151 527 F pour 1976, de 181 316 F pour 1977 et de 223 606 F pour 1978, de transferts entre divers employeurs de droits à prestations de formation correspondant à des fonds perçus par elle en application du 1° de l'article L.950-2 du code du travail, le versement au Trésor auquel elle a été assujettie sur le fondement de l'article L.920-10 du même code manque de base légale ;
Considérant, d'autre part, que l'article R.950-5 du code du travail pris sur le fondement de l'article L.950-10 du même code, autorise la prise en compte, au titre des actions de formation mentionnées à l'article L.950-2-1°, des dépenses de fonctionnement des stages organisés pour les personnels visés par ces actions et inclut dans ces dépenses les rémunérations des personnels non enseignants affectés à temps plein à l'organisation et à l'administration des stages ainsi que les cotisations de sécurité sociale y afférentes, à la charge de l'employeur, et les charges légales assises sur ces rémunérations ; que, dès lors, en rapportant au prix de revient de certains stages de formation fournis pendant les années 1976 à 1978 à des entreprises avec lesquelles elle était liée par des conventions venues à expiration pendant ces années, le coût des journées spécialement consacrées à la mise au point de ces stages par son personnel non enseignant affecté à temps plein à l'organisation et à l'administration des stages de formation fournis pendant lesdites années à l'ensemble de ses cocontractants, l'A.C.I.D.E.F. n'a pas fait une inexacte application des dispositions réglementaires susrappelées ; que, par suite, elle est fondée à soutenir que, dans la mesure où il procède du "rejet", à concurrence de 105 900 F pour 1976, de 73 600 F pour 1977 et de 69 500 F pour 1978, d'une partie des dépenses afférentes à la rémunération de son personnel non enseignant affecté à temps plein à l'organisation et à l'administration de stages de formation, qu'elle a exposées pour l'organisation de stages qui ont eu lieu effectivement pendant ces années, le versement au Trésor auquel elle a été assujettie sur le fondement de l'article L.920-10 du code du travail manque, lui aussi, de base légale ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et du budget n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a accordé à l'A.C.I.D.E.F. la décharge du versement au Trésor en litige ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'A.C.I.D.E.F. et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.